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« Israël-Gaza, l’onde de choc » sur France 2 : la télévision contre la pensée

par Arnaud Galliere, Pauline Perrenot,

Nous publions, en avant-première, un article qui paraîtra dans le Médiacritiques n°49. Ce numéro sortira en février et sera consacré au traitement médiatique de la situation en Israël et à Gaza depuis le 7 octobre.

« Israël-Gaza : l’onde de choc » : le 19 octobre, pour la première et dernière fois à ce jour, France 2 consacrait une édition spéciale aux massacres du 7 octobre et à l’intervention militaire israélienne qui a suivi. Co-présentée par Caroline Roux et Julian Bugier, cette émission a été diffusée en prime time (21h) et en direct. « Faire le point sur le conflit afin de mieux comprendre ses tenants et ses aboutissants » était l’objectif affiché par la rédaction, laquelle revendiquait pour cela l’éclairage « de nombreux spécialistes du Moyen-Orient ». L’occasion de se pencher sur la façon dont une chaîne de service public formate et met en scène l’information internationale.


Une foule d’interlocuteurs hétérogènes


Sur une émission d’une heure et vingt-deux minutes – nous n’avons pas inclus dans notre analyse les trente dernières minutes de l’émission, qui portèrent quant à elles sur des enjeux de société et de politique françaises –, huit intervenants sont invités à répondre aux questions des journalistes. Parmi eux, quatre demeurent en plateau tout au long de l’émission : Bertrand Badie (« Professeur de relations internationales à Sciences Po » [1]), David Khalfa (« Expert du Moyen-Orient à la fondation Jean-Jaurès »), Isabelle Defourny (« Présidente de Médecins sans frontières ») et Christophe Gomart (« Ancien directeur du renseignement militaire »). Valérie Zenatti – « Écrivaine et scénariste », dont Caroline Roux précise qu’elle a « vécu huit ans en Israël » – arrive en plateau à partir de la vingt-deuxième minute. À ces cinq personnes s’ajoutent trois interlocuteurs ponctuels, dont seul le premier est en studio : Bernard-Henri Lévy (« Écrivain et philosophe »), Raphaël Morav (« Chargé d’affaires d’Israël en France ») et Hala Abou-Hassira (« Représentante en France de l’Autorité palestinienne »).

Nous avons en outre décompté dix interruptions de plateau (15 minutes et 51 secondes au total), au cours desquelles plusieurs directs, reportages et temps de « décryptage » ont donné à entendre sept journalistes de France 2 et différents témoignages, la plupart du temps montés sous une forme équivalente à celle du micro-trottoir.

En tout point conforme au formatage d’un plateau dit d’« information » tel que le conçoivent les chefferies médiatiques en télévision, France 2 a donc privilégié le zapping, la multiplicité des intervenants... et l’hétérogénéité de leurs statuts. Deux propriétés qui contribuent, comme nous le soulignions dans un précédent article, à « créer une cacophonie nivelant toutes les voix invitées à s’exprimer : diplomates, politiques, artistes, chercheurs, témoins, militaires, avocats, écrivains, éditorialistes, "experts" et consultants, etc. Un défilé permanent qui remplace un véritable pluralisme par une pluralité des "expressions" [...] », aux dépens, bien souvent, d’une information structurée et cohérente. Et c’est peu dire que cette édition n’a pas fait exception...


Contraintes inégales et temps de parole réduit au minimum


Sur un peu plus d’une heure vingt d’émission, le temps de parole cumulé des invités oscille entre, au maximum, 8 minutes et 55 secondes dans le cas de David Khalfa et, au minimum, 2 minutes et 33 secondes pour Raphaël Morav. Pour la plupart soumis aux interruptions constantes des présentateurs, les invités ont un temps de parole moyen par intervention s’élevant... à 26 secondes [2].

D’une durée résiduelle, leurs interventions masquent en outre des conditions de prise de parole particulièrement inégales. BHL, par exemple, est gratifié d’un entretien privilégié : annoncé en grande pompe tel un témoin d’exception [3], il fait une entrée distincte en plateau, à rebours de ses quatre interlocuteurs voisins, et bénéficie de quatre prises de parole avant de se retirer du studio. Interrompu une seule fois par Julian Bugier, préservé de toute interpellation tant son propos est inscrit dans un dispositif étanche à toute « mise en débat », il est de fait l’invité en plateau dont le temps de parole moyen a été le plus élevé de l’émission.

Tous n’ont pas eu cette chance. La présidente de MSF Isabelle Defourny, par exemple : présente du début à la fin de l’émission, elle n’est interrogée qu’à seulement trois reprises. Elle essuie cinq interruptions lors de sa première intervention (de 2 minutes 30 au total), doit attendre 25 minutes avant la deuxième, puis plus de 35 minutes avant de s’exprimer une troisième et dernière fois. Ajoutons à ce bilan que sa deuxième prise de parole est loin d’être autonome : elle n’est en réalité sollicitée que pour répondre à une violente interpellation de David Khalfa, qui prend à témoin l’assemblée au moment d’épingler différents tweets de MSF. Isabelle Defourny, qui était de fait la seule intervenante en plateau à pouvoir relayer des informations de terrain concernant les civils de Gaza – quand bien même un reportage a partiellement informé à cet égard –, ne s’est ainsi exprimée que pendant 4 minutes et 27 secondes au total, deux fois moins, par exemple, que David Khalfa.

Dans de tels dispositifs, les contraintes que les présentateurs ont eux-mêmes fixées pèsent sur leur conduite de l’émission : engagés dans une course contre la montre, soucieux de « faire circuler la parole » sans y parvenir, noyés dans leur propre conducteur sous forme de « pot-pourri » enchaînant les sujets, ils sont en outre totalement aveuglés par le mythe professionnel postulant un désintérêt des téléspectateurs face à ce que les journalistes conviennent d’appeler entre eux... des « tunnels ». Ainsi, au cours de cette émission, on ne compte plus les chuchotements de Caroline Roux et Julian Bugier se superposant aux propos de leurs invités, ni leurs injonctions à la concision – « Faut faire des réponses courtes, vous êtes nombreux », « Une réaction courte, parce qu’il faut qu’on avance » martèle par exemple Julian Bugier – et encore moins leurs « ouais » réflexes pendant des prises de parole, un type d’interjection dont Pierre Bourdieu soulignait combien il « presse, [... et] fait sentir à l’interlocuteur l’impatience ou l’indifférence » [4]. C’est bien simple : aux yeux des journalistes, s’exprimer plus de deux minutes en continu semble déjà relever d’un trop-plein. Pour avoir pris la parole en duplex pendant 2 minutes 10, Hala Abou-Hassira – la seule voix palestinienne – essuie par exemple une remontrance :

- Caroline Roux : Je peux vous interrompre ? Est-ce que je peux vous interrompre ?! C’est difficile de vous interrompre quand vous parlez... Et vous nous livrez avec beaucoup de sincérité [coupée]

- Hala Abou-Hassira : On m’interrompt beaucoup... On m’interrompt beaucoup...

- Caroline Roux : Alors est-ce que je peux le faire encore une fois ? J’imagine que oui.


« Vous avez eu sacrément la parole ce soir, pardon de le dire »


Les interlocuteurs ont beau être soumis à des contraintes similaires, le cadre ne pèse pas sur tous à l’identique, et tous n’adoptent pas les mêmes stratégies. Certains décident de jouer les bons élèves. Au moment de donner la parole à David Khalfa – « Vous avez une minute trente, c’est à vous la parole : une solution à deux États, c’est encore possible ? » – Julian Bugier ajoute : « Si vous ne m’engueulez pas par contre hein ! » L’expert de la Fondation Jean-Jaurès s’en défend – « Moi, je suis très poli » – et s’interrompt de son propre chef au bout de quarante secondes, non sans ajouter cette marque d’ironie : « Voilà, je crois que j’ai fait très court. Ça vous va ? » Conforme au récit dominant privilégié par la plupart des médias, le propos qu’avance David Khalfa a beau être limité par la concision imposée, il reste néanmoins plus immédiatement « intelligible » que d’autres pensées moins hégémoniques.

Pour celles-ci, le dispositif médiatique devient alors plus qu’une contrainte : un empêchement. Ce que ne renierait sans doute pas Bertrand Badie... Au cours de l’émission, ce dernier est intervenu à sept reprises : sur ses 7 minutes et 29 secondes de temps de parole, il ne pourra jamais, sauf une fois, parler plus d’une minute sans interruption. Difficile d’imaginer, dans de telles conditions, que le chercheur puisse développer convenablement sa pensée, a fortiori lorsqu’il soulève des angles d’analyse s’écartant des sentiers médiatiquement battus. Ce qu’il ne se prive pas de souligner plusieurs fois au cours de l’émission, comme lors de cet échange avec Caroline Roux :

- Bertrand Badie : Il ne faut pas prendre une mauvaise direction dans l’analyse et faire comme si on était encore dans l’ancien monde, c’est-à-dire évaluer le Hamas à travers ses soutiens étatiques. C’est vrai qu’il y a des liens avec le Qatar, qui sont d’ailleurs infiniment plus complexes qu’on ne le dit, [chuchotements] qu’il y a des liens avec l’Iran, c’est vrai. Mais ce qu’il faut voir, c’est cette dialectique [Ouais. Ouais.] qu’il y a entre le Hamas et l’opinion publique palestinienne [coupé]

- Caroline Roux : Oui, on voit surtout... [Bertrand Badie : Non mais attendez, parce que c’est très important...] On voit surtout qu’il y a un soutien du monde arabe au Hamas.

- Bertrand Badie : Vous permettez ? Je fais mon métier, là, si vous permettez.

- Caroline Roux : Oui, mais moi aussi !

- Bertrand Badie : Oui mais là jusqu’à maintenant, je n’ai pas eu l’occasion de le faire et on va bientôt achever l’émission.

- Caroline Roux : Ah bon ! Bah allez-y. Allez-y, allez-y...

Se borner à constater les marques d’indifférence et de mépris qu’adresse la journaliste à son interlocuteur manquerait sans doute la principale – et bien plus navrante – conclusion à tirer de cet échange : présentateur-journaliste et chercheur sont deux métiers en totale contradiction d’intérêts. Et développer une expression argumentée, analytique – ou simplement informative –, se révèle littéralement impossible dans le dispositif (multi-)contraint que les journalistes imposent.

Un peu plus tôt encore, faute d’informations suffisamment fiables, Bertrand Badie refusait d’improviser des analyses à propos de l’explosion survenue dans la cour de l’hôpital Al-Ahli Arab de Gaza deux jours plus tôt pour mieux réorienter le cours du commentaire politique et militaire : « Les questions que nous devons nous poser, ce ne sont pas celles-là, parce que ce n’est pas notre travail. La question que nous devons nous poser, c’est est-ce qu’il est possible d’"éradiquer le Hamas". [...] » Entrecoupée de multiples tentatives d’interruption, son expression est littéralement ignorée par Caroline Roux qui le coupe au bout d’à peine 20 secondes, pour mieux en revenir à sa question initiale... et quand même, in fine, lui retirer la parole :

- Caroline Roux : Mais en tant qu’analyste, vous avez vu que [l’explosion à l’hôpital Al-Ahli Arab] avait suffi à mettre le feu au monde arabe. Et on y reviendra.

- Bertrand Badie : Alors... vous avez totalement raison... Ça, c’est l’autre aspect que je voulais mettre en évidence, c’est le perçu des choses, le perçu devient effectivement un paramètre fondamental [coupé]

- Julian Bugier : On va y revenir

- Caroline Roux : Et on y reviendra. [Bertrand Badie tente de s’exprimer, inaudible].

- Julian Bugier : Et on va y revenir. On va y revenir, monsieur Badie.

- Caroline Roux : On y revient.

- Julian Bugier : On va y consacrer un chapitre.

- Caroline Roux : Le message est passé.

« Le message est passé » ? Vraiment ?

Le clou du spectacle intervient en fin d’émission. Alors que Bertrand Badie tente cette fois-ci d’apporter une mise en perspective historique en amorçant un propos sur la reconfiguration des jeux d’influences dans le paysage des grandes puissances et des acteurs locaux, il est interrompu au bout de 34 secondes. Et parce qu’il signifie de nouveau son agacement, le carton rouge est immédiat :

- Caroline Roux : Écoutez, je suis désolée...

- Bertrand Badie : Heureusement que sur LCI, ce n’est pas comme ça !

- Caroline Roux : Bah dis-donc ! Vous avez plus de temps ? C’est quand même incroyable de dire...

- Julian Bugier : Vous êtes sympa... Et vous avez eu sacrément la parole ce soir ! Pardon de le dire...

- Bertrand Badie : J’ai jamais pu finir une phrase.

- Caroline Roux : Est-ce que ça vous intéresse qu’on aille au Liban ? Est-ce que ça vous intéresse qu’on aille au Liban ? Pour parler des acteurs locaux ?

- Julian Bugier : On va aller au Liban. On va aller au Liban, près de Beyrouth.

- Bertrand Badie : J’essayais de faire une analyse.

- Caroline Roux : Vous l’avez livrée, pardonnez-moi.

- Bertrand Badie : Bah non, je ne suis pas arrivé au bout de ce que je voulais dire.

- Caroline Roux : Vous l’avez livrée avec beaucoup de pédagogie, et je vous en remercie. Mais j’aimerais qu’on aille au Liban. Parce qu’effectivement, tous les regards sont désormais tournés vers ce qui va se passer au Liban, au sud Liban, avec le Hezbollah.

Fermer le ban en décrétant que l’expression d’un interlocuteur fut pleine et entière... contre son propre avis : une pirouette journalistique performative bien connue, qui n’entérine pas moins l’écrasement de la pensée par la télévision. En outre, nous ne manquerons pas de nous souvenir qu’aux yeux de Julian Bugier, s’exprimer pendant 7 minutes et 29 secondes sur une émission d’1 heure et 22 minutes équivaut à avoir « eu sacrément la parole ». Un échange particulièrement représentatif de ce qui fut, à ce jour, la seule « émission spéciale » de France 2 sur la situation au Proche-Orient organisée en première partie de soirée. Et qui constitue une parfaite introduction à la quatrième critique que l’on peut formuler contre l’émission spéciale de France 2 : l’impression de cacophonie et l’impossibilité de débattre sont accentuées par la succession effrénée de thématiques, qui entravent toute discussion de fond.


« J’aimerais qu’on aille au Liban » : une succession de sujets sans cohérence


Massacres du 7 octobre, état d’avancement de l’offensive israélienne, état de la situation à Gaza, histoire du Hamas, perspectives politiques, corridor humanitaire, blocus de Gaza, otages israéliens, mobilisation des réservistes israéliens, souffrances liées aux attentats, situation au Liban, en Iran, etc. Une multiplicité d’angles et de sujets s’entremêlent tout au long de la soirée.

En théorie, la plupart des thématiques sont agrémentées d’un reportage, d’un direct ou d’un décryptage introductifs minimalistes (1 minute et 35 secondes en moyenne) censés cadrer le temps d’échanges du plateau. Dans les faits, chaque thématique est appréhendée « par le haut » et survolée, tant l’une chasse l’autre au bout de seulement quelques minutes – voire quelques secondes... Conséquemment, le prétendu « débat » n’existe pas, a fortiori quand certains sujets ne font l’objet que d’une simple évocation ou d’une adresse unilatérale, c’est-à-dire à destination d’un seul interlocuteur. À titre d’exemple, la question des perspectives politiques et d’une « solution à deux États » n’est posée qu’à David Khalfa... et traitée en 40 secondes ! Concernant l’histoire du Hamas – ses « objectifs », ses « soutiens », ses « moyens », etc. –, France 2 prétend éclairer le téléspectateur au gré d’un « reportage » d’1 minute 20 qui, évidemment, fait l’impasse sur l’implication et le rôle des gouvernements israéliens dans sa consolidation.

Autre exemple : au cours d’un direct d’1 minute 11, un envoyé spécial à Ramallah fait la part belle au langage journalistique automatique, en évoquant successivement un « regain de tensions et de violences », des « heurts entre Palestiniens et forces israéliennes », la « présence également d’éléments radicaux et on a vu dans certaines images, la présence aussi du drapeau du Hamas », la « montée de la popularité du groupe terroriste » et la « colère » ou « l’inquiétude » des habitants de Cisjordanie, sans qu’aucun témoignage ne soit donné à entendre. Ce direct indigent n’en reste pas moins auto-suffisant : en plateau, les présentateurs ne relancent pas leurs invités sur les enjeux pourtant cruciaux que cristallise le territoire occupé. Et pour cause : 1 minute et 11 secondes suffisent pour que Caroline Roux décrète qu’« on a parlé de ce qui se passait en Cisjordanie, on l’a vu dans ce qui vient d’être dit à l’instant, sur les images. » Avant d’introduire « la suite » : « C’est intéressant peut-être de parler de la rue arabe. » « La rue arabe », « la guerre des images »... Rien n’a de sens, mais les catégories fourre-tout se succèdent comme autant de cases à cocher : « Pardonnez-moi, moi, il y a quelque chose que je ne comprends pas. Est-ce que nous sommes en train d’assister à l’embrasement du monde arabe ? » s’impatiente Caroline Roux. « Voilà. C’est la question que j’allais poser ! », relance Julian Bugier. « Il y a l’Iran aussi. Il y a la question de l’Iran. On va en parler ! », s’emballe plus tard le présentateur. Temps d’échange sur « l’Iran » ? Deux minutes.

Las... Sans doute fallait-il penser cette « émission spéciale » autrement que sur le modèle d’un « C dans l’air » exceptionnel. Car que pouvait bien espérer France 2 d’un tel dispositif ? Informer ? On n’ose le croire : prétendre « informer » sur de tels événements en convoquant autant d’interlocuteurs, dont les statuts et les approches sont si hétérogènes, pour évoquer un si grand nombre de thématiques dans un temps aussi restreint et en tablant, de surcroît, sur un dénominateur commun de connaissances pouvant rassembler les téléspectateurs d’un prime time sur France 2 témoigne, au mieux, d’une douce illusion, au pire, d’une réelle incompétence. Inutile de préciser qu’à force de sauter du coq à l’âne, nombre de points essentiels furent évacués : à la faveur d’un présentisme exacerbé, aucune contextualisation historique du « conflit » ne vit par exemple le jour au cours de l’émission, en dehors d’une mention fugace du blocus de Gaza. Une gageure quand l’émission prétendait « mieux comprendre ses tenants et ses aboutissants ». De la même manière, n’ont strictement jamais été abordés, questionnés ni a fortiori critiqués les positionnements de soutien des puissances occidentales à l’État d’Israël, qu’il s’agisse de celui des États-Unis ou du gouvernement français.

Ainsi, si l’on ne sait ce qu’espérait précisément le service public, on sait ce qu’il aura réussi : avoir mis en scène un simulacre de débat, décousu et indigent au point qu’il est presque impossible de faire état, en bout de course, de ce que l’on en retient. Succession de sujets sans approfondissement, temps de parole réduits au maximum, interruptions incessantes des intervenants : France 2 a, comme de coutume, façonné un dispositif où la forme et les contraintes télévisuelles l’ont emporté sur l’information.


Arnaud Gallière et Pauline Perrenot

 
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Notes

[1Les intitulés des fonctions de chacun des intervenants sont tels qu’indiqués en bandeau par la rédaction de France 2 tout au long de l’émission.

[2Un échange entre les deux journalistes de France 2 et Christophe Gomart – interrompu pas moins de 5 fois en 1 minute 15 à propos des otages – offre un exemple caricatural du terrain particulièrement miné sur lequel sont censés s’exprimer les intervenants.

[3Dans la tradition de ses (innombrables) interventions médiatiques. Le présentateur Julian Bugier : « On va également accueillir Bernard-Henri Lévy, le philosophe, qui revient précisément d’Israël et qui va nous raconter ce qu’il a vu. Bonsoir Bernard-Henri Lévy, [...] c’est une émission, vous le savez, importante. Vous revenez, je le disais, d’Israël, et vous avez été dans les kibboutz de l’horreur. A Be’eri notamment, vous avez vu ces horreurs. »

[4Pierre Bourdieu, Sur la télévision, Raisons d’agir, 2008, p. 35.

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