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Les médias et le Forum social européen

Nice-Matin diffuse des tracts régionaux et propage la peur

par William Salama,

Des 23 octobre au 9 novembre, "Nice-Matin" a consacré 11 articles au Forum quand le "Télégramme de Brest" publiait deux malheureuses brèves (8 et 10 novembre). Score écrasant qui, a priori, et du fait de son envoyé spécial (Georges Bertolino) laissait présager un suivi et une couverture sinon passionnés, du moins fidèles de la part du régional de l’étape.

Las… le quotidien ne se donnera pas la peine de relater la manifestation pacifique, et partant, de dresser le moindre bilan.

L’avant sommet

Chacun a droit à son tract : 3 articles (datés respectivement du 26 et 31 octobre, et du 6 novembre) annoncent la participation au Forum d’organisations " antiracistes " telles qu’Ave Basta, A Manca Nazionale et Corsica Nazione. C’est par ailleurs une manière de rappeler que " la Corse a toute sa place dans ce combat contre l’uniformisation du paysage humain qui tend à broyer les peuples, leur culture,… ". Bien. Dommage que ce lyrisme qui précise l’essence du Forum ne soit disponible que dans l’édition … corse. On est jamais mieux servi que par soi-même.

A contrario, Nice-Matin ne manque pas d’informer - dans toutes ses éditions - que " les italiens rétablissent les contrôles à la frontière " : le 23 octobre en brève et, deuxième couche, le 4 novembre sous forme d’article. Où l’on apprend que ce dispositif est instauré dans le but de " décourager les manifestants […] automobilistes désireux d’entrer en Italie, voyageurs suspects", et qu’ il a surtout l’inconvénient de " partager les usagés " (prétexte à une moitié de l’article).
Une question pointe : les carabiniers vont-ils contrôler Corsica Nazione ?

Le sommet

7 novembre. A la lecture de " Florence au rythme des antimondialistes ", papier couvrant l’ouverture du Forum, voici ce qu’il ressort : que les 20 000 personnes attendues sont " contestataires " (deux citations), que Florence est plongée le " souvenir des violences de Gênes " (deux citations), que c’est une " ville d’art " qui pendant le Forum n’en reste pas moins " culturelle ", lequel Forum est sous " haute-surveillance " policière (3 citations), que les " McDo sont camouflés ", qu’un dispositif policier de 6000 agents " quadrille " la ville.
Heureusement, tout n’est pas noir dans ce monde psychotique : " certains commerçants ont choisi le camp des antimondialisation ". Il faut attendre l’avant-dernier paragraphe pour découvrir ce que " se veut " (sic) le Forum. Ultimes bonnes nouvelles, de " nombreux spectacles sont annoncés ", et l’article signale en chute : que " les manifestants ont finalement pu franchir la frontière franco-italienne ". Mais toujours pas de nouvelles de Corsica Nazione.

Or, il semble que Florence, n’ait pas le monopole de la psychose sécuritaire… Nice-Matin, le même jour (7 novembre) ne manque pas de consacrer un article au moins aussi long plus une brève, pour rassurer ses lecteurs plongés dans l’angoisse : " Menton : Vaste mobilisation policière en ville pour le forum social de Florence". Nous voilà sauvés…

Retour en Italie le 8 novembre. Après avoir expédié les affaires courantes (" le mouvement antimondialiste planche sur une nouvelle stratégie " - heureux de l’apprendre), Georges Bertolino, pour les lecteurs qui n’auraient pas compris que Florence était sous " haute surveillance ", entre dans les détails. " L’ombre de Gênes plane sur Florence " est un papier d’atmosphère chargée qui pointe les " 250 objectifs à risques ", consignes, plongeurs, tout en dressant le portrait du chef de la brigade policière anti-black bloc… On n’est pas là pour rigoler même s’il ne se passe rien.

Dans l’article, un petit paragraphe résiste pour nous apprendre vaguement que " dans la Fortezza da Basso […] on remarque beaucoup de jeunes témoignant de leur intérêt pour ce qui se veut un laboratoire d’idée et d’action ".

Pour les lecteurs qui sont plus People : un encadré sur Bové et les politiques présents mais sans raillerie.

Tiens tiens … Le samedi 9 novembre, une brève s’attarde sur les délégations étrangères et notamment françaises ("trois mille Français dont Danielle Mitterand ") en citant, comme à la parade, Attac, Alain Krivine, la Ligue des droits de l’Homme et tutti quanti.

Sur la même page, l’article est tout aussi encourageant. Comme il a épuisé l’arsenal des adjectifs et épithètes sécuritaires, Georges Bertolino, équilibre plus son papier en s’intéressant aux débats dans " Social Forum de Forence : pour une autre Europe ". Pourtant, la nature reprend vite ses droits : en vue de la manifestation pacifique du lendemain, " la peur ", " les menaces ", " la nébuleuse No Global " contamine les bonnes intentions (peut-être tardives) de Nice-Matin pour qui d’ailleurs le Forum s’arrête à cette date.

Sans incidents à déclarer, la bonne grosse peur s’est dégonflée comme une baudruche.

 
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