Le 19 mai, Le Berry républicain exhale un « parfum de liberté », tandis qu’un « souffle d’espoir » s’engouffre dans L’Alsace. « Le grand jour » se lève au Télégramme, « Le jour J » illumine Nord Éclair, et La Voix du Nord fait « les premiers pas vers la vie d’avant ». « C’est (re)parti ! » au Bien public, « Ça s’arrose ! » au Courrier picard, et La Dépêche trinque même « À notre santé ». « On se retrouve dehors », propose Sud-Ouest… et « Bas les masques », suggère Var-Matin. Bref, La Provence, et la France médiatique avec elle, exulte : « Enfin ! »
Enfin le retour à la normale ! Les reporters d’images font le pied de grue devant les centres commerciaux, les télés usinent du micro-trottoir sous les stores bannes et le choeur des éditorialistes entonne le « tenir ensemble » jupitérien. Sans oublier cette entrevue caféinée entre le Président et son Premier ministre, multi-médiatisée, et dont BFM-TV a initié la propagande au gré d’une « priorité au direct » qui restera dans les annales : « [Devinez] qui est en train de boire un café en terrasse ? Mais c’est Emmanuel Macron avec Jean Castex ! Les voici tous les deux attablés autour d’un café. » Tant il est vrai que l’« actualité » des rédactions parisiennes gravite autour de l’Élysée, jusqu’à l’absurde (p. 11).
Pendant ce temps, à l’ombre des gros titres, la crise sociale et économique s’aggrave. Lesdits « plans de sauvegarde » menacent plus de 100 000 emplois, les licenciements se comptent par milliers tandis que s’accroissent les inégalités, contraignant plusieurs millions de personnes supplémentaires à l’aide alimentaire et au RSA. Mais les médias n’ont d’yeux que pour le martyre de celui qui a « failli crever » : Manuel Valls (p. 3).
Une complaisance qui n’a d’égale que l’hostilité des mêmes stars de l’info vis-à-vis de l’opposition de gauche, et de la France insoumise en particulier (p. 27). Questionnée sans relâche sur la tambouille politicienne le matin, condamnée pour « islamo-gauchisme » à midi, exécutée par sondages interposés l’après-midi, on la somme le soir d’expliquer pourquoi les idées de gauche disparaissent du débat public…
Il y a quelque chose de pourri au royaume médiatique. En artisans du grand récit de l’insécurité, les grands médias s’intoxiquent à leurs sources policières, au mépris des faits et des règles les plus élémentaires (p. 31). Les faits divers se succèdent à la Une, au point que des campagnes éditoriales locales – comme une couverture « anti-squat » de La Dépêche – polarisent l’agenda de rédactions nationales (p. 35). Un débat public à front renversé, où militants antiracistes et gauche radicale sont devenus les ennemis publics n° 1, tandis que se succèdent des cabales identitaires, menées par des professionnels de la parole qui fulminent contre les grandes « censures » des temps modernes, reçus sur les plus grandes chaînes en toute impunité (p. 41).
Concomitamment, la concentration des médias capitalistiques se renforce avec la bénédiction des pouvoirs publics. Martin Bouygues et Vincent Bolloré accaparent le gâteau télévisuel, et le second impose à coups de marteau aux rédactions ses vedettes prosélytes et ses journalistes inquisiteurs, Éric Zemmour et Sonia Mabrouk en tête (p. 7). Si quelques contestations se sont fait entendre à propos du rachat d’Europe 1, les chefferies médiatiques, par lâcheté, indifférence ou suivisme, regardent passer les trains. Et préfèrent s’auto-investir de missions quasi civilisatrices, visant à (ré)éduquer des populations qui auraient tendance à se méfier des médias institutionnels (p. 15).
Face à la normalisation de l’anormal, et face à l’élection présidentielle qui s’annonce, notre association compte bien garder le cap… et faire front. Précisément pour que les partis progressistes de gauche s’emparent de la question des médias, et apportent au champ de l’information les perspectives politiques d’une transformation radicale.
Et surtout... abonnez-vous !
Ce numéro ne sera pas plus diffusé en kiosques que les précédents. Vous pourrez cependant le trouver dans quelques rares – mais d’autant plus précieuses – librairies listées plus bas, ainsi que sur notre boutique en ligne.
Et surtout, abonnez-vous ! Pour cela, rendez-vous sur notre boutique en ligne, ou remplissez le bulletin en pdf et renvoyez-nous le avec un chèque. Vous pouvez également nous soutenir en adhérant à l’association ou en faisant un don.
Vous pouvez trouver Médiacritiques en vente dans les librairies suivantes :
07 (Ardèche)
Librairie La Belle Hoursette
2 rue Droite 07140 Les Vans
21 (Côte d’Or)
Librairie La fleur qui pousse à l’intérieur
5 place des Cordeliers 21000 Dijon
29 (Finistère)
La petite librairie
4 bis rue Danton 29200 Brest
31 (Haute-Garonne)
Terra Nova
18 rue Gambetta 31000 Toulouse
Librairie Floury Frères
36 rue de la Colombette 31000 Toulouse
33 (Gironde)
Librairie Mollat
89 rue Porte Dijeaux 33080 Bordeaux Cedex
35 (Ille-et-Vilaine)
Librairie L’établi des mots
51 avenue des Pays-Bas 35200 Rennes
44 (Loire-Atlantique)
Librairie Vent d’Ouest
5 place du bon pasteur 44000 Nantes
46 (Lot)
Libraithèque
68 rue Louise Michel 46000 Cahors
Librairie Champollion
16 place Carnot 46100 Figeac
49 (Maine et Loire)
Les Nuits Bleues
21 rue Maille 49100 Angers
69 (Rhône)
Le Bal des Ardents
17 rue Neuve 69001 Lyon
La Gryffe
5 rue Sébastien-Gryfe 69007 Lyon
Terre des Livres
86 rue de Marseille 69007 Lyon
75 (Paris)
Le Point du Jour
58 rue Gay-Lussac 75005 Paris
L’Harmattan – Sciences humaines
21 B rue des Ecoles 75005 Paris
La Plume vagabonde
32 rue de Lancry 75010 Paris
L’invit à lire
12 rue du Château Landon 75010 Paris
La Friche
36 rue Léon-Frot 75011 Paris
Publico
145 rue Amelot 75011 Paris
Quilombo
23 rue Voltaire 75011 Paris
La Manoeuvre
58 rue de la Roquette 75011 Paris
La Brèche
27 rue Taine 75012 Paris
Le Monte en l’Air
2 rue de la Mare 75020 Paris
92 (Hauts-de-Seine)
Librairie El Ghorba mon amour
148-152 Boulevard des Provinces Françaises 92000 Nanterre
Librairie Nouvelle
57 grande rue Charles de Gaulle 92600 Asnières
93 (Seine-Saint-Denis)
Librairie Libertalia
12 rue Marcelin Berthelot 93100 Montreuil
Folies d’encre
14 place du Caquet 93200 Saint-Denis
94 (Val-de-Marne)
Librairie L’établi
8 rue Jules Cuillerier 94140 Alfortville
Librairie Envie de lire
16 rue Gabriel Péri 94200 Ivry-sur-Seine
Suisse
Librairie Basta !
L’Anthropole 1015 Dorigny
Les 32 premiers Médiacritiques sont en accès libre sur notre site. Les n°33, 34, 35 et 36 aussi ! La plupart d’entre eux peuvent encore être commandés au format papier.