Accueil > Critiques > (...) > TV associatives : Des combats communs

Un débat d’Acrimed de mai 2003 (1)

Télévisions associatives : une longue marche inachevée

par Guy Pineau,

Le 22 mai 2003, notre association recevait dans le cadre des Jeudis d’Acrimed, Philippe Arnoud, fondateur de la télévision Ondes Sans frontière, pour un débat intitulé « La Longue marche des télévisions associatives ». Nous publions ici l’introduction proposée par Guy Pineau, suivie de la contribution de Philippe Arnoud : L’expérience d’Ondes Sans Frontières. (Acrimed)

La longue marche (inachevée) des TV associatives

5 points rapides pour introduire la question des TV associatives, médias alternatifs en France.

 1. Les TV associatives existent (on les rencontre depuis les années 70), mais elles peinent, en France, à émerger plus avant, confrontées à des résistances fortes, dont la situation structurelle du Paysage Télévisuel Français (public-privé = partage -inégal- de l’audience) est l’une des composantes les plus solides. De TéléSaugeais (jura) en 1978 aux télévisions actuelles à Paris et dans le reste du pays, diverses initiatives se sont développées, ont disparu, apparaissent et tentent de se pérenniser, en télé-brouette, télé-bistrot, télé hertzienne, télé sur satellite ou TV sur le câble... Au total, la déréglementation des années 80-90 a profité au secteur capitalistique sans prendre en compte, niant tout projet démocratique décentralisé, le secteur citoyen non-marchand.

 2. Pourquoi ce retard à l’allumage, comparativement aux autres pays (USA, Allemagne, Italie, Espagne, Belgique, Hollande etc.) ?

- Pour des raisons, historiques et politiques (le jacobinisme audiovisuel, sécurité, contrôle politique et social de la population, conception TV= voix de la France, etc.).

- Pour des raisons (mauvaises) de rareté des fréquences hertziennes, en voie de totale disparition avec la multiplication des réseaux
(numériques, Internet haut débit, Wifi etc.).

- Pour des raisons liées au modèle économique à faire exister et donc à des questions de financement (voir plus avant la question de la PQR et de la publicité, puisque le secteur de la distribution).

 3. Pourtant les TV associatives sans but lucratif (TSA) se battent pour exister au moment où sur le terrain de l’infranationale se développent des télévisions privées, commerciales, régionales-identitaires (TV Breizh), d’agglomération (avec les anciennes TéléToulouse et TLM à Lyon), des TV de pays (soutenues par la Datar) où la PQR cherche une entrée pour reconquérir une audience en baisse (vieillissement du lectorat, place plus importante de la culture de l’image...). La question de nouveaux monopoles locaux et régionaux se pose avec par exemple, " Le Progrès " du groupe Hersant (la Socpresse) en situation de monopole dans la région Lyonnaise (avec déjà, trois quotidiens sans compter toutes une série de périodiques) sur Télé Lyon Métropole, groupe présent sur la TV locale à Troyes et peut être à Nantes prochainement.

 4. Le contenu : extrême variété de contenu selon les situations et les projets. Une certaine contrainte consensuelle, plutôt " soft " lorsque le média local est en situation de monopole de fait en matière de TV locale (TéléMillevaches avec Le Magazine du plateau, ou certaines télévisions locales du câble, véritables télévisions locales de service public). Certaines autres télévisions peuvent être conduites, compte tenu de leurs soutiens locaux, à être plus dans l’arrangement que dans le dérangement. D’autres projets sont liés très fortement à des démarches socioculturelles (Télémaillebois à Longuenesse dans le Nord, ou Canal Nord à Amiens) et d’autres encore, se développent en projets alternatifs, voire activistes, avec des contenus en rupture avec la télévision dominante, faisant place à une contre culture et/ou du " public accès " sur le modèle " Offener Kanal " allemand (Cf. Zalea TV, et Ondes Sans Frontières que va évoquer Philippe Arnould).

L’attention portée aux programmes de ces télévisions associatives renforce le sentiment d’une extrême diversité, certains faisant preuve d’une créativité qui ne manque pas quelquefois d’inspirer les grands médias installés toujours à la recherche de " concepts " et " formats " nouveaux.

Notons enfin que le fonctionnement de ces TV associatives constitue un moyen d’accès aux métiers de l’audiovisuel, trop souvent soumis à une forte loi de reproduction sociale dans le milieu professionnel parisien.

 5. Après la reconnaissance en 81-82 des radios locales privées, et la création d’un Fonds de soutien à l’expression radiophonique, la loi du 1er août 2000 a reconnu aux associations loi de 1901 la possibilité de se porter candidates à l’attribution d’une fréquence nationale, régionale ou locale.

Cette disposition n’a pas été accompagnée d’un mécanisme de soutien financier (type FSER), d’un régime fiscal adapté, du "must carry" (afin, pour une chaîne, d’être réellement diffusée), et du traitement particulier de la responsabilité éditoriale, autant de mesures réclamées par les acteurs du secteur. Le premier rapport du gouvernement préconisant ces mécanismes est resté bloqué à Matignon, avant le changement de majorité du printemps 2002. La droite de retour au pouvoir a remis en chantier ce rapport qu’elle jugeait trop favorable aux TV associatives, ce texte doit être rendu publique dans les prochains jours. La longue marche des TV associatives n’est pas achevée.

Guy Pineau, pour Acrimed

Lire la contribution de Philippe Arnould : L’expérience d’Ondes Sans Frantières.

 
Acrimed est une association qui tient à son indépendance. Nous ne recourons ni à la publicité ni aux subventions. Vous pouvez nous soutenir en faisant un don ou en adhérant à l’association.

A la une

Nathalie Saint-Cricq dans Libération : une « pointure » et beaucoup de cirage

« Nathalie Saint-Cricq vote », et Libération vote Saint-Cricq.