Alors que se multiplient les révélations sur les manipulations médiatiques de l’OTAN pendant la guerre au Kosovo, les journalistes français les plus bellicistes gesticulent pour dissimuler leurs bavures.
Le répertoire de l’éditorialiste aux abois comporte plusieurs registres : escamoter les questions gênantes, nier ses erreurs, édulcorer les révélations encombrantes et tordre les faits à son profit. Ils furent souvent interprétés en chœur.
Cachez ces faits que je ne saurais voir
Volubiles sur la propagande de Belgrade, les journaux intimes de l’OTAN commentèrent avec parcimonie certaines révélations embarrassantes. Ainsi, Le Monde (8/6/2000) ensevelit en bas de page un article malingre consacré au rapport d’Amnesty établissant les violations du droit international par l’OTAN. Le quotidien du soir réserve en général sa "une" à des informations décisives, telles " Dieu s’installe sur Internet " (9-10/7/2000). Service minimum également lorsque la procureur du TPI refusa d’engager des poursuites contre l’organisation atlantique (6/7/2000). A Libération, c’est à peine si l’information était jugée digne d’une brève (14/6/2000).
La palme de l’esquive revient toutefois au Nouvel Observateur. Un général de l’OTAN avait expliqué dans ses colonnes " Nous ne révélions la vérité que quinze jours plus tard, quand elle n’intéressait plus personne " (1er/7/1999). Mettant à profit ces conseils, l’hebdomadaire attendit le 13 juillet 2000 pour comprimer dans un encadré de 15 lignes les conclusions d’un rapport sur les victimes civiles de la guerre publiées six mois plus tôt, et celles de l’enquête de Newsweek sur l’inefficacité militaire des bombardements, parue en mai. La nouvelle ligne du Nouvel Obs : en parler sans rien dire pour dire qu’on en a parlé.