Dans un article judicieux - "Industrie et médias : une dangereuse proximité" -, paru dans Le Monde daté du 14 avril 2002, Nicole Vulser relève (prudemment) : " La dangereuse proximité de groupes industriels avec les médias français peut parfois aboutir à des collusions rédactionnelles." Mais Nicole Vulser ne dit mot des risques du passage en Bourse de certain quotidien du soir...
Deuxième proximité dangereuse, justement soulignée : "Les pouvoirs économiques ne sont pas les seuls écueils auxquels sont confrontés les médias français. Le pouvoir politique joue encore un rôle important : même si le temps est révolu où le ministère de l’information contrôlait les journaux télévisés des seules chaînes publiques, le cordon ombilical n’est pas totalement coupé. " Mais Nicole Vulser ne dit mot de la fréquentation des allées du pouvoir par certains responsables de certain quotidien du soir.
Reste une dernière critique : " (...) sur un registre très différent, une autre spécificité franco-française fait l’objet d’attaques plus ou moins véhémentes : le cumul des fonctions, dans la presse et dans des émissions de télévision et de radio, par certains journalistes et éditorialistes très connus. Ce qui, notamment aux yeux du sociologue Pierre Bourdieu, aujourd’hui décédé, et de nombreux observateurs étrangers contribue à façonner une pensée unique véhiculée dans les médias hexagonaux. ".
Pour n’être pas véhémente, cette critique allusive de "certains journalistes et éditorialistes très connus" ... notamment du Monde, ne manque pas d’impertinence. Mais pourquoi ne mentionner que Pierre Bourdieu ? Parce qu’il est "aujourd’hui décédé" ? Ceux qui avec lui - comme Acrimed ou Pour Lire Pas Lu - et souvent avant lui - comme Serge Halimi - ont contesté ces indécents cumuls et leurs effets sont vivants. Mais Nicole Vulser ne pouvait pas citer les ouvrages et les critiques dont Le Monde n’a jamais rendu compte. Colombani se serait-il fâché ?
Première publication : 20 avril 2002.