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L’actualité des médias n°25 (28 avril au 10 mai 04)

par William Salama,

Lire aussi : L’actualité des médias n°24 et les éditions précédentes.

I. Audiovisuel

  TNT. Arlésienne et guerre de tranchées, suite... Marc Tessier se croit en position de force pour lancer : « Que ceux qui ne croient en la TNT se retirent  » [1] (interview dans La Tribune, 29 avril). Le Lay, qui est en position de force (voir plus bas : les parts d’audience), répond, au même endroit, le 3 mai : « On va lancer la TNT avec une norme obsolète  ». La Tribune semble avoir choisi l’option défendue par le président de TF1 en prévoyant une « bataille industrielle sur la TV haute définition » (le format Mpeg-4 qui permettra de regarder la télé et ses pubs) n’importe où et notamment sur son portable. Résultats : le CSA décide de temporiser jusqu’au 26 mai (« Annonce de lancement retardée » - La Tribune, 10 mai) et Les Echos (même jour) commentent sobrement « TNT : débats d’idée ». Rappelons, pour faire avancer le « débat d’idée », que Thomson est sur les rangs dans ce lobbying et tentait de se rapprocher de TF1 récemment (L’actualité des médias n°23).

 Câble-Satellite-ADSL. Une nuée de fonds d’investissements - une douzaine, dont Carlyle et Axa Private Equity - sont intéressés par le câble de France Telecom et par Canal Plus (Les Echos, 29 avril). Canal Plus confirme son intention de contrôler un réseau de distribution d’avenir en rachetant Moviesystem qui vend de la vidéo sur le Net et à la demande (La Tribune, 4 mai).

 Chaînes hertziennes. Quelques informations :
- Parts d’audience 2003-2004. Grâce à ses programmes ("La Ferme", le foot) TF1 a enregistré des records d’audience en avril (32,5 %), tandis que les parts des chaînes publiques chutent (de 12,8 à 12,5 % - La Tribune, 6 mai).
- Sport et publicité. « Les coupes européennes de football font exploser les tarifs publicitaires » (des spots à 84 000 euros pendant les pauses), relève Le Monde (6 mai).
- Chaînes thématique et publicité. Les chaînes thématiques, faute d’audience, enregistrent une chute des recettes publicitaires. Ce qui les pousse à brader leurs espaces. Mais, selon Stratégies, compte tenu de la « spécificité qualitative des abonnés » (merci pour les autres qui se fadent les chaînes hertziennes), elle ne devraient pas le faire. D’où ce conseil : « Mollo sur les négos  » (29 avril).

 Cavada. Petit florilège sur l’ex-Pdg de Radio France : « Aucun gouvernement ne lui a fait de sérieuses misères. Peut-être parce qu’il n’en a contrarié aucun » (Le Canard Enchaîné, 5 mai) ; « La plupart des conflits sociaux du service public ont été résolus pendant les cinq années de règne de Jean-Marie Cavada » (Le Figaro Economie, 29 avril) ; « C’est une forme de record dont il se serait bien passé [...] un conflit salarial de dix-huit jours  » (La Croix, 29 avril). Mais les journalistes de Radio France ne désarment pas (lire "Cavada : lourd héritage" (SNJ Radio France)) : ils ont fait savoir au futur président que parmi les « nouveaux chantiers » figurait le traitement des « disparités salariales dans l’audiovisuel public, du chantier numérique, du développement du réseau France Bleu, des droits d’auteurs et des salariés précaires » (Les Echos, 10 mai). Avec un tel bilan, Cavada a bien mérité de faire son entrée officielle en politique [2].

II. Presse écrite

  Distribution : la colère des kiosquiers de Paris. 250 des 310 revendeurs parisiens devraient faire grève (pour la première fois) le mardi 11 mai. Marianne et Libération (10 mai) dressent un bilan de leurs problèmes : 50 % d’invendus, faible taux de rémunération, horaires de chien, arrivée des quinzomadaires (une commission de misère), concurrence déloyale des gratuits, inondation de hors presse. 60 kiosques ont fermé l’année dernière [3].

  Presse quotidienne nationale. Ils sont « définitifs » pour 2003 : les chiffres de Diffusion Contrôle confirment le recul des quotidiens nationaux. Le Monde enregistre une perte de plus de 4%, mais reste « en tête » (ce qui semble rassurer ses dirigeants), avec une diffusion moyenne de 389.249 ex. payés, suivi par Le Figaro (352.706 ex.), l’Equipe (336.533 ex.), International Herald Tribune (196.854 ex.), Libération (158.115 ex.) et Aujourd’hui en France (149.833 ex.), Les Echos (116.903), La Croix ( 94.929 ex) , La Tribune à 80.459 ex. et France-Soir à 73.438 ex. [4]. A noter que Libération dégage en 2003 son premier profit d’exploitation depuis 3 ans, un assainissement qui présagerait une « ouverture capitalistique » (Les Echos, 10 mai).

 Gratuits. Nouvel entrant : le groupe Sud-Ouest a lancé le 10 mai, un quotidien gratuit Bordeaux 7 (en partenariat avec la Socpresse et Hachette). Son but ? Contrer Métro, avec 30 000 exemplaires par jour. Même à contre-cœur : « On se lance car on ne peut pas faire autrement ; un titre concurrent peut cannibaliser nos recettes publicitaires, explique Pierre Jeantet, PDG du groupe et président du directoire de la Sapeso. Mais je m’interroge sur la rentabilité et la profitabilité de ces gratuits, surtout dans les villes de moins de 1 million d’habitants." Cette nouvelle donne est "en train de casser des mécanismes difficiles et fragiles de la presse quotidienne régionale (PQR)  » (Le Monde, 5 mai).

 Presse féminine. Des nouvelles. Glamour relancé récemment ambitionne de se vendre à 160 000 exemplaires. Didier Suberbielle, PDG du groupe Conde Nast France, qui l’édite, y croit. Dans Le Figaro Economie, il estime le domaine de « la presse féminine extensible » bien qu’il soit le « terrain de jeu » de HFM (Hachette). Ce qui ne l’empêche pas de déplorer la saturation des kiosques, et de confirmer le test d’un magazine avec L’Equipe en septembre.
Autres nouvelles : Biba (Ex- Excelsior, siphonné par Emap) se brade désormais à 1 euro ; Elle (HFM) se mini-clone avec en hors-série vendu à Paris suivant ainsi sa politique de déclinaison de marques (Stratégies, 6 mai).

 DVD, tout Le Monde s’y met. Une autre forme de contenu qui va sauver la presse : le DVD. Rappels : c’est un mouvement parti d’Espagne (comme la grippe du même nom) contaminé dans Le Figaro du week-end, puis L’Express, L’Equipe, désormais Le Monde, à partir du 14 mai, et aussi Télépoche, le lundi 10 mai (La Tribune, 10 mai).
Aux suivants...

III. Edition

 Amaury. Le groupe qui détient Le Parisien, L’Equipe, le Tour de France et le Dakar..., projetterait de se lancer dans l’édition de guides sur l’Ile-de-France (Libération, 4 mai).

 Bolloré. Comme le secteur sature en France, Bolloré, ambitieux dans les médias, jette son dévolu sur l’Italie, en « prenant » - comme l’écrit La Tribune (5 mai) - 1 % de RCS MediaGroup (numéro un de la presse et de l’édition).
Dans le jeu des poupées russes, savoir que Bolloré détient déjà 5 % de la banque d’affaire principal actionnaire de RCS.

 Cession d’Editis. Après avoir bataillé contre la fusion, Gallimard se pose en acquéreur des 60 % d’Editis (Le Monde, 4 mai), coaché par la banque Natexis. Par conséquent et bien que tendant ses bras aux financiers, il(-s) devien(-nent) « privilégié » (avec Média Participation) car Bruxelles penche pour un projet industriel plutôt que financier (Le Figaro 10 mai). De fait, les fonds d’investissements en lice (Eurazeo ou Wendel) montrent « patte blanche » à Bruxelles (idem).

 Fonds d’investissements. Amusant ... Sous le titre « Le corbeau qui affole Le Seuil », Le Nouvel Observateur (29 avril) fait part des « déboires d’une vingtaine de cadres et d’intellos de la prestigieuse maison qui ont cédé, il y deux ans de cela, quelques dizaines de milliers d’actions à deux fonds d’investissement au prix modique de 18 euros le titre [... ] alors que le groupe La Martinière, récent acquéreur de 100% du Seuil, vient d’en offrir le quintuple : 97 euros ! Des investisseurs avisés, un jackpot inespéré et des vieux compagnons de route privés de plus-values : l’affaire nourrit les rancœurs. " " Voilà du bon argent rapidement et facilement gagné et dont n’auront pas profité les cadres du Seuil qui ont cédé un peu hâtivement leurs actions. Si Le Seuil avait été une société cotée en Bourse, sûr que la COB se serait penchée sur ce qui ressemble fort à un délit d’initié ", persifle celui qui signe "l’imprécateur" ».

IV. Et pour finir...

 Sarkozy, mon amour. Le Figaro Entreprises : « Les patrons allemands rêvent d’un Sarkozy à leurs côtés » (10 mai). Le Figaro du 8 mai rapporte un bon mot de "Sarko" lancé à "Douste" : « Philippe, quand tu veux faire la Une du Parisien, tu me le demandes. Je te l’obtiendrai. Enfin, les jours où j’en ai pas besoin... » (L’Expansion, mai) : «  Les Français croient déjà à l’effet Sarkozy » (Précisons : les Français ramassés dans un sondage)... (Lire rubrique 40.)

 Salaires des patrons du CAC 40. Deux tiers des patrons du CAC ont bénéficié d’une hausse de leur rémunération en 2003 : un bon millésime (sic), disent Les Echos (10 mai). Parmi eux : Lagardère (+ 35 %) et Le Lay (+ 62 %). Précisions du quotidien : concernant les retraites et les « avantages consentis », les rapports de TF1 et Bouygues « font état de l’absence d’engagement ».

 Rapports annonceur / presse. Le 29 avril, coup médiatique : la nouvelle Peugeot fait la Une du Parisien. Comment Peugeot l’a-t-il décrochée ? Simple, selon Stratégies (29 avril) : le fabricant d’automobiles a fait faire des essais exclusifs au directeur du quotidien.

 RSF. Sortie de l’album vendu au profit de Reporters sans Frontières (70 % de la vente va dans ses caisses). Par empathie et démonstration d’un idéalisme confraternel et universel, chaque média assure sa promotion. Notons que France-Soir (4 mai) se fend d’un « Pour la liberté de la presse qui en a bien besoin  », mais offre deux pages de rédactionnel enthousiaste aux nouvelles publicités. Vive la liberté de la presse, payée par les multinationales.

 Petits Soldats du journalisme. L’Institut d’Etudes Politiques de Paris (dit "Sciences Po") avait à peine dévoilé son projet d’école de journalisme, concocté avec soin, on s’en doute, par ces pontes que sont Michel Cotta, Etienne Mougeotte, Yves de Chaisemartin ou Nicolas Beytout, que le SNJ-CGT dénonçait une formation « élitiste » (Le Monde, 29 avril).

 Lobbying, influence. Revue de détails dont les médias raffolent dans « Le monde secret de l’influence ». Sous ce titre, Le Figaro Magazine (30 avril) fait son défricheur de coaches, journalistes, experts, dont la plupart pourtant médiatiques (Stéphane Fouks, Alain Bauer, Raymond Soubie... ) dans un trombinoscope des « 50 qui comptent » (surtout leur argent).

 Soudan. Lire : « Nettoyage ethnique au Soudan, massacre à l’écart des caméras » (Courier International, 6 mai).

 
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Notes

[1NRJ semble sur la même ligne (pour NRJ TV), il « veut un lancement rapide de la TNT et de la radio numérique » (Les Echos, 6 mai). Petit hic, NRJ TV est sur le même bouquet TNT que TF1 (et ses chaînes).

[2" Juste avant de quitter la présidence de Radio France, Jean-Marie Cavada nomme sa fille, Laurence Luret, comme journaliste (elle anime l’émission Parenthèses sur France Inter) (...) Ce cas est d’autant plus instructif que Jean-Marie Cavada a construit sa carrière par lui-même (il est un enfant de la DDASS) en réussissant à la fois dans le public et dans le privé, et qu’il a une réputation d’homme intègre. Le système est profondément perverti puisque ceux qui devraient être les meilleurs remparts contre le népotisme (du fait de leur parcours personnel d’autodidacte) tendent à devenir aujourd’hui, eux aussi, des népotes et à soutenir des pratiques qui auraient pu leur empêcher de faire carrière lorsqu’ils étaient plus jeunes ! " (Les FFD. La France aux mains des Fils et Filles De, par Frédéric Teulon, Bourin Editeur, 2005) (note d’Acrimed, août 2005).

[3Sur les négociations NMPP et SPP, lire aussi : L’actualité des médias n°23 (même rubrique).

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