« Rocard propose de payer les profs au mérite » affiche brutalement en « une » Le Figaro du 31 janvier 2008. Sous-titre ? « L’argument figure dans le rapport qui sera remis au gouvernement lundi. »
Puis page 9 de ce même numéro, le journal titre – au conditionnel, s’il vous plait - : « Les profs pourraient être rémunérés au mérite ». Le Figaro parle d’un « nouveau système de rémunération », et minimisant le titre de « une », précise que « se profile une ébauche de rémunération au mérite. »
Dans l’interview de Michel Rocard, les questions posées tentent de faire dire à l’ancien Premier ministre ce que le quotidien a envie de titrer : « Faut-il augmenter le temps de travail des enseignants ? » « Faut-il envisager une rémunération au mérite ? » « Y-a-t-il urgence à réformer le système scolaire français ? »
Des questions comme nous les aimons : des slogans interrogatifs. Un jour peut-être Aude Sérès, l’intervieweuse de Rocard sera-t-elle interrogée à son tour : « Faut-il augmenter le temps de travail des journalistes ? » « Faut-il envisager une rémunération au mérite (des journalistes) ? » « Y-a-t-il urgence à réformer les médias français ? »
« Faut-il envisager une rémunération au mérite ? » Rocard répond : « je veux être clair : nous n’évoquons pas directement dans notre rapport une rémunération au mérite. » Qu’importe ! La « une » du Figaro reste : « Rocard propose de payer les profs au mérite ».
Mathias Reymond
NB : Quelques heures après la parution du journal, Michel Rocard annonce sa démission de la commission… alors qu’elle a terminé ses travaux. Réfrénons l’envie de commenter… L’ancien premier ministre s’explique dans Libération, qui, corporatisme oblige, ne commente pas l’attitude de son confrère : « Je suis l’objet d’une agression de la part du Figaro, qui me met en cause de façon mensongère. Nous n’avons jamais posé ce problème de la rémunération au mérite, et je ne l’ai personnellement jamais envisagée. » (1 février 2008)