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Décryptage d’une émission de décembre 1999

Jean Lebrun invite Laure Adler (4)

Acte III : Où il est montré que Jean Lebrun connaît la musique...

" Pot-au-feu ", France Culture, mardi 14 décembre 1999, 18 h 20 - Emission enregistrée en public au Bouillon Racine et diffusée en direct - Le « Pot-au-feu, on le sait, exige une longue cuisson…L’émission traîne en longueur, mais Jean Lebrun est parvenu jusqu’alors à éviter toute discussion. Il y parvindra également pendant toute la durée de l’Acte III. Si le lecteur s’impatiente , il peut passer directement à l’Acte IV …

Acte III : Où il est montré que Jean Lebrun connaît la musique…


Lebrun : Olivier, vous vous écoutez en continuité. Là on va venir maintenant si vous le voulez bien au débat chaud d’aujourd’hui. Olivier, vous écoutez donc France Culture en continuité et depuis la nouvelle grille vous être gêné parce que de temps en temps vous faites des bonds comme Zébulon, à d’autres moments, vous vous endormez ; vous êtes troublés dans la quiétude de l’écoute régulière, obsessionnelle j’allais dire, qui était la vôtre.

L’auditeur explique que son écoute n’est pas obsessionnelle par rapports à d’autres qui enregistrent en continu. Il a cette sortie :

Olivier : […] ce qui m’intéresse, c’est pas le contenu comme je l’ai dit tout à l’heure - tout rentre dans l’ordre grâce au bon sens - mais c’est le superflu qui me gêne cette année à France Culture. Et c’est vraiment la première fois que je ressens ça. […] Il y a des génériques qui m’énervent, qui sont trop forts…

Applaudissements

Lebrun : Non mais laissez parler Olivier, vous allez parler à votre tour…
Olivier raconte ses difficultés pour régler le volume. Il conclut :

Olivier  : Le contenu, après, je pense que s’il est bien emballé, c’est pas un problème. Moi, qu’il y ait des horaires qui changent, des animateurs qui arrivent, d’autres qui partent, c’est pas un problème pour moi.

Lebrun : Le son, la musique, premier chantier comme dirait Laure Adler. Un témoignage encore, ça va être un tout dernier. Les lectures qu’on fait du courrier sont telles qu’on a gardé l’anonymat, mais ce sont de vraies lettres, rassurez-vous.

Témoignage d’une quasi-aveugle sauvée de la cécité intellectuelle par France Culture. Puis d’une fille d’ouvrier qui rend hommage à France Culture et se plaint d’être " privée de dessert " par la nouvelle grille, y regrettant la diffusion de programmes musicaux.

 Nouvelle insistance sur les " vraies " lettres, par opposition aux fausses, dont un exemplaire a été lu au début de la " causerie ".

Lebrun : Louis-Bernard Szadelja [?], vous allez dire que je suis très directif
L-B S : oui.
Lebrun : je ne vous demande pas de chanter, vous ne voulez pas chanter ? Je voudrais que vous restiez dans ligne de ce qui vient d’être dit, et notamment de ce dernier témoignage. Je ne pense pas que les auditeurs de France Culture soient hostiles à ce qu’il y ait de la musique à l’antenne ? On a enfin obtenu la fusion, dans la même direction de France Culture, non seulement de la rédaction mais aussi des programmes musicaux qui étaient demandés depuis longtemps. Ils formaient une enclave à part. Est-ce qu’il n’y a pas une crainte de la part des auditeurs de France Culture que le rôle de France Musique et le rôle de France Culture ne soient plus dissociés ? C’est ça qu’il faut lire dans cette demande de programmes d’abord parlés.

 - " Je voudrais que vous restiez dans la ligne " : Jean Lebrun n’entend pas changer de cap…
 " C’est ça qu’il faut lire " : Jean Lebrun interprète à sa convenance.

L-B S : Attendez, je réfléchis et je vais essayer de réfléchir vite parce que…

Lebrun : … parce qu’il y a d’autres auditeurs qui vont applaudir… applaudir à votre silence.

L-B S : Apprécie les programmes de musique contemporaine sur France Culture, mais regrette l’irruption des autres styles qu’il affirme pouvoir écouter ailleurs. Puis il essaye de monter en généralité :

L-B S : Je voudrais revenir un peu sur ces quatre points qui pour moi sont fondamentaux

Lebrun : Attendez, on peut rester un peu sur la musique parce qu’il y a deux auditeurs dernière vous qui veulent parler de musique et après je vous redonne la parole. OK ? Vous parlez de musique monsieur l’instituteur. Je vous laisse vous présenter ?

Acte IV : Quand, malgré toutes les précautions, le Pot-au-feu se met à bouillir

L’instituteur  : Oui je suis instituteur à la prison de Fleury-Mérogis depuis trente ans, voilà. Donc pour moi, j’ai écouté France Culture effectivement comme tout le monde ici pendant des années avec un plaisir permanent. Et c’est vrai que depuis à peu prés deux ans et demie, avec la musique qui arrive, je suis effectivement catastrophé.

Il dénonce la dérive commerciale de la station. Hausse progressivement le ton. Estime qu’" on veut casser France Culture ". Il appelle à la lutte :

L’instituteur : Je dis : réunissons-nous, battons-nous, unissons-nous, et un petit nombre décidé, et même très nombreux, on peut faire revenir en arrière parce qu’il y a des élections et on peut faire reculer le gouvernement.

Tonnerre d’applaudissements et de bravos.

L’instituteur (il crie) : Et madame Laure Adler et tous ces gens-là qui n’en ont rien à foutre de la culture et qui sont payés…

Lebrun : Bon, euh… Olivier, alors ce n’est plus Olivier Villassa [?], c’est un autre Olivier. Vous êtes compositeur, vous allez me dire que c’est formidable qu’il y ait de la musique sur France Culture. Vous approchez le micro et vous faites comme monsieur le maître d’école de Fleury-Mérogis, vous le tenez très fort.

 On notera que " monsieur l’instituteur ", qui n’avait pas de nom à l’antenne - il s’agit de Antoine Lubrina - devient " monsieur le maître d’école de Fleury-Mérogis ". Lebrun revient à " son " thème - la musique - pour que son invité lui dise, après ce réquisitoire, " que c’est formidable qu’il y ait de la musique sur France Culture. "

Olivier : Non, ce n’est pas ce que je voulais dire. […] Si c’est ça la musique, je ne suis pas d’accord pour qu’elle soit à ce niveau là à France Culture. Je trouve que cela n’est pas très bien.

Lebrun : Mais est-ce que vous ne trouvez pas normal qu’il y ait une sorte de formation un peu encyclopédique puisqu’il y a une volonté d’université permanente à France Culture, qui s’étende aussi à la musique et aux formes de musiques que nous autres, messieurs Szadelja [?] et moi, quadragénaires, ne connaissons pas ?

L’auditeur regrette les programmes musicaux surnuméraires et la " dilution de la qualité ", la piètre qualité des débats sur la musique.

 Lebrun revient à la charge pour que l’auditeur dise ce qu’il veut lui faire dire :

Lebrun : Mais quand vous voyez une émission comme Voie carrossable, qui a lieu en direct dans un autre café situé au nord de Paris, où il y a beaucoup de monde, et où il y a à la fois un concert en direct et une volonté didactique, un philosophe qui peut s’exprimer

[Interruption de cassette : un bref passage de l’émission n’a pas été enregistré]

Henri Faÿ fait l’éloge de l’émission Le rythme et la raison

Lebrun : Bon j’apprécie Henri Faÿ votre esprit de discipline parce que vous parlez du thème qu’on a choisi, la musique, ce qui va être le cas d’Evelyne Vicky, non ?

 Le thème qu’ " on " a choisi : comme si les auditeurs présents avaient choisi quoi que ce soit. Louer l’esprit de discipline de l’auditeur, c’est en vérité, pour Lebrun, se féliciter de l’avoir discipliné…

E. V. est l’auditrice favorable à la nouvelle grille. Elle reproche aux auditeurs contents de ne pas noter les changements d’horaires ou d’émissions positifs. Mais aussi de ne pas laisser le temps aux nouveaux venus de s’installer. Elle félicite Pierre Assouline. Aujourd’hui, elle " s’y retrouve " : " c’est une radio qui demande de réfléchir, ce qui veut dire : d’avoir l’esprit critique "

Lebrun : Ce que vous voulez dire, si je vous traduis encore, Evelyne Vicky, c’est que c’est un peu un réflexe d’habitués de l’audimat que de vouloir qu’une émission soit sanctionnée au bout de trois éditions.

 " Traduction " complètement orientée, qui vise à souligner que ce sont ceux qui contestent la nouvelle grille qui sont conditionnés par l’Audimat, alors que les auditeurs mécontents n’ont jamais évoqué cette question mais seulement le contenu des programmes. C’est la nouvelle grille de Laure Adler qui est inspirée par des considérations d’audience et d’audimat. Au fond, par cette remarque - qui atteint les sommets de la mauvaise foi -, Jean Lebrun trahit le fait qu’il a déjà, lui aussi, l’audimat dans le tête, et qu’il demande seulement un peu de temps pour celui-ci donne raison à la direction de la chaîne…

E. V : Ben bien sûr.

Intervention d’une autre auditrice à propos de l’habillage musical qu’elle juge parasitaire.

Lebrun : Vous voulez dire que les articulations et les charnières et les transitions, c’est très important. Moi j’ai du mal à faire la mienne parce qu’il faut que je me fraie un chemin dans la foule du Bouillon Racine vers un monsieur qui se présente :

 « Vous voulez dire " permet de faire dire à l’auditrice tout autre chose que ce qu’elle a dit …

Intervention de Samuel Armand [?] : estime que la polémique est une " tempête dans un verre d’eau ". Pour lui, les émissions du samedi matin (animées par les vedettes du Monde, du Monde Diplo et de Courrier international) sont " excellentes ". Appelle au renouveau des " débats politiques " sur France Culture. Qualifie de " un peu dérisoire " le panneau brandi par l’instituteur de Fleury-Mérogis, sur lequel on peut lire : " Laure Adler démission "

Lebrun : Olivier Villassa [?], qui va nous quitter, il rentre à côté de Montélimar, une dernière intervention brève et de nouveau la salle. Olivier.

Celui-ci déclare que " les horaires des émissions et les émission en elles-mêmes, ça m’importe peu finalement dans le débat actuel " et critique à nouveau le superflu à France Culture.

Intervention d’un auditeur qui regrette l’ancien France Culture. Il estime qu’il ne s’agit pas d’un simple changement de grille mais d’un changement général : " tout est changé, c’est la vocation de France Culture, les oeuvres les travaux scientifiques, les créations ne sont plus abordés de la même manière : on parle à propos d’elles, mais on ne les commente plus ". Il fait part de son " immense désarroi " dans lequel la direction qui n’a " jamais écouté France Culture " plonge les auditeurs.

Clac & bravos

Intervention d’Olivier Queysannes [?] : fustige la volonté de bouleversement de la direction. Il lit un texte.

Lebrun : Qu’est-ce que vous appelez l’ancienne grille ? C’était une grille nouvelle.

Réponse d’Olivier Queysannes : l’ancienne grille " laissait aux choses le temps de se développer, de s’installer, d’être débattues, d’aller dans le fond des choses "

Lebrun : Mais on aurait fait la même émission en public il y a deux ans, après l’ancienne nouvelle grille, peut-être auriez-vous eu les mêmes réactions.

O. Q. : Non

 Jean Lebrun reste dans sa " ligne " : attribuer le mécontentement à un excès de précipitation des auditeurs... Mais son argument est étrange (voire absurde), car précisément, deux ans auparavant, il n’y avait pas eu de réactions de rejet massives. Pourquoi manier le conditionnel, quand on connaît la réponse ?

 A partir de ce moment, Jean Lebrun perd peu à peu le contrôle de cette émission qu’il avait soigneusement cadenassée :

Lebrun : Alors, madame et puis, quand même, une association, heu…

Un auditeur : Monsieur Lebrun… Monsieur Lebrun… moi j’aimerais bien

Lebrun : Attendez. Madame, et après je voudrais bien donner la parole à Laure Adler. Il faut quand même qu’on entende Laure Adler.

L’auditeur : Monsieur Jean Lebrun ! Non mais moi je vais vous couper la parole parce que comme d’habitude vous êtes extrêmement directif. Là, les questions que vous nous posez - je ne sais pas si le micro est coupé… Je trouve que vous êtes extrêmement directif. Les questions que vous nous posez à propos de la musique, je suis désolé, nous sommes sur France Musique [Il veut dire : France Culture] , je pense qu’il y a quand même des questions, des problématiques bien plus importantes, et je voudrais rappeler qu’il y a quand même pour moi quatre temps forts.

Sous les vivats, il égrène les rendez-vous de l’ancienne grille dont il dénonce la disparition. En référence à la directivité de Lebrun, il finit : " Et ça, ça a été complètement occulté ! "

Lebrun : Madame. Merci. Madame…

Françoise Léglise lit un long texte dénonçant " le ringardisme ", le " conformisme ", " l’introduction dans un circuit marchand ".

Jean Lebrun s’impatiente, l’interrompt (" Je vous arrête, là. Non mais je vous arrête parce que le climat affectif, il existe toujours manifestement ", " très vite, madame ! " ; " Bon, je vous interrompt, madame, je vous interrompt. Bon ! Il nous reste… il nous reste… ", " Bon madame, je vous demande d’interrompre maintenant ! Non, je suis désolé, il me reste dix minutes d’antenne, et il faudrait quand même que d’autres personnes puissent s’exprimer, et sans notes ! Merci ! " ; elle persiste ; on lui coupe le micro ; le public proteste ; sa voix demeure en arrière fond…La salle la soutient : " c’est vrai ce qu’elle dit "


Jean Lebrun
 : Bon, Laure Adler… Alors, qu’est ce qu’on prend… qu’est ce qu’on prend… qu’est ce qu’on prend ! Merci madame, je suis trop directif et trop long, mais vous aussi. Vous avez pris des leçons, euh, de la part de Jean Lebrun. Laure Adler : il y a une question de fond presque qui se pose : qui doit faire les programmes de France Culture ? Parce que parfois dans le courrier, on lit : " On est les assujettis de la redevance ", comme dirait le président de l’Association des Amis de France Culture, qui est derrière vous. " On est des sujets ; on est des gens de peu ". Euh !? Et est-ce que, demandent les auditeurs, on ne pourrait pas prendre une part plus active aux programmes ? Est-ce que c’est le rôle de la direction d’imposer une grille de programmes ?

 La réponse confirme que, pour Laure Adler, le rôle de la direction est bien d’imposer une grille de programme :

Laure Adler : Ben bien sûr, c’est pour ça qu’on est là. Moi je voulais dire que j’avais beaucoup appris au cours de cette heure et demie. Quelqu’un qui s’occupe de France Culture et qui a ce grand honneur, c’est d’abord quelqu’un qui doit savoir écouter, donc j’ai écouté attentivement. D’ailleurs je définis mon rôle de directrice d’abord comme une écouteuse : j’écoute les programmes, pas dix-neuf heures par jour, hélas. Mais j’essaye d’écouter vraiment beaucoup beaucoup la chaîne. Je voudrais dire à quel point je suis heureuse et fière de cette… de ce que j’entends à chaque moment de la journée. En venant ici j’ai entendu une émission exceptionnelle de quelqu’un qui s’occupait des autres. Hier il y avait une jeune femme qui s’appelait Nadia et qui expliquait sa détresse. Je voulais dire aussi que hier soir, dans " Surpris par la nuit ", qui remplace " Les Nuits magnétiques " - car l’idée des Nuits magnétiques reste et demeure très très fort à l’intérieur de France Culture -, il y avait une émission qui m’a bouleversée et qui m’a faite pleurer sur les handicapés, qui était tout à fait remarquable ; que à chaque moment que j’écoute France Culture, je ressens ce que doit être l’âme et l’identité de France Culture, c’est-à-dire un tressage entre le savoir et l’émotion que procure le savoir, c’est-à-dire la découverte de nous-mêmes. Je crois que ce soir nous avons assisté à ce qui me paraît être le plus important, c’est-à-dire la passion avec laquelle les auditeurs sont arrimés, comme à une île, à ce France Culture qui représente tous nos espoirs et notre avenir. Un monsieur a tout à fait légitimement, je crois, fait remarquer que nous étions dans une époque un peu de désespérance, un peu de recherche de sens, un peu de recherche d’identité, de repères, on l’a bien vu. Nous tous à France Culture qui avons milité pour l’exception culturelle, nous sommes contents de voir que l’exception culturelle à Seattle a gagnée. Je pense que France Culture représente haut et fort justement une exception culturelle à elle toute seule…

Jean Lebrun : Alors, radio-exception, Laure Adler…

Laure Adler : … je voudrais rajouter une seule chose : je voudrais dire que chacun a son France Culture. A soi. Le jeune homme qui est parti, qui était en face de moi toute à l’heure, a dit des choses absolument… passionnantes. Il a dit qu’il n’y avait pas de communauté des auditeurs de France Culture. Il a absolument raison, parce que chacun a son France Culture dans son cœur et dans son âme. Et c’est ça qui me paraît le plus important. Pourquoi ? Et là je voudrais rendre hommage à tout ces producteurs, ces 130 producteurs, avec toutes les équipes, les chargés de réalisation, les réalisateurs, les techniciens, qui nous tous ensemble… Parce que c’est une équipe, France Culture, c’est une équipe avec un collectif, avec une idée commune, chacun a son idée…

Un auditeur : Madame… il y a aussi… Madame…
Jean Lebrun : Mais reconnaissez, Laure… reconnaissez…

L’auditeur : Non non, mais attendez ! Non, madame, je suis désolé… Tous les producteurs que vous avez congédiés… et ça vous ne pouvez pas accepter ça… C’est un discours… C’est un faux discours !
[Applaudissements dans la salle, brouhaha]

Jean Lebrun : Mais justement, mais attendez… Nous avons peu de minutes

L’auditeur : …C’est un discours complètement démagogique que vous…[inaudible] On ne peut pas accepter des… [inaudible]

Jean Lebrun : Non mais nous avons peu de minutes… Alors, Laure Adler, vous conviendrez…

 A partir de ce moment, " l’écouteuse " va changer de ton. Après avoir tenter de faire croire que finalement tout le monde est d’accord avec tout le monde et donc avec elle, elle consomme brutalement la rupture. Elle veut bien faire semblant d’écouter quand on lui dit ce qu’elle veut entendre. Mais dès que des avis divergents s’expriment, les opposants deviennent des gens violents, minoritaires, non démocratiques, etc. , bref des gens qu’il ne faut surtout pas écouter.


Laure Adler
[à l’auditeur] : Ah oui, vous pouvez toujours protester… Vous ne les acceptez pas messieurs, mais j’ai le droit de les tenir, parce que j’y crois. Et aussi pour vous dire que vous avez le droit…

Jean Lebrun ; ’tendez ’tendez ’tendez… Vous conviendrez, Laure… Attendez, un peu de discipline ! Vous conviendrez que, je reprends un peu les propos de messieurs, que vous avez tendu l’élastique très loin, voulant viser très loin, et… et… qu’en même temps, avec les modifications de janvier, euh… vous étiez à 10, euh… vous revenez à 7.

Laure Adler  : Non, pas du tout. Je ne renonce pas à l’essentiel, c’est-à-dire à l’âme, l’identité, la force et l’avenir de France Culture. Je pense que la culture reste un arme, une arme de citoyenneté…

Un auditeur : C’est pas une arme !

Laure Adler : … de solidarité, de reconnaissance de l’autre. Je pense que France Culture, à chaque moment où nous l’écoutons, représente ça…

L’auditeur : Merde ! c’est pas la culture qui est une arme ! C’est une âme ! C’est pas une arme
[Applaudissements]

Laure Adler : … une âme et une arme de citoyenneté et de solidarité

L’auditeur : Mais dites pas de conneries ! Vous êtes politique [ ?] ! C’est dégueulasse ! [il hurle]

Jean Lebrun : Bon, monsieur, nous essayons de nous exprimer…
Laure Adler : Je voulais dire que… Je voudrais terminer, Jean Lebrun. Je voudrais dire que les auditeurs qui sont là et qui expriment leur propre point de vue ont tout à fait légitimement le droit de l’exprimer. Ce n’est pas la majorité des auditeurs. Ce ne sont pas du tout, du tout du tout, les retours que nous avons…
[Vives protestations de la salle]

Laure Adler : … pas du tout, du tout, du tout…

[Quelqu’un hurle une remarque à propos de la démocratie]

Laure Adler : Et d’autre part je voulais terminer en disant que cette émission s’est déroulée dans un climat de très grande violence, avec un monsieur qui pourtant travaille dans une prison donc il devrait savoir ce que c’est que le désespoir, ce que c’est que la solitude…

[Protestations de la salle indignée]

Laure Adler : … depuis une heure et demie, il a devant lui un papier où c’est marqué : " Laure Adler démission ". Et bien non, je ne suis pas toute seule, je ne suis pas toute seule

Jean Lebrun : Bon ! Est-ce que vous pouvez… Il nous reste deux minutes, est-ce que vous pouvez… …

Laure Adler : … et je voudrais rendre hommage à toutes celles et ceux qui font France Culture à chaque moment de la journée et de la nuit [elle martèle ces mots]. Et je suis très fière et très heureuse de continuer à essayer d’assurer l’âme et l’identité de France Culture.

Jean Lebrun : Est-ce que vous pouvez, Laure, en deux minutes, indiquer quelques une des grandes lignes de janvier ?

Laure Adler : [Silence] Ben je pense que… Nan ! Parce que vous les découvrirez. Je pense que à partir de la semaine prochaine vous découvrirez sur l’antenne déjà des nouvelles émissions. Je pense que puisque vous avez montré à quel point vous étiez passionnés à l’écoute de France Culture, je pense que vous laisserai la joie de découvrir, à vous tous qui êtes des auditeurs passionnés, ces…
Jean Lebrun : Conclusion ! [Il désigne une auditrice invitée en plateau, la seule favorable à la nouvelle grille] Conclusion madame !

Un auditeur : On se battra. On se battra, madame. On a commencé à se réunir et à agir.

L’auditrice : Je pense que c’est quand même formidable que des gens se mobilisent pour tout ça. Et je crois que tout ça, c’est de l’amour.

[Stupeur de la salle devant une telle chute. Puis quelques rires. Lebrun fait signe à la régie de lancer le générique]

 
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