Communiqué de presse 8 avril 2003
La FIJ qualifie les attaques contre les journalistes en Irak de "crimes de guerre" ne pouvant rester impunis
Appel à une enquête internationale indépendante relative à la prise pour cible des médias et à l’assassinat de reporters
La Fédération Internationale des Journalistes accuse aujourd’hui les deux parties belligérantes du conflit irakien de " crimes de guerre " suite à une série d’attaques visant des journalistes et à la mort d’employés des médias. La FIJ demande que soit menée une enquête internationale indépendante après l’attaque de l’hôtel où logent les journalistes à Bagdad et après que les troupes nord-américaines aient, paraît-il, détruit les bureaux des télévisions Al Jazeera et Abu Dhabi.
"Il ne fait aucun doute que ces attaques pouvaient être dirigées contre des journalistes. Si c’est le cas, il s’agit de graves et sévères violations du droit international," a déclaré Aidan White, Secrétaire général de la FIJ. "Bombarder les hôtels dans lesquels logent des journalistes et prendre pour cibles les médias arabes sont des événements particulièrement choquants dans une guerre menée au nom de la démocratie. Les responsables doivent être traduits en justice".
La FIJ condamne au même moment la tactique des Irakiens qui consisterait à utiliser des civils et des journalistes comme "boucliers humains" en cas d’attaque. "Les autorités de Bagdad sont autant coupables, étant donné le peu de cas qu’elles font des vies civiles", a déclaré Aidan White.
D’après la FIJ, 11 journalistes et employés des médias sont morts dans cette guerre jusqu’à présent. Les derniers tués ou blessés ont été victimes de l’avancée des forces américaines dans Bagdad. Des explosions ont touché aujourd’hui l’Hôtel Palestine à Bagdad, hôtel où résident les journalistes étrangers, blessant au moins quatre d’entre eux travaillant pour Reuter. Peu de temps avant l’attaque, les bureaux de la télévision Al Jazeera ont volé en éclats, tuant un journaliste et blessant un de ses collègues.
"Alors que le régime irakien avait joué au chat et à la souris avec Al Jazeera, en les bannissant dans un premier temps puis en les autorisant à rester, l’ironie des faits est cruelle s’il apparaît qu’ils ont été attaqués par des forces américaines", déclare Aidan White. Selon la FIJ, il ne s’agit là que d’une atroce répétition de la destruction des bureaux d’Al Jazeera à Kaboul par les forces américaines durant la guerre en Afghanistan. "Il est impossible de ne pas voir de sinistre similitude dans le choix des cibles" ajoute Aidan White.
"Nous attendons toujours une explication satisfaisante au sujet de l’attaque à l’encontre de l’équipe d’ITN au début de la guerre, durant laquelle nous pensons que trois de nos collègues ont été tués", a déclaré Aidan White. Selon la FIJ, le témoignage d’une personne ayant vu la scène accuse les Etats-Unis d’avoir délibérément tiré sur des véhicules clairement identifiables comme appartenant à une équipe de télévision.
"L’administration des Nations Unies et la communauté médiatique internationale doivent s’engager pleinement à enquêter sur ce qui s’est passé et des mesures doivent être prises pour que cela n’arrive plus jamais," a dit Aidan White. "Nous pouvons nous attendre à ce que les militaires nient avoir agi avec préméditation mais ce que nous voulons, c’est la vérité."
Selon la FIJ, la communauté médiatique mondiale, dont les journalistes, les organisations de médias et les associations luttant pour la liberté de la presse, devrait unir ses forces sous la bannière de l’Institut international pour la sécurité de la presse (International News Safety Institute-INSI), récemment mis sur pied, pour mener une enquête complète et approfondie. L’INSI est un groupement de plus de 100 organisations menant campagne pour un programme mondial de sécurité pour la presse.
"Vous ne pouvez pas vous battre pour la démocratie en faisant verser le sang des journalistes et employés des médias", ajoute Aidan White. "Peu de choix est laissé aux médias et aux journalistes dans la couverture de cette guerre — c’est la première fois qu’un conflit est couvert en temps réel — et leur protection, qu’elle soit soumise à encadrement ou pas, est d’une importance capitale."
La FIJ estime que les réglementations internationales doivent être revues dans l’immédiat après-guerre afin d’essayer d’améliorer les niveaux de protection des journalistes et des employés des médias. "Cette guerre est le conflit le plus exhibé à la télévision de toute l’histoire ", a déclaré Aidan White, "mais en comparaison, la protection accordée aux journalistes et aux employés des médias est tout simplement d’un autre âge ".
La FIJ représente plus de 500.000 journalistes dans plus de 100 pays.
(8 avril)