C’en est lassant. Chaque jour voit apparaître son petit lot d’informations bâclées adossées à des sujets convenus. Dernier en date : les examens universitaires passés en distanciel. On flaire déjà l’enquête passionnante : des étudiants filmés à leur domicile qui composent sur leur ordinateur et un journaliste, heureux de son reportage, qui vient s’enquérir de leurs impressions. Sauf que cette fois [1], devant la caméra de BFM-Lille, l’étudiant – en l’occurrence ici l’étudiante – n’est pas contente :
« Donc t’es là, tu te lèves, il est 8 heures, ton examen commence à 8h30. À 8h28, t’es comme ça (mouvement des mains tremblantes), tu te dis : ‘mon sujet il arrive quand ?’. T’es en panique, tu sais que tu as 40 minutes pour le rendre. Bon moi j’ai eu de la chance de pas avoir eu de bug d’internet mais j’ai pas mal de potes qui ont eu un bug internet ou qui n’ont pas reçu le sujet en même temps que nous. »
« Lille : des examens en ligne inéquitables ? » s’interroge le bandeau qui barre l’écran. Pour répondre à cette question, il eût été utile d’apporter un contrepoint. Mais la déclinaison locale de la chaîne de Patrick Drahi (11ème fortune française) n’en a peut-être pas les moyens ? Alors Acrimed, modeste association, va le faire à sa place.
La version des personnels administratifs de l’Université de Lille est bien différente : les étudiants ont tous bien reçus leur sujet sur la plateforme de l’université (Moodle) ainsi que par mail à 8h20 précises (soient 10 minutes plus tôt). Et si l’examen en question était en effet prévu pour durer 40 minutes, aucun devoir remis en retard n’a fait l’objet de la moindre sanction. De plus, les étudiants avaient été informés plusieurs fois avant l’examen et aucun n’a indiqué « ne pas avoir reçu le sujet en même temps que les autres ».
Le reportage continue. Une deuxième étudiante, doctorante cette fois questionne les conditions d’égalité devant les examens. Un questionnement tout à fait légitime, mais qui aurait, une fois de plus, mérité un contrepoint. Notamment lorsque l’étudiante indique que « certains étudiants qui passent leurs examens sur leurs téléphones portables, ils rédigent sur un téléphone portable ! » Selon l’Université de Lille, les étudiants qui ne pouvaient pas composer sur un ordinateur avaient toujours la possibilité de prendre leurs copies en photo. Une précision qui aurait été utile.
Bref, un nouvel exemple qui témoigne des libertés prises avec la rigueur journalistique élémentaire.
Mathias Reymond