Au-delà d’une énième démonstration de l’inanité des prédictions sondagières, de ceux qui les commandent comme de ceux qui les produisent, notre récent montage des « unes » consacrées à Alain Juppé illustrait combien, notamment en période électorale, les médias préfèrent parier sur les joueurs plutôt que d’informer sur les enjeux. En privilégiant à la « une » un petit nombre d’individus souvent interchangeables plutôt que les innombrables questions susceptibles de nourrir le débat proprement politique, les médias dominants, via la personnalisation à outrance de la vie politique et des « événements » qui la scandent, se révèlent une arme de dépolitisation massive.
À cet égard, les « unes » du Parisien pour le seul mois de novembre furent exemplaires :
Il ne faut pas s’y tromper : ces questions rhétoriques et autres verdicts catégoriques ne font que nourrir l’illusion d’une miraculeuse vitalité démocratique. Car en résumant de la sorte la politique à des querelles de personnes et à des questions d’image et de sondages, les grands médias confisquent le débat politique plus qu’ils ne le servent.
Et Le Parisien est malheureusement loin d’être un cas isolé :
Etc.
À l’heure où le microcosme politique semble plus que jamais coupé du monde réel, force est d’admettre que la misère du journalisme politique renforce plus qu’elle n’entrave ce phénomène. En nourrissant – consciemment ou non – le culte de la personnalité politique, les médias dominants contribuent en effet au désenchantement et à la dépolitisation du monde, notamment politique.
Par conséquent, nous ne pouvons que reprendre à notre compte cette question posée par Le Parisien le 29 novembre, mais en l’appliquant à ce pseudo-journalisme politique :
Car un autre journalisme politique est possible, et même souhaitable, particulièrement à l’aube de la campagne présidentielle.
Thibault Roques
Post-scriptum : les premières réactions au renoncement de François Hollande à se présenter à la prochaine présidentielle sont un nouveau cas d’école illustrant la fâcheuse tendance dans nombre de rédactions à la personnalisation des débats au détriment de leur politisation.
Florilège :