Accueil > Critiques > (...) > Les miettes du festin démocratique [Référendum de 2005]

Mieux vaut être riche et bien portant » (par le Ministère de la propagande et ses auxiliaires)

par Henri Maler,

Des esprits lucides n’ayant vu aucune intention maligne dans la diffusion du spot publicitaire qui a servi de point de départ à la « Lettre ouverte au CSA, à Radio France et au ministère de la propagande », nous offrons à l’exercice leur sagacité, quelques écrans publicitaires captés sur un médias parmi d’autres : Wanadoo, notamment dans la rubrique... « Sports ».

Ces écrans ont été successivement découverts, le 28 février 2005, à 11h44, 13h37, 13h49 et 15h08... avant que nous ne prenions connaissance des élégants commentaires de M. Riot, directeur de la rédaction européenne de France 3.

I. « Esprit du Traité, es-tu là ? »

Ces écrans publicitaires ont tous en commun d’extraire du projet de Traité constitutionnel une courte citation qui, parce qu’elle met en avant des déclarations d’intentions consensuelles, ne peut être qu’approuvée, comme si ces citations étaient représentatives de l’ensemble du Traité et de son « esprit », dont on reparlera plus loin.

Passons sur l’article 47, déjà évoqué et reproduit par nos soins en version texte en version sonore ici même. Comment est-il pensable, simplement pensable, de s’opposer à un référendum d’initiative citoyenne ?

... et apprécions ces trois « écrans »

Préambule :

Comment est-il pensable, simplement pensable, de s’opposer à une Europe démocratique de la paix, de la justice et de la solidarité ?

Article 97 :

Comment est-il pensable, simplement pensable, de s’opposer à la protection de l’environnement et au développement durable ?

Article 282 :

Comment est-il pensable, simplement pensable, de s’opposer à une éducation de qualité ?

Qui pourrait s’opposer à de telles promesses de bonheur ? Qui nous dira que ces extraits, soigneusement choisis, peuvent être compris autrement que comme une invitation à voter en faveur du Traité ? Peut être des journalistes qui seraient à ce point contaminés par la publicité qu’ils ne parviendraient plus à distinguer une « brève » d’un « spot », l’information de la communication ou la communication de la propagande... Nous dédions donc ces spots publicitaires à un certain M. Riot, dont nous allons à présent faire la connaissance...

II. « Esprit du journalisme es-tu là ? »

Sur le site d’Europeus.org [1], où il se présente comme « directeur de la rédaction européenne de France 3 », mais où - sans qu’il estime nécessaire de le préciser - il ne s’exprime peut-être pas à ce titre, Daniel Riot s’interroge : « Union européenne : où commence la propagande ». Et Monsieur le « directeur de la rédaction européenne de France 3 » est indigné :

« On connaissait les alter-mondialistes. Pourquoi pas ? Qui ne rêve pas d’un autre monde, meilleur ? [...] Voici les alter-journalistes ou les alter-censeurs, comme on voudra : ceux qui tracent d’autres frontières entre information et propagande, ceux pour qui expliquer la Constitution revient à faire de la propagande en faveur du Oui ? »

Quand un professionnel, aussi manifestement pénétré de son importance que l’est que M. Riot, s’inquiète avec un tel talent d’une éventuelle censure, on savoure :

« La pétition récemment lancée contre la présentation tronquée de la Constitution européenne dans un spot radio du gouvernement sur le référendum relève de cette alter-censure qui est d’abord une alter-lecture, je veux dire d’une lecture altérée... » . Et de souligner la subtilité de ces jeux de mots par cette imposante question : « Avez-vous suivi ? ». On l’a compris : la pensée de M. Riot, ça se mérite...

Le « résumé » qui suit permet à notre esprit libre de prendre à partie le « collectif d’associations » qui a eu l’outrecuidance de s’insurger « contre la diffusion d’un spot publicitaire présentant une « version tronquée » d’un article de la Constitution » (dans une « Lettre ouverte au CSA, à Radio France et au Ministère de la propagande ».).

Viennent alors les redoutables questions de M. Riot : « Faut-il vraiment ne parler de la Constitution qu’en la citant intégralement ? Faut-il revoir la définition du spot, du clip, de la brève... ? Faut-il mettre les points sur le « i » ? En quoi les « coupures » faussent-elles le sens de l’article en question ? »

Et pour établir que le sens n’est pas faussé, le très-intelligent de service (on verra pourquoi cette appellation lui convient un peu plus loin) de se lancer dans une explication qui, précisément, ne figure pas dans le texte, et pour cause. Qu’un journaliste fasse l’éloge, en les donnant pour identiques, du spot, du clip et de la brève est assez confondant. On le comprend mieux à ce qui suit :

« Question subsidiaire ? Pourquoi un tel souci d’exactitude, un tel pointillisme, une telle exigence maniaco-obsessionnelle ne sont-ils pas illustrés davantage dans les « fiches » et autres « argumentaires » qui fleurissent sur les innombrables sites qui prônent le « non » ? ».

Apprendre que le « souci d’exactitude » est, pour un journaliste, une « exigence maniaco-obsessionnelle » ne manque pas d’intérêt.

Ce n’est pas fini. Les associations (et notamment les syndicats de journalistes et de professionnels des médias) qui ont signé la lettre ouverte seront ravies d’apprendre que M.Riot les tient, explicitement, pour des cons :

« Il est des jours où les altérations des « alter » donnent à penser que le bon sens est bien altéré dans bien des têtes... A l’heure où on fête le centième anniversaire des naissances de Sartre et de Aron, nos « alter-élites » présentent des troubles graves qui expliquent cette « Défaite de la pensée » qui fait des ravages. [...] Les Etats-Unis souffrent des « néo-cons(ervateurs) ». Le vieux Continent souffrent des « euro-cons ». [...] ».

M. Riot poursuit : « Quand on s’en tient au texte sans en respecter ni le contexte ni l’esprit, on se disqualifie littéralement... ». Où l’on trouve enfin l’ « esprit » du Traité dont les spots publicitaires seraient l’expression, en toute « « neutralité » ».

L’argument se retourne sans peine contre celui qui l’invoque. A n’attribuer au texte que « l’esprit » ou « le contexte » qui lui est le plus favorable ou en ne citant que les articles qui correspondent à cet « esprit », c’est le débat rationnel que l’on fausse intentionnellement. Mais il va de soi, pour M. Riot, qu’on ne discute pas avec des cons [2].

Rappelons que M. Riot ne se présente pas comme un citoyen ordinaire, mais comme un journaliste extraordinaire, « directeur de la rédaction européenne de France 3 » [3]

 
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Notes

[1Lien périmé, février 2014.

[2Conclusion de M. Riot : « Je vais relire l’excellente interview de Pierre Legendre, faite par Elisabeth Lévy dans le Point sur “l’imbécillité contemporaine” : je vous conseille de la lire intégralement. C’est tellement bon un peu d’intelligence. Au fait, c’est le même Legendre qui en maints ouvrages est obsédé par une question-clef : “Comment résoudre l’énigme de ceux qui démocratiquement n’ont qu’une envie : rompre avec la démocratie ? ”  ». « Vous avez suivi ? », comme dit le bon Monsieur Riot. Résumons : les cons sont des imbéciles anti-démocrates. Quant à M. Riot...

[3M. Riot reproduit dans son blog personnel son impérissable contribution à la discussion, ainsi que quelques tracts... de pure information,... comme celui-ci (hxxp ://vvv.danielriot.com/archive/2005/03/07/eh_oui_voici_de_bonnes_mauvaises_raisons_de_voter_non.html, lien pérmé).

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