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Ukraine : les informations à retardement des JT de TF1 et France 2

par Blaise Magnin,

Difficile pour les téléspectateurs des JT des deux principales chaînes françaises de prendre la mesure, au cours des 48 premières heures, de la gravité de ce qui se passait en Ukraine.

Le 18 février, alors que les affrontements entre forces de l’ordre et opposants avaient repris et déjà fait plus de dix morts à Kiev, les évènements étaient relégués en milieu d’édition et évacués en à peine plus d’une minute dans les journaux de 20 heures de TF1 et France 2.

Sur la chaîne de Bouygues, après plus d’un quart d’heure et trois sujets sur les jeux olympiques, un sur la garde à vue d’un suspect dans « la tuerie de Chevaline », un sur la sécurité alimentaire et deux sur la recapitalisation de PSA, la situation à Kiev est traitée en 1’35 dans un sujet intitulé « Situation explosive en Ukraine ». À titre de comparaison, le sujet suivant, une « enquête dans les coulisses de l’entraînement des Femen » durera 4’11…

Sur France 2, ce soir-là, ce ne fut guère mieux. Il fallut attendre vingt minutes et six sujets (!) sur les jeux olympiques, un sujet et un direct consacrés à la « tuerie de Chevaline », deux sujets et une intervention en plateau de François Lenglet sur PSA, pour qu’enfin l’actualité dramatique en Ukraine… soit expédiée en 1’20.

Alors qu’on peut à la rigueur imaginer que ces deux rédactions aient pu être prises de court par la soudaineté de l’embrasement de la situation et n’aient pas mesuré immédiatement le tour dramatique qu’elle prenait, le lendemain, 19 février, alors que le bilan s’alourdissait et que la violence des affrontements ne pouvait plus être ignorée, la situation en Ukraine ne pouvait que se retrouver en ouverture des JT et son traitement approfondi.

Ce qui fut fait… de façon très relative. Sur TF1 tout d’abord. Dans le JT de 13 heures, ce n’est qu’après huit minutes consacrées aux jeux olympiques, à la douceur de l’hiver et aux assurances-vie, qu’on en vint à l’Ukraine avec un sujet de deux minutes intitulé « Les violences plongent Kiev dans le chaos » et un direct de 1’25 depuis la capitale ukrainienne. Si dans le 20 heures de ce mercredi 19 février, l’Ukraine fit l’ouverture du journal, le sujet ne fut traité qu’en 3’45 (avant de passer aux vraies actualités du jour : « Chevaline », les assurances-vie, etc.), et surtout sous un angle (« Calme relatif à Kiev ») quelque peu surprenant… Certes, le reportage précise bien que « les affrontements peuvent reprendre à tout moment  », mais lorsque l’on sait que le bilan était alors de plus de 25 morts et qu’il dépasserait les 50 victimes dès le lendemain matin, cette appréciation de la situation paraît un peu anticipée.

Sur France 2, le traitement fut moins expéditif – au moins dans le 13 heures. Mais dans les deux JT du jour, les téléspectateurs durent tout de même attendre près de dix minutes, le temps de dérouler l’actualité olympique, avant de savoir ce qui se passait en Ukraine. Il faut dire aussi que France Télévisions détient les droits de diffusion de ces jeux olympiques d’hiver, et que l’on comprend que les rédactions en chef n’aient pas souhaité galvauder ces images cher payées au prétexte que les linéaments d’une guerre civile agitent un pays aussi mineur que l’Ukraine !

Au-delà de ce choix plus que douteux de traiter l’actualité sportive avant la situation à Kiev, l’information fut correcte dans le 13 heures qui enchaîna quatre sujets pour une durée totale de plus de sept minutes. Le 20 heures, en revanche, fit à peine mieux que TF1 avec deux sujets et demi (le troisième consacré à la réunion franco-allemande sur le sujet ne durait que 20 secondes) traitant le tout en quatre minutes.

Il en fallut du temps pour que le nombre des médaillés, réels ou éventuels, mais français, n’efface pas presque complètement le nombre de tués en Ukraine !

Blaise Magnin

 
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