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Libération au secours du G8

Libération est ce bien étrange quotidien où coexistent des journalistes qui, plus ou moins souvent, essaient de décrire et de comprendre et des éditorialistes qui prescrivent et pontifient. On est parfois tenté de se demander si les premiers approuvent les seconds ou, plus simplement, les supportent. Question : la ligne éditoriale du journal se confond-elle avec ses éditoriaux ?

Ainsi, dans Libé du samedi 31 mai 2003, on peut lire un article, signé Vittorio De Fillipis et Christian Losson qui - sous le titre : « L’autre monde de VIG et Vaaag » essaient de saisir comment « Le village intergalactique et le village alternatif, anticapitaliste, et antiguerre veulent créer des espaces d’action et de réflexion ».

Mais on peut lire aussi un soutien à peine conditionnel au G8.

« Club en péril  » : c’est le titre de l’éditorial du jour de Patrick Sabatier, qui propose de se porter au secours de ce « club ».

Cela commence ainsi : « Le G8 d’Evian sera-t-il la dernière de ces réunions où les « maîtres du monde » prétendent régler en tête à tête les grands problèmes de la planète ? A Annemasse, où sont rassemblés les altermondialistes, on le souhaite ouvertement. A Washington aussi on y pense, sans le dire. « Faucons » américains et « alter » européens partagent méfiance et hostilité pour les instances multilatérales G8 mais aussi OMC, FMI ou Banque mondiale vecteurs de la mondialisation et piliers du multilatéralisme. ».

De la conclure que « faucons » américains » et « alters » européens poursuive le même objectif, il n’y a qu’un pas, qu’un simple adjectif interdit de franchir, du moins avec allégresse. Car les critiques des uns et des autres sont « opposées », glisse Patrick Sabatier au détour d’une phrase. Ouf !

Il n’empêche : « Les critiques, opposées, des altermondialistes et des unilatéralistes contre le G8 ne sont pas toutes infondées. (...) Mais la tentation d’en finir avec cet organe informel de gouvernance mondiale est à courte vue, comme l’est le rejet radical de la mondialisation. ».

Traduisons : puisque les extrêmes se rejoignent, éloignons nous des extrêmes.

Car l’éditorialiste de Libération qui a la vue longue le sait : « Le monde a besoin de renforcer le dialogue multilatéral, pas de l’affaiblir. Sauf à se plier à la loi, unilatérale, du plus fort. ».

Traduisons encore : nous n’aurions le choix qu’entre un « multilatéralisme » dont le G8, « organe informel de gouvernance mondiale », serait le garant » et l’unilatéralisme » dont le gouvernement des USA serait l’incarnation ». Pauvres altermondialistes : pourquoi perdre votre temps du côté d’Evian ?

Mais, après tout, que Patrick Sabatier géopolitise, c’est son droit le plus strict. Mais le fait-il au nom de la rédaction de Libération  ? C’est une question qui s’adresse aux journalistes de Libé.

Que Patrick Sabatier rejoigne la chorale des éditorialistes qui psalmodient à sens unique, c’est encore son droit. Mais pourquoi faut-il que nous subissions cette chorale envahissante ? C’est une question qui s’adressent à tous ceux qui pensent que le droit à l’information, c’est d’abord le droit à une information différente.

 
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