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Les médias et les manifestations de Gênes

Gênes : sur le vif, JT du 21 juillet

Le journal de F3 s’ouvre par les "titres". Cela donne : " La manifestation de 20 000 manifestants a à nouveau dégénéré ". Et l’on commence évidemment par une séquence exclusivement consacrée à des images des affrontements, attribués à des " extrémistes ". Benoîtement, le présentateur affirme que si les manifestants voulaient défiler pacifiquement, " c’est une toute autre image que l’on retiendra " : celle-là même que la rédaction de F3 a commencé par nous présenter... pour que " on " ne l’oublie pas ! Suit alors un "direct", où le journaliste, ne sachant plus à quel point de vue se vouer, indique que la ville semble être " sous contrôle " (point de vue de l’ordre policier), avant de déclarer au passage : " On a l’impression [sic] que la violence est des deux côtés " (point de vue "objectif") et que les policiers ont eu recours à l’usage de la force " sans être dans de réelles situations de danger " (euphémisme à la fois critique et conciliateur). Le reportage qui suit nous invite à partager la journée d’une famille de Gênois qui, toutes générations confondues " participent à la manifestation " : du "vécu" sympathique qui n’apprend presque rien sur les raisons de la manifestation. Vient enfin le moment du pluralisme. Viviane Forester est interwievée "en plateau". Première question : " Que pensez-vous de la violence ? ". Viviane Forester parviendra, malgré tout, à faire entendre la défense du droit de manifester, la nécessité de contre-pouvoirs, l’existence d’une pensée antilibérale. Mais à peine, car il lui faut percer le brouillage imposé par le présentateur. Qui lui demande si les " images de casse " - que les médias diffusent complaisamment, F3 inclus - n’expliquent pas que " le message ne passe pas ". C’était dans la série : " on a vu et entendu pire... "

France 2 ouvre le journal de 20 heures sur... la victoire d’Armstrong dans l’étape du Tour de France : 2 mn 30 de reportage + 2 mn d’interview en direct de Jalabert. L’événement du jour est, bien sûr, l’événement du Tour, puisque France Télévision détient l’exclusivité de sa diffusion... On rêve d’une télévision - d’une télévision de service public - qui ne parlerait que d’elle-même, en parlant de ce qu’elle montre en exclusivité. Mais le créneau est déjà pris : cela s’appelle la publicité...

A l’ouverture du journal, nous avions eu droit à la présentation suivante : " A Gênes, nouveaux affrontements, mais aussi [sic] une manifestation pacifique ". Un naïf aurait peut-être attendu la formulation inverse !

Quand vient le moment de "traiter" le sujet, on entend le présentateur - Antoine Cormery - lire son prompteur : " La mort d’un jeune extrémiste n’a pas empêché de nouveaux affrontements ". Le message délivré par une phrase aussi stupide doit être subliminal. Celui qui n’a pas sursauté en l’entendant a gagné une exonération de la redevance ! Suivent des images d’affrontements, mais aussi d’une charge des militaires (et de ses résultats sanguinolents) : " Les forces de l’ordre veulent repousser tout le monde, sans distinction. Les militaires vont sur la plage chasser le moindre manifestant ". Repousser ou chasser ? C’était pourtant le bref reportage le plus éloquent... Enfin viennent quelques images de la manifestation (1 mn, à 20h13), et quelques propos de José Bové. Mais cela nous vaudra notamment ce commentaire d’Alain de Chalvron. Je cite de mémoire : " Le message des manifestants est plutôt bien passé. Mais il y a un paradoxe : plus le G8 va dans leur sens [sic], plus il est contesté ". Et pour couronner le tout, cet éloge : parmi les chefs d’Etat, " Chirac est le seul à prôner le dialogue ".

 
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