Accueil > Critiques > (...) > Où va la presse écrite ?

Soutien à L’Humanité !

Il y a quelques jours, contraint par de lourdes difficultés financières, le quotidien L’Humanité a été placé sous protection du tribunal de commerce de Bobigny. Aujourd’hui, 30 janvier, ce dernier doit rendre sa décision concernant l’avenir du journal. Notre association Acrimed affirme tout son soutien au quotidien et à l’ensemble de ses salariés, engagés dans un combat essentiel pour le pluralisme. Un appel aux dons a été lancé dans le cadre d’une « mobilisation générale », dont nous reproduisons ci-dessous la déclaration, suivie du communiqué de la section syndicale SNJ-CGT du quotidien, et de celui du SNJ. Cette mobilisation débouchera sur une soirée de soutien le 22 février à la Bellevilloise (19-21, rue Boyer), à Paris.

« Mobilisation générale pour L’Humanité » : l’appel du quotidien

Depuis plusieurs mois, nous ne cessons d’alerter sur les lourdes difficultés financières qu’affronte l’Humanité. Nous n’avons ménagé aucun effort pour les surmonter. Les lectrices et les lecteurs se sont levés en masse. En quelques semaines, plus d’un million d’euros ont été collectés grâce à leur si précieux engagement. Une nouvelle fois nous remercions celles et ceux qui y ont déjà participé et ceux qui s’apprêtent à le faire.

Cependant, nos actions n’ont pas permis jusque-là d’atteindre nos objectifs. Nous avons continué de nous heurter au refus de la mise en œuvre du plan global élaboré sous l’égide de l’État depuis la fin de l’année 2016. Aucune banque n’a voulu à cette heure s’engager à nos côtés. Dès la fin de la période des états généraux de la presse en 2015, un million d’euros ont été retirés à l’Humanité au titre de quotidien à faibles ressources publicitaires quand d’autres y accédaient sans augmentation des budgets du ministère de la Culture et de la Communication. Ces éléments ont contribué à dégrader la trésorerie de l’Humanité, notamment durant l’été dernier, alors que nous continuions à nous battre pour mettre en œuvre ce plan global. Malgré nos tenaces efforts, jusqu’aux premiers jours du mois de janvier, rien ne s’est produit.

C’est dans ces conditions que l’Humanité a été placée sous protection du tribunal de commerce la semaine dernière. Celui-ci statuera sur l’avenir de l’entreprise lors d’une audience qui se tiendra mercredi 30 janvier. Nous plaidons la continuité de l’exploitation de l’Humanité.

Il ne s’agit pas d’abord d’un enjeu comptable. C’est une question politique de premier ordre qui interroge une société soucieuse de l’expression du pluralisme des idées, de la démocratie. Au moment où tant de débats et d’inquiétudes s’expriment sur les « fabriques » de « fausses nouvelles », laisser mourir l’Humanité reviendrait à affaiblir la presse de qualité et à assécher encore plus le débat contradictoire. Au moment où les médias connaissent une telle crise de confiance, l’engagement constant de l’Humanité aux côtés des travailleurs, des milieux populaires, des « invisibles », des penseurs qui contestent le système, des créateurs qui portent haut la culture constitue un atout pour le journalisme et un atout pour l’exercice de la citoyenneté.

C’est aussi un enjeu de souveraineté pour le pays au moment où plusieurs journaux nationaux viennent ces derniers temps d’être rachetés ou recapitalisés par des groupes industriels et financiers étrangers qui lorgnent sur des activités productives de la France.

Il existe un chemin pour que vive et se développe l’Humanité. Durant l’année 2018, le nombre d’abonnés à l’Humanité et l’Humanité Dimanche a progressé et les ventes en kiosque en novembre et décembre sont bonnes. Le nombre d’utilisateurs de la plateforme numérique progresse. La Fête de l’Humanité a été un succès populaire et culturel.

Nous appelons aujourd’hui à une mobilisation exceptionnelle pour réussir.

Une multiplicité d’actions de solidarité peut être engagée dans les villes et villages, dans les entreprises, dans les universités : collecte de fonds, débats, banquets de soutien, animations de rue, campagne pour faire découvrir nos journaux…

Nous lancerons dans les prochains jours une grande campagne d’abonnements de parrainage sous le thème « À chaque lectrice et lecteur son nouvel abonné » à l’Humanité Dimanche et à l’Humanité des débats du vendredi, pour deux mois au prix de 27 euros.

Nous proposons aux élus progressistes et républicains de contribuer à donner leur juste place à nos journaux dans les bouquets de presse des bibliothèques et médiathèques, comme dans les lieux d’accueil au public.

Nous appelons l’État à prendre de nouvelles initiatives pour défendre le pluralisme de la presse, à augmenter l’aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires, à ne pas démanteler les fondements de la loi Bichet de distribution de la presse.

Dès maintenant, nous plaçons l’Humanité sous protection populaire et citoyenne.

Dans ce cadre, une grande soirée de mobilisation et de solidarité pour l’Humanité aura lieu le vendredi 22 février à la salle la Bellevilloise, à Paris. Une multitude de personnalités ont déjà annoncé leur participation en faveur de cette mobilisation.

Une grande bataille pour sauvegarder et développer l’Humanité doit s’engager. Une des composantes historiques de la presse française ne saurait disparaître.

Patrick Le Hyaric, directeur de L’Humanité


« Mobilisation pour L’Humanité » : le communiqué de la section SNJ-CGT de L’Humanité

Saint Denis, le 26 Janvier 2019

L’Humanité est un bien précieux. Précieux pour les citoyens pour comprendre le monde et avoir les moyens de le transformer. Précieux pour ceux qui souffrent de l’oppression. Précieux pour ceux qui luttent au quotidien contre les injustices, les inégalités et les discriminations. Un bien précieux qui occupe une place singulière, celle du dernier quotidien indépendant des grands groupes.

En 2019, ce bien précieux est en danger comme jamais. Les mutations technologiques dans la presse, le changement des habitudes de lecture mais aussi le besoin d’innovation éditoriale exigent des moyens.

Devant l’impossibilité de faire face à d’importantes difficultés financières, l’Humanité s’est placée sous protection du Tribunal de commerce de Bobigny. Une audience aura lieu le 30 janvier pour décider de l’avenir de l’entreprise et d’une procédure de continuation de l’exploitation.

Nous sommes convaincus que notre journal joue un rôle singulier dans le paysage médiatique.

Les salariés de l’Humanité savent ce qu’ils doivent aux lecteurs et à leur soutien indéfectible. Nous sommes résolus pour notre part à nous battre pour que le journal fondé par Jean Jaurès continue de remplir sa mission en 2019. Ce sont de nouveaux défis qu’il nous faut relever. Nous y sommes prêts. Mais le pluralisme de la presse est un enjeu démocratique, et l’État doit prendre ses responsabilités pour l’assurer. Nous sommes convaincus que notre journal joue un rôle singulier dans le paysage médiatique.

Chaque jour nous avons à cœur de faire entendre cette voix singulière et de la faire vivre avec nos lecteurs. Aujourd’hui, l’Humanité a besoin de la mobilisation de tous. Nous appelons tous ceux qui sont attachés aux valeurs démocratiques et républicaines, tous ceux qui portent haut les valeurs de justice sociale à se joindre à nous pour écarter les menaces.

Souscrivez, faites un don, abonnez-vous ou abonnez vos proches, achetez nos journaux en kiosque, partagez ses articles et vidéos sur les réseaux…

Et venez nombreux porter cette voix lors des Six heures pour L’Humanité, le 22 février à la Bellevilloise.

Comme toujours, notre nombre fera notre force.


« L’Humanité est un bien commun » : le communiqué du SNJ

Le tribunal de Commerce de Bobigny doit se prononcer ce mercredi sur l’avenir de la Société Nouvelle du journal L’Humanité. Pour le Syndicat national des journalistes, et notamment sa section syndicale implantée à L’Humanité, la voie de la continuation de l’activité, défendue par la direction comme par les représentants des salariés, doit être l’occasion d’un sursaut collectif qui permette la construction d’un modèle économique et éditorial innovant pour le journal de Jaurès.

Premier syndicat de la profession, le SNJ soutient la démarche et le combat des salariés, déterminés à sortir L’Humanité d’une logique de survie permanente, pour enfin lui permettre de bâtir et consolider sa pérennité. Alors que les plans stratégiques accumulés ces dernières années par la direction du journal, axés sur la baisse continue de la masse salariale et des moyens alloués aux reportages, n’ont pas trouvé les débouchés escomptés, seule l’ambition d’un enrichissement éditorial, par l’amélioration des contenus et de la diffusion, rendra L’Humanité plus indispensable encore au débat démocratique.

Autant de chantiers qui ne peuvent se passer d’une réflexion commune à l’ensemble des équipes de L’Huma, trop peu consultées jusqu’ici, mais qui doit aussi s’ouvrir aux énergies extérieures. L’afflux de témoignages de soutien ces derniers jours le démontre : une réelle recapitalisation populaire, qui dépasse le simple appel aux dons, est possible.

L’Humanité jouit d’une sympathie et d’un engagement à nuls autres pareils de la part de ses lecteurs, qu’ils soient militants politiques, associatifs, intellectuels, artistes ou simples citoyens attachés au pluralisme des médias. A travers le statut d’entreprise solidaire de presse que le journal a adopté depuis 2016 ou via d’autres canaux à inventer, ces amis et ces soutiens de L’Humanité auraient toute leur place comme actionnaires du journal, afin de mettre enfin réellement et durablement le journal sous protection populaire.

Sans dédouaner l’Etat qui, à travers un régime d’aides à la presse rééquilibré revendiqué par le SNJ, doit préserver et développer le pluralisme, il s’agit de générer une dynamique collective permettant d’apporter les fonds nécessaires à la survie de L’Humanité, et de garantir un meilleur partage du pouvoir entre les propriétaires d’un titre qui, dans les faits, n’appartient à personne, ou mieux : il appartient à tous ceux qui veulent croire toujours à l’émancipation collective, à la justice sociale et à la paix dans le monde. Fondée par Jean Jaurès en 1904, L’Humanité n’est pas qu’un monument en péril du patrimoine de la presse française et mondiale. L’Humanité est un bien commun.

Pour soutenir L’Humanité :
 Participez à la souscription
 Abonnez-vous
 « Six heures pour L’Humanité », rendez-vous à la grande soirée de soutien organisée le vendredi 22 février à la Bellevilloise (19-21, rue Boyer, Paris 20e), à Paris.

 
Acrimed est une association qui tient à son indépendance. Nous ne recourons ni à la publicité ni aux subventions. Vous pouvez nous soutenir en faisant un don ou en adhérant à l’association.

A la une

France Inter, Sciences Po et la Palestine : « nuance » ou calomnie ? (3/3)

Comment France Inter défigure un mouvement étudiant.