Opérations policières médiatisées et risques de dérives multiples (SNJ, 4 octobre 2006)
Deux opérations policières, à quelques jours d’intervalle, ont fait l’objet d’une médiatisation à outrance. Dans les deux cas, les journalistes ont été invités, voire convoqués, à être les témoins « privilégiés » d’un déploiement de forces « à la Sarkozy ». De bien belles images, dignes de figurer dans les soirées policières de France 2 le vendredi.
L’information y trouve-t-elle son compte ? Les vérifications des faits (présentés par la seule partie policière) sont-elles possibles ? Quel temps pour la compréhension, quel recul sur cette actualité, quels éléments d’explication, quel suivi des faits ?
Les Tarterets : plusieurs sujets « choc » insistant sur le guet-apens tendu aux CRS, puis l’interview, en très gros plan, de la victime sur son lit de souffrances. Ce mardi le Procureur de la République, rappelant que « certains étaient partis tambour battant sur la thèse de la préméditation », explique : « les descriptions des faits font plutôt pencher pour une agression plus ou moins spontanée ». Cette information sortie dans Le Monde a fait l’objet d’un simple off au JT de 20h00...
Les Mureaux : deux jours après une altercation entre des policiers et certains habitants, fallait-il montrer que « la police entre dans les cités » même si c’est principalement pour les caméras ? Nous avons fait le choix de prendre le temps de l’enquête et fourni un vrai travail de journaliste. Sachons préserver ce discernement.
Nous ne sommes pas les seuls à nous interroger : certains policiers, parmi les plus sérieux, contestent cette médiatisation qui annihile l’effet de surprise nécessaire à un vrai travail et « crée des tensions inutiles ».
L’élection présidentielle de 2002 a démontré les dangers de cette « sécurité-spectacle ». Les principaux responsables des médias ne semblent pas toujours s’en souvenir.
Le SNJ appelle les journalistes à se méfier de toutes ces tentatives de manipulation et à rejeter cette communication ultra sécuritaire qui ne profite qu’à ceux qui la mettent en œuvre.
Paris, ce 4 octobre 2006
Le syndrome du 21 Avril (Snj-CGT et Snrt-CGT, 25 septembre 2006)
Depuis quelques jours, Nicolas Sarkozy a repris la main sur l’actualité : pas moins de quatre reportages et analyses dans chacun de nos journaux, avec la phrase du jour du ministre, les réactions, et la polémique qui enfle chaque jour un peu plus. C’est l’actualité, il la fait, nous reportons.
Mais un reportage diffusé dans le Soir 3 du 21 Septembre dernier nous étonne.
Rappel des faits : l’un des deux policiers blessés lors d’un contrôle d’identité dans l’Essonne est autorisé à raconter son histoire à la télévision. Le reporter précise que le Ministère de l’Intérieur est à l’origine de cette interview. Ce que le commentaire ne précise pas, c’est que nous n’avons pas non plus filmé cet entretien : il s’agissait d’un pool.
Non seulement la décision du reportage nous échappe, mais son contenu aussi...
De l’interview de ce capitaine de CRS, nous retenons que « le citoyen qu’il est (que nous sommes aussi) est révolté par cette haine, ce déchaînement gratuit de violence. » Nous, ce que nous retenons, c’est surtout ce visage tuméfié filmé plein cadre. Comment ne pas être révolté ?
Diffuser ou ne pas diffuser ?
Le SNJ-CGT de la Rédaction Nationale et ses élus appellent les journalistes et les rédacteurs en chef à s’interroger sur leurs pratiques plus que jamais.
Notre rôle est de donner un sens à ce qui se passe. Non d’être dans l’émotion pure.
Dans quelques mois, 2007 et ses échéances... Le 21 Avril est là, tout près.
25 septembre 2006