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Les éclaireurs du peuple (1) BHL-Moi-Je

Nos majestés éditoriales et intellectuelles - petits éclaireurs du peuple - ne pouvaient pas se dispenser de diffuser leurs lumières. Avant, pendant et après les élections. Avant, ce ne fut que confidences et avertissements. Après le « séisme », ce fut le « raz-de marée » : dans toute la presse, dans toutes les émissions, sur toutes les tribunes, les importants glosèrent d’importance. Ce qui suit est donc le résultat d’un "tri sélectif" (comme on le dit des déchets...)

« Avant de partir pour Kaboul... » - c’est le titre - Bernard-Henri Lévy (Le Point du 15/02/02, n°1535, page 114) nous annonçait dans les premières lignes de son "Bloc-notes", un terrible combat :

« Chirac en campagne. L’affrontement, dit-on, sera dur. Je crois surtout qu’il sera physique. Presque athlétique. Corps contre corps. Deux corps, autant que deux discours, lâchés l’un contre l’autre. Mission afghane oblige, je ne serai pas là pour le voir, c’est dommage. »

Pour mémoire : c’est sur la même page que l’on pouvait lire une condamnation définitive de Pierre Bourdieu et un gémissement narcissique de Moi-Je attristé d’avoir dû « annuler, pour cause de mission afghane, un voyage à Jérusalem ».

De retour de Kaboul, le même BHL, toujours éploré (dans Le Point 19/04/02, n°1544, page 130), s’inquiétait, toutes affaires cessantes, de la progression des « deux extrêmes »

« L’événement de la campagne ? La percée, non pas, comme on dit, des ’petits candidats’, mais bien des deux extrêmes. Sur Le Pen, sur sa démagogie, sa vulgarité, l’insulte à l’esprit de la démocratie qu’est la moindre de ses apparitions, tout a été dit. Le problème, en revanche, c’est Laguiller. Comment 10 %, peut-être plus, des électeurs peuvent-ils s’apprêter à voter pour une organisation semi-clandestine, dont on ne connaît ni les dirigeants, ni les ressources, ni le programme ? Qui sont ces 10 % ? Est-il vrai (sondage CSA-Marianne, 4 mars 2002) que près de la moitié des électeurs du Front national se déclarent " proches " de leurs idées ? Est-ce un vote frivole ? Un pur effet de mode ? D’où vient que tant de démocrates, à droite autant qu’à gauche, du côté de Miss France autant que des bobos en mal de radicalité, aillent partout répétant " Arlette, je vote Arlette ", car " voter Arlette " c’est " voter sympa " ? D’où vient que tant de prétendus non-conformistes tombent dans le panneau de la seule responsable politique, avec Le Pen, qui ait osé déclarer " Bush-Ben Laden, même combat " ?

Vient alors l’utilisation des insinuations du quotidien de référence (voir Le Monde veille sur Lutte ouvrière)

« Pourquoi tant d’indulgence à l’endroit d’une candidate qui peut, lors de telle fête de Lutte ouvrière, accepter un stand où l’on vend " Auschwitz ou le grand alibi " (Le Monde du 19 mars) ou, en marge de tel meeting, tolérer la présence d’un ténor du négationnisme (Pierre Guillaume distribuant, le 17 mars, à l’entrée de la Mutualité, la dernière livraison de La Vieille Taupe) ? »

Et cette leçon s’achève ainsi :

« Pour ma part, je vote Jospin. Sans passion - mais je vote, dès le premier tour, Jospin. Et je n’ai, à dire vrai, qu’une crainte : le voir, tout au souci de la course aux " voix d’Arlette ", être tenté de durcir le ton et de tourner ainsi le dos à ce " blairisme à la française " qui est, pour la gauche, la seule issue.  »

Quand vint le « séisme », BHL-Moi-Je se dépensa sans compter : on le vit papoter ave Jean-Marie Colombani, dans l’émission de Guillaume Durand sur France 2, on le lut avec passion dans Le Point, on l’entendit pérorer au Bataclan et dans un meeting de François Bayrou à Marseille. ..

... Et accorder un entretien philosophique à Karl Zéro, dans son émission du 24 avril 2002.

Extraits (avec PLPL) :

- Karl Zéro : « Bernard Henri Levy, le philosophe qui exporte nos valeurs universelles sur les fronts de Bosnie et d’Afghanistan. là il est de retour au bercail parce que visiblement il y a encore du boulot en France. En ces temps où les chemises noires sont malheureusement furieusement tendance place à la chemise blanche la plus célèbre de notre pays. »
- Zéro : « (...) Pour qui t’as voté dimanche dernier ? »
- BHL : « J’ai voté Jospin. »
- Zéro : « Bravo, ce n’est donc pas à toi que l’on doit l’apparition du FN. »
- BHL : « Non, d’abord parce que je ne me suis pas abstenu, ensuite parce que j’ai pas voté comme tout un tas de bobos Laguiller ou Besancenot. J’ai vu tellement de bourgeois autour de moi qui ont voté pour l’un et pour l’autre parce qu’ils les trouvaient sympas ou parce qu’ils les trouvaient émouvants, ou parce qu’ils voulaient une offre différente, ils confondaient les élections avec Canal Satellite, c’est vraiment de cet ordre, on n’en serait pas là s’il n’y avait pas eu ces réactions frivoles, de zapping politique. »

(...)

- BHL : « Pour moi ce que représente le FN, c’est vraiment l’horreur absolue, cet espèce de saloperie glauque, cet espèce de boufissure politique, cette haine, cette bêtise surtout, cette bêtise à front de bœuf »

(...)

- BHL : « Ceux qui comme Arlette Laguiller nous disent, c’est du pareil au même, entre un républicain et un facho c’est blanc bonnet et bonnet blanc, ceux là sont vraiment des salopards. »

 
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