En ce 18 mai, l’émission de France Inter « Affaires sensibles », animée par Fabrice Drouelle [1] était consacrée à « Hugo Chávez et la révolution bolivarienne ». S’il ne s’agit pas, ici, de revenir sur le contenu de celle-ci dans son ensemble, il convient tout de même de souligner la perpétuation d’un mensonge qui, décidément, a la vie longue…
Tout auditeur de France Inter a probablement eu l’occasion d’entendre au moins une fois la promotion de l’émission « Affaires sensibles », dans laquelle son animateur annonce fièrement : « Quand l’histoire éclaire l’actualité »…
En ce jour, Fabrice Drouelle se proposait donc de nous éclairer, à la lumière de l’histoire, sur « Hugo Chávez et ses 14 années d’expérience socialiste. ». L’ambition n’est pas des moindres, puisque, comme le rappelait la page de présentation du programme, il s’agissait de « […] tenter de comprendre ce qui s’est réellement passé durant ces 14 années de « Chavisme » et d’expérience socialiste. L’objectif est que chacun puisse se faire sa propre idée et se forger sa propre conviction ! »
Évidemment, prétendre revenir sur 14 années de régime, voire même sur ce qui les a précédées sur le plan historique, en moins d’une heure est une gageure, que même un journaliste mieux renseigné et plus consciencieux que Fabrice Drouelle, aurait du mal à soutenir. On notera, par exemple, que l’événement tragique du « Caracazo » [2], qui explique pourtant en partie comment un outsider comme Chavez a pu arriver au pouvoir quelque neuf ans après, a malheureusement été négligé… Mais passons.
La question qui nous intéresse particulièrement, c’est lorsqu’il est fait mention de la politique en matière de médias menée par l’ancien chef d’État vénézuélien. Dans cette perspective, nous ne pouvions faire autrement que de relever ce passage (à 31’44 du podcast) :
« En l’espace de quelques mois, sous l’impulsion du président Chávez, le Venezuela prend un virage socialiste radical. Malgré la contestation populaire, le gouvernement décide d’imposer plusieurs mesures fortes, à la symbolique politique non moins forte : d’une part, un contrôle des médias, on notera la fermeture d’une chaîne de radio-télé dont la ligne éditoriale faisait, selon les chavistes, le jeu de l’opposition […] » .
Du « contrôle des médias », l’auditeur avisé de France Inter ne saura pas grand-chose, si ce n’est la mention de la « fermeture d’une chaîne de radio-télé » . Cette chaîne dont il est question et que Fabrice Drouelle ne prend pas le soin de nommer, c’est RCTV (Radio Caracas Télévision). Or, comme nous l‘avions expliqué ici-même, RCTV n’a pas été « fermée » par Chávez. Sa concession n’a tout simplement pas été renouvelée ! Et le motif n’était pas simplement que « la ligne éditoriale faisait, selon les chavistes, le jeu de l’opposition », mais, comme le rappelait Le Figaro – que l’on peut difficilement suspecter de « chavisme » –, du 26 mai 2007, que « pendant des années, la chaîne a ouvertement conspiré contre le président en place en relayant les appels à renverser le régime. Lors du coup d’État du 11 avril 2002, le canal [RCTV ndlr] annonçait qu’Hugo Chávez avait démissionné et accepté que le dirigeant du patronat local, Pedro Carmona, assure l’intérim à la tête de l’État. En réalité, le président était maintenu au secret dans une île au large du Venezuela par des militaires putschistes. »
On peut lire, sur la page Internet de l’émission de France Inter, cette observation d’une grande sagesse : « Une chose est sûre : la personnalité et les idées d’Hugo Chávez suscitent toujours un vif débat parmi les intellectuels que ce soit en France ou à l’étranger. Et bien souvent, ce débat engendre avec lui dans la presse ou sur les plateaux télévisés des raccourcis historiques ou des amalgames maladroits ».
Et à France Inter : « raccourci historique » ou « amalgame maladroit » ?
Nils Solari