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L’actualité des médias n°19 (22 fév.-15 mars 2004)

par William Salama,

1. AUDIOVISUEL

 ADSL. Concernant la mêlée du haut-débit, Libération alerte sur les manœuvres « à la hussarde » de France Telecom (marié à TF1 sur la TV par ADSL) auprès des « conseils régionaux » dans l’idée de leur refourguer un « partenariat exclusif ». Traduction critique : « Faire place Net en région » selon la formule de Libération (3 mars) ; ou bien traduction raffarinesque : « France Télécom multiplie les accords avec les départements  » pour le quotidien d’affaires Les Echos (4 mars). De son côté, Canal Plus propose, à son tour et comme prévu, une offre TV sur ADSL (La Tribune, 11 mars).

 Câble et Satellite. Le câblo-opérateur Noos (dont Suez ne veut plus) va «  être racheté par Liberty Média », une grosse boutique américaine que même Le Figaro Economie (5 mars) définit comme « nébuleuse opaque » : filiale d’UGC, propriétaire d’un certain nombre de titres, chaînes, opérateurs et devenue récemment principal actionnaire de News Corp., le groupe de Rupert Murdoch. Mais le montage financier de l’opération à 624 millions d’euros est tellement « complexe » que Gérard Mestrallet (patron de Suez) n’a pas jugé utile de le « détailler » (Les Echos, 5 mars).

Mais, après le câble, c’est la télévision par satellite qui patine cette année : « TPS/CanalSat : le match des abonnés » résume Stratégies du 4 mars. Bref, l’étude d’audience Mediacabsat de Médiamétrie est formelle (comme doivent l’être les études) : « Les leaders du câble et du satellite reculent » (détails chiffrés dans La Tribune, 10 mars) ou « le succès des chaînes minigénéralistes » (Le Figaro Economie, 11 mars). Car « alors que plus en plus de français s’abonnent à des offres de télévision payantes, ils continuent de regarder majoritairement les chaînes hertziennes » (Les Echos, 10 mars).

Du coup, cette « vente de Noos à l’américain Liberty Medias [ayant] accéléré un dossier que beaucoup disaient durablement bloqué » et l’« assouplissement de la loi [paquet télécom] » aidant, ça se précipite et ça se concentre : Le Figaro Economie (13 mars) annonce que « les discussions sont maintenant très avancées entre France Télécom et Canal + pour fusionner leur deux filiales du câble, France Télécom câble et NC Numéricâble ». Soit, 1,6 millions d’abonnés en perspective.

 Autres faits audiovisuels. TF1 est contre la TNT en France (mais pas en Italie, car là-bas il est preneur). Patrick Le Lay a envoyé un nouveau « missile » : la télévision haute définition. Détails dans Les Echos du 26 février : « le dossier de la télévision numérique terrestre se complique encore pour le CSA ».

Un rapport remis à Aillagon mais qui n’est - comme toujours, lorsque le ton monte - qu’un « document de travail », préconise « plus de publicité sur les chaînes pour accroître leurs recettes » (La Tribune, 4 mars).

Grâce aux amendements du paquet télécom (accès à la publicité nationale ; adossement à des grands groupes) les télévisions locales publiques ou privées peuvent et cherchent désormais « les moyens de se développer ». Lire Les Echos du 4 mars ou L’Humanité du 5 : « Le grand marché ».

 Groupe M6. La chaîne se réjouit de recettes publicitaires en hausse de 8 % pour le premier semestre 2004 (Les Echos, 9 mars), et « 131,6 millions d’euros » pour 2003, soit un bon de 17,7 % par rapport à 2002 (communiqué). Autre source de financement : « Téléachat : la discrète machine à cash de TF1 et M6 » (CB News, 1er mars). Le Pdg de M6 a par ailleurs « appelé la France à une réflexion sur le soutien à ses groupes audiovisuels  » (Les Echos, 9 mars). Pas de grands sentiments évidemment derrière cette annonce : la lutte pour la survie concurrentielle ne va pas sans boulimie (voir plus haut « télévisions locales »).

 Canal Plus. « Canal + dispose d’une autorisation qui court jusqu’en 2005 et qui doit être reconduite automatiquement pour cinq années de plus. D’ici là, l’arrivée du numérique aura remis sur le tapis la question du plan des fréquences analogiques et celle de leur redistribution au profit de nouveaux acteurs. Nul doute que ces derniers autant que les concurrents actuels de Canal + auront à cœur d’en récupérer le plus grand nombre possible ». De fait, indique Le Figaro Economie (1er mars) : « Le groupe Canal + prépare l’éclatement de la chaîne cryptée ». Rien de neuf : que du marketing. Et le lendemain, la réassurance du directeur général (Christophe Bellmer) sur le même Canal : « La diffusion hertzienne fondamentale », 2 mars.

 Lagardère. Jean-Pierre Cottet (l’ancien directeur général de France 5) se recase chez Lagardère en tant que « responsable de l’audiovisuel » (Le Figaro, 5 mars).

 France 2. Arlette Chabot, qu’on ne présente plus, dans le consensuel (elle a choisi Bilalian pour présenter la soirée électorale des Régionales, a révélé Le Monde du 4 mars), remplace Olivier Mazerolle à la tête de l’information de France 2. Sa profession de foi en rappelle d’autres, restées sans conséquence : « On ne peut pas ignorer la concurrence. On est dans un secteur concurrentiel. Mais courir derrière TF1 est ridicule. A nous de montrer notre identité, notre différence en assumant des choix ». Et en faisant preuve de beaucoup d’esprit de sacrifice : « Je n’étais pas très enthousiaste car ma position était plutôt confortable (sic) auparavant, entre Mots croisés et Europe 1. Puis un responsable de la rédaction m’a fait remarquer qu’accepter serait relever un défi, et aussi un acte de ’’patriotisme’’ à l’égard de la rédaction » (Le Journal du Dimanche - groupe Lagardère, auquel appartient Europe 1 - 29 février). Etienne Leenhardt se fade la direction adjointe (Le Figaro Economie, 3 mars) et Vincent Geerhards, devient rédacteur en chef du journal de 20 heures. Notons, sur « l’affaire Pujadas », quelques « enquêtes » superficielles. Notamment : « Les vingt jours qui ont ébranlé la rédaction de France 2  » (Le Monde, 29 février). Quant à Pujadas lui-même, c’est au lectorat du Parisien qu’il a réservé ses premières « réflexions » dans une interview du 8 mars : « Je n’ai plus le droit à l’erreur  » ; « J’ai été surpris par l’ampleur » ; « Je n’ai pas a commenté cette décision courageuse (sic) », à savoir : la démission de Mazerolle.

 TF1. Christian Bîmes, président de la Fédération Française de Tennis, devient par ailleurs « délégué en charge des dossiers de stratégie et de développement » de TF1 « intéressée (par sa filiale Eurosport) par la diffusion de Roland Garros à l’international  » (Libération, 3 mars). De la porosité entre le sport et le béton...

 CSA. Marie-Laure Denis, une proche de Tibéri, est parachutée au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, saluée par un « à droite toute » de L’Humanité (11 mars).

2. PRESSE ECRITE / EDITION

 Editis. La finance lorgne sur « la totalité d’Editis ». En effet, Alain Aubry qui « préside » une société de capital risque (LBO) et le Club Français du Livre, semble intéressé par certains actifs (Les Echos, 3 mars).

 Agence de presse. « Reuters face à une révolution culturelle » : un entretien dans lequel Tom Glocer, patron de l’agence de presse, justifie la réduction drastique des effectifs de l’entreprise (Le Figaro Economie, 23 février).

 Presse magazine généraliste. « Hausse de l’audience  » de 0,7 % en 2003 selon AEPM (Audience et Etudes de Presse Magazine). Version Femina, Télé Magazine et Entrevue sont en tête de gondole des plus fortes (hausses), et la sempiternelle presse télé parmi les plus de 7 millions de lecteurs (TV Magazine en a 14,1) (Le Monde du 3 mars).

  Presse magazine télé. Où en sera l’année prochaine ce secteur de la presse télé qui s’affole depuis que « Prisma Presse [le] chamboule [...] en France avec son bimensuel » ? ( La Tribune, 2 mars). La Croix s’interroge aussi (décidément) sur le phénomène et se met le 8 mars « à la recherche du bon tempo ».

 Presse magazine cinéma. Le groupe belge Roularta rachète à Canal Plus, UGC (qui, lui, rachète Noos, cf. plus haut) et Emap le magazine Studio, pour 5 millions d’euros (Le Figaro Economie, 11 mars)

 Presse féminine, presse people. On peut s’amuser à lire, du groupe HFM (Lagardère), « France Dimanche fête 3000 numéros de drames de stars », un article du Monde très railleur sur cette presse pas si inoffensive que cela tirant à 500 000 exemplaires.

 Le Monde-La Vie. Le 23 février « Un comité d’entreprise extraordinaire [a été] convoqué [pour] entériner la prise de contrôle à 100 % de Presse informatique par la Financière Fabrice Larue. [Presse informatique] gère 70 % des abonnements de la presse française, Canal Plus et Canal Satellite [...] était auparavant propriété de Publications de la Vie catholique (PVC), avant la fusion absorption de ce groupe avec Le Monde. La valorisation du pôle cédé s’établit entre 30 et 35 millions d’euros » (L’Humanité, 23 février).
Le Monde « refinance l’achat de PVC » traduit Les Echos, 26 février (lire Le personnel des PVC s’oppose au dépeçage par Le Monde et notre rubrique).

 Presse féminine. 8 mars, journée de la femme, a vu le nouveau lancement (très médiatisé [1]) de Côté Femme par le groupe Bayard. Glamour (Condé Nast) est annoncé pour le 18. D’autres projets sont annoncés par Axel Springer, Hachette et Prisma Presse.

Sur la presse féminine, Le Monde (9 mars) titre un article d’information a-critique : « La presse féminine se relooke pour séduire ses lectrices ». L’Humanité Hebdo (6 mars), plus acéré, rappelle que les femmes sont largement absentes de l’information en France (« l’information s’écrit au masculin ») puis s’intéresse aux dessous : « quels sont les ressorts de la presse féminine ? » et au dessus du panier de la ménagère « les nouveaux magazines féminins, piliers de la consommation ? » (lire nos rubriques La presse féminine et Sexisme et journalisme).

 Fausse presse magazine. Déjà signalé ici : Leroy-Merlin, « en faisant distribuer Du côté de chez vous sous le nouveau nom de Maisons de vie par les NMPP, est la première enseigne à mettre un pied dans les kiosques » (CB News, 9 février). 5 mars 2004 : « Du magasin au magazine - Go sport lance son bimestriel, Be sport go happy » un article de L’Humanité qui permet de faire un point sur le phénomène « pernicieux ». Dans un dossier d’alerte, Stratégies (11 mars) trouve le terme juste pour désigner ce nouveau phénomène : une « presse Canada Dry ». Lire : « Les marques s’attaquent au kiosque ».

 Presse magazine. Divers.
Tribune Juive est rachetée par Pierre Besnainou qui vient de la bulle (Internet), Ivan Levaï en sera le directeur (France-Soir, 9 mars).
Un sujet d’actualité (le Salon de l’agriculture) justifie cet article : « la presse agricole tente de contenir l’érosion de son lectorat  » (Le Monde, 4 mars). Il y avait aussi le salon du Meuble et donc ce sujet sur la presse magazine décoration : « Un engouement qui s’essouffle » (CB News, 8 mars). Il faut les remplir les pages médias. Enfin, ce projet qui fleure bon l’annonceur : Serious, lancé par le directeur d’Entrevue (mais sans Hachette, sa maison mère), qui s’adressera aux baby boomers, et qui traitera du phénomène du " culte " (les marques cultes, la mode culte ou encore les personnalités cultes...). Pierre Lescure, ancien président de Canal Plus (et collaborateur du Monde 2), sera présent dans le capital (Newsletter de Stratégies, 12 mars).

 Presse quotidienne, nationale et régionale.
Les Echos, du groupe britannique Pearson, a dégagé un bénéfice net de 6 millions d’euros « en dépit de la crise et de lors investissements (sa nouvelle formule) » (2 mars).
La Montagne, Le Berry Républicain, Le Populaire du Centre... publications du groupe Centre France qui essaiment sur 9 départements, sont en voie d’unification esthétique : maquette, logos, etc. (Les Echos, 10 mars).

 Presse quotidienne gratuite. Après Lille Plus, la Socpresse (Le Figaro, Le Progrès) a lancé le 15 mars Lyon Plus , tiré à 80 000 exemplaires, distribué par colportage aux sorties du métro et des gares ainsi qu’à proximité des universités (« un titre adapté à la génération Internet et zapping » - La Tribune, 8 mars).. La cité en aura trois (Libération, 25 février). Cette concurrence acharnée ou « la folle surenchère » (L’Expansion, mars) qui peut paraître un non sens doit se comprendre par la logique industrielle du regroupement des régies publicitaires qui «  divise les coûts  », Challenges (4 mars) et aspirent le fric (« mutualiser les moyens ou synergies publicitaires  » - Les Echos, 5 mars).

De fait, la presse (payante) en parle encore mais de manière de plus en plus prudente : « Distiller auprès du grand public l’idée que l’information est gratuite me paraît dangereux. Mais nous ne pouvions rester sans réaction » selon André Soleau, directeur général de La Voix du Nord ( La Croix, 29 février : « La bataille des journaux gratuits  »).

Côté tuyauterie : le norvégien Schibsted porte de 41 % à 98 % sa part dans le holding de 20 minutes (Les Echos, 4 mars). En France, cela donne de 34 à 50 %, tandis que Metro « vient de signer un accord de partenariat avec le groupe de restauration et des services aux collectivités Sodexho afin de mettre en place le quotidien, via des présentoirs prévus à cet effet, dans les principaux restaurants d’entreprises de la région parisienne. » (tarifmedia.com, 10 mars). Il y a de l’enjeu, décidément...

3. TOUS MEDIAS : VIVE LE MARCHE !

 Lagardère. D’abord ce portrait enamouré des Echos (12 mars) : « Lagardère, an II » dans lequel on lit ce propos d’un cadre de l’empire : « En une semaine [après le décès de son père] il était devenu le chef ». Mais aussi une interview dans L’Express du 8 mars sur la stratégie de « l’héritier », qui évoque, ce n’est pas un détail, feu son père par son prénom (« Jean-Luc »). Il y a quelques semaines, Arnaud annonçait son intention de recentrer son groupe sur les médias, il a changé d’avis : « nous ne sortirons jamais d’EADS avant que [son] succès soit accompli  », mais ses ambitions sur les médias restent intactes : « un, la télévision, deux, l’écrit  ». Il milite notamment pour une fusion à terme de CanalSatellite (il détient 34 %) et TPS. Concernant Editis : « J’ai un regard très négatif sur les procédures qui finissent par brider le développement des groupes européens quand, dans le même temps, les entreprises américaines, elles, peuvent se développer à toute allure. »

 Dassault et Socpresse. C’est plié : Dassault (Valeurs actuelles, Le Spectacle du monde, Le Journal des finances, Le Républicain - Essonne -, Toutes les nouvelles - Versailles -, La Gazette du Val-d’Oise), l’autre marchand d’armes qui aime le papier, rachète comme attendu les joyaux de l’empire Hersant (Le Figaro, La Voix du Nord, Le Progrès, Paris-Turf, L’Express, L’Expansion...), deuxième groupe de presse français. Aucune réaction du côté des contestataires de l’ordre libéral, qui ne s’inquiètent guère des ambitions pédagogiques de l’avionneur Dassault sur les médias (lire « Serge Dassault réoriente la presse » dans L’actualité des médias n°14), et on connaît aussi celle du Figaro... (lire Dassault s’empare de l’empire Hersant : premières réactions).

  Pub de la presse à la télé. Les groupes donnent moins : « 4 millions d’euros seulement ont été investis du 1er au 20 février, contre près de 10 millions pour le seul mois de janvier ». Mieux : CB News ajoute que « la majorité des éditeurs ont boudé le service public et orienté leurs plans médias sur TF1 et M6 », des chaînes plus giboyeuses en termes de cibles pour le type d’annonceurs (presse magazine de type masculins-feminins, tv, tiercé).

  Publicité, encore. Nouveau produit d’allèchement publicitaire : Prisma Presse vient d’inaugurer une nouvelle procédure de l’OJD : la Déclaration sur l’Honneur de Lancement (DSHL) pour Télé 2 Semaines (Prisma). Le Monde 2 devrait embrayer. Le communiqué de presse relayé par tarifmedia.com indique : « cette démarche est ouverte à tout nouveau titre inscrit à l’OJD, quelle que soit sa périodicité, qui souhaite s’engager en particulier vis-à-vis du marché publicitaire sur des chiffres garantis ».

  Publicité en tribune libre. A noter, concernant « ce paysage » de la publicité dont « les médias, vivent en partie » [2] que Libération, le 10 mars, offre son plus bel espace de son Rebonds à un « publicitaire ». C’est un peu court comme présentation surtout quand Stéphane Fouks (c’est de lui dont il s’agit) appelle au « parler vrai des entreprises », et n’est pas vraiment présenté. Il est, en effet, dans le peloton des têtes dirigeantes d’Euro RSCG (groupe Havas, sixième mondial, qui - ô pauvre ! - a « souffert d’une année ’’terrible’’), de surcroît ex-conseiller de Jospin, d’Alain Bauer, et dauphin de Séguéla.
Stéphane Fouks, dans ce qu’il nomme « L’ère du doute » n’apprend rien d’autre dans son enrobage, sur l’état du monde et des idées, que celles publiées par Maurice Levy (patron de Publicis) le 18 février, dans la section Analyses et forums du Monde : entreprises communiquez et faites de la publicité (donnez-nous de la thune).

 Marketing ethnique. « La publicité ne montre pas assez de Beurs ou de Blacks. A l’image des difficultés d’intégration de ces populations dans la société, il y a une difficulté d’intégration dans le discours publicitaire », dit le PDG de l’agence publicitaire CLM/BBDO (« Le pluriethnisme reste peu présent dans la publicité en France » - Le Monde, 23 février).

A propos du terme de « beur ». C’est " un vocable qui ne veut rien dire et qui participe d’une dépersonnalisation totale des individus ", dit Mustapha Saadi, le patron de Berbère Télévision, qui « après cinq années d’existence, veut séduire un public plus large  » (idem).

Lire aussi « ’’Minorités visibles’’ : la fracture médiatique » par la sociologue Monique Dagnaud (Le Figaro Economie, 23 février) : « Une analyse des politiques de l’image montre que la France est davantage favorable à un accueil d’œuvres cinématographiques étrangères spécifiées par leur identité culturelle qu’à l’hybridation des cultures au sein des grands médias de masse. »

 Mœurs médiatiques et laboratoires pharmaceutiques. « Une revue médicale britannique, The Lancet, a laissé publier en 1998 une étude qui associait le vaccin contre la rougeole à un risque de développement de l’autisme chez les enfants vaccinés. Or l’auteur principal avait des liens financiers occultes avec une fondation de parents d’enfants autistes et leurs avocats. » (Le Figaro, 5 mars « Autisme et vaccin : une étude sous influence  »). Qui vole un œuf...

 Télévision et marketing Sur la société du spectacle et du marketing, lire à propos des cérémonies (Sept d’Or, Césars, Victoires de la musique, etc.) : « Quand le show-biz s’autobise » (Libération, 2 mars). Lire aussi, par le collectif Les pieds dans le Paf : « L’antenne confisquée » (France-Soir, 2 mars). Et « La chasse aux anonymes » (dossier sur les témoins des émissions) Le Monde Télévision (6 mars).

 Les jeunes et les médias. Le Monde (3 mars) rapporte que les jeunes « apprécient la lecture » à 72 % selon l’étude annuelle de TNS Media Intelligence et « la presse qui décrypte l’actualité » (sic). Ce qui tombe bien car pour nos « 15-25 », des entreprises (dont GDF, La Mondiale) et 11 quotidiens dont Sud- Ouest s’unissent dans le cadre de la semaine de la presse et des médias dite « assises de la presse écrite et de la jeunesse » à Bordeaux. Des conférences thématiques ont eu lieu. A titre d’exemple, sur la section médias, le débat est animé par André Bercoff, notre déontologue de France-Soir (voir plus haut), celui de l’économie par Nicolas Beytout des Echos et l’international par Jean-marie Colombani (du Monde). Les voilà bien cornaqués nos minots.

Mais notre gouvernement ne veut pas rester comme deux ronds de flanc face à ces intentions, l’AFP du 10 mars propageant que « L’Education nationale vient de se doter d’un outil permettant aux enseignants d’apprendre à leurs élèves à "lire" intelligemment (sic) la télé ».

 Les « quinquas » et les médias. TNS s’est occupé de notre jeunesse, Médiamétrie s’est jeté sur les seniors. Si les résultats intéressent se rapporter à la brève de Stratégies (4 mars).

4. A LIRE

 Edition. A lire. Pierre Lepape (« La dictature de la ’’world litterature’’ », Le Monde Diplomatique, mars 2004) résume tous les enjeux stratégiques (données économiques, Editis, rachat du Seuil par La Martinière) et la tentation des « méthodes commerciales des grands éditeurs américains ».

 Télévision. A paraître. L’Audimat à mort d’Hélène Risser (Seuil), chroniqué dans Le Canard Enchaîné (3 mars), à propos des chaînes sous la « férule du pouvoir politique » et des diktats (« emprise ») économiques. Extrait : « Pourquoi les confrères de Capital se voient-ils soudain chargés d’un reportage à la gloire de Shanghai par le directeur de l’info ? Parce que la Lyonnaise des eaux, alors gros actionnaires de M6, guigne le marché de l’eau de la ville ».

 Télévision. A lire. Du côté du public - Usages et réceptions de la télévision (Paris, Economica). Un ouvrage qui offre l’occasion à l’inévitable Philippe Corcuff, sous le titre « Les téléspectateurs sont-ils tous des cons ? », de poursuivre son activité de ...purificateur de la critique des médias (Charlie Hebdo 10 mars). Extrait : « Plutôt que le grand air de "la propagande" entonné martialement par Noam Chomsky ou Serge Halimi, écoutons les mélancoliques inquiétudes d’Alain Souchon quant aux dissonances entre émetteurs et récepteurs : "On nous prend, faut pas déconner, dès qu’on est né / Pour des cons alors qu’on est / Des / Foules sentimentales / Avec soif d’idéal...." ». Edifiant ! (voir notre rubrique).

5. ET ENCORE

 Appel contre la guerre à l’intelligence. Le Nouvel Observateur (4 mars) ne pouvait plus tenir face aux Inrocks. Lui aussi a donc apporté sa pierre dans cette croisade, clanique et élitiste contre le gouvernement et sa « guerre à l’intelligence ». L’hebdo aux Unes sensationnelles (journalistes, privilégiés, etc.) se paie « cette caste qui tient la France », en promouvant un livre qu’il décrète « choc » et « fait trembler l’establishment (un mot qu’emploie Le Pen, NDR) ». Qui sont ces « intouchables » ? Les « super-enarques ». L’auteur du livre est la journaliste Guislaine Ottenheimer, que Stéphane Paoli de France-Inter interviewait ce 4 mars, après Sylvain Bourmeau des Inrockuptibles lors de son coup médiatique.

 Sémantique et chômage. Il n’y a plus de pertes d’emplois sur les ondes et ailleurs mais des destructions. Pourquoi ? Cf. « Chroniques d’un autre monde », de Jacques Généreux, chroniqué dans « les mots pour détruire » par Télérama (10 mars).

 Graves questions. AZF et terrorisme. Fallait-il en parler ou pas ? Ça phosphore dans nos rédactions sur la sacro-sainte déontologie du journaliste, et surtout à La Croix. Qui, le 8 mars, titre : « Tout dire, ne pas tout dire ». Et le 10 mars : « L’accès à la vérité du citoyen ». Tandis qu’ailleurs, sur d’autres sujets, les œillères sont gigantesques : « La chancellerie ouvre une enquête sur les conditions de l’interview de Carlos sur M6 » (Le Monde, 11 mars) ; « Les propos de Carlos échappent à la censure » (Le Parisien, 11 mars). Ou : « Dutroux, informer sans choquer » (Le Figaro, 11 mars). Et même « Saumon : désintoxiquer l’info » (L’Humanité, 12 mars).

 France-Soir. Chaque jour, des raisons de se crisper en lisant la prose égotique et déférente (envers le Très-Haut élyséen et sa curie) de Paul Wermus. Exemple, sur le socialiste Forni, « tête de liste aux régionales dans le Jura » accidenté et dans le plâtre : « N’en déduisons pas que les socialistes sont une bande de bras cassés » (9 mars).

Le Canard Enchaîné a sévèrement étrillé le quotidien qui a plagié récemment (3 mars) un article du Monde. Le thème ? Le péril islamique. Original... La Une ? « Mosquée sous influence ». Une question : sans ce lièvre déterré par Le Canard Enchaîné, France-Soir aurait-il réagi même piteusement dans ses propres colonnes ? Cf. « France-Soir victime de plagiaires - A nos lecteurs  », par André Bercoff, suivi de : « Les journalistes choqués et en colère » par « les journalistes de France-Soir » (9 mars). Le 10 mars : pudeur du Monde (un entrefilet), et discrétion dans Libération (une brève). Est-ce vraiment s’acharner que de relever par exemple ce titre d’un parfait mauvais goût : « Nougamort » (France-Soir, 5 mars) ? C’est peut-être du système France-Soir dans son ensemble que les journalistes devraient être « choqués »...

 
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Notes

[1Avec 10 millions de budget publicitaire et relations presse, cette surmédiatisation se comprend.

[2En attendant la reprise, «  les géants de la publicité font le dos rond » (Le Monde, 11 mars).

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