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Puisque nous sommes tous américains... (3)

Haro sur l’ennemi intérieur : « l’antimondialisme »

Le lendemains même des attentats du 11 septembre, « l’antimondialisme », comme ils disent bénéficia de toute l’attention des commentateurs, effarés de sa coupable complicité avec les auteurs des attentats, réconfortés par la promesse de son inéluctable déclin. Et derrière le spectre de « l’antimondialisme », l’hydre de « l’antiaméricanisme » …

"Antimondialisme" : l’ennemi est dans nos murs

Un florilège de déclarations fracassantes

Titre mis à part - "Les antimondialisation redoutent d’être piégés par l’"union sacrée" " -, l’article de Caroline Monnot, dans Le Monde du 14 septembre (p. 21) apporte d’utiles informations. Il faut dire que l’amalgame des "-ismes" bat son plein.

 Philippe Chalmin, professeur à Paris-Dauphine, sur France Inter, le 12 septembre émet "l’hypothèse" d’une corrélation entre les mouvements contre la mondialisation libérale et les attentats. "Hypothèse" qu’il confirme au Monde : "Il y a eu tout un terreau où l’on a mélangé antimondialisation et antiaméricanisme" et même "antisémitisme". (d’après l’article cité) ;

 Jean-François Revel, de l’Académie française, tout en finesse : "Les primates vociférateurs et casseurs de l’antimondialisation, en déshérence de maoïsme, s’en prennent en réalité à l’Amérique, synonyme de capitalisme. Cette obsession aboutit à une véritable déresponsabilisation du monde. (...)" (Le Point, 13 septembre 2001) ;

 Max Clos, dans son Bloc-Notes, tout en nuances : "En France José Bové fait arracher les cultures censées être OGM (sic) par ses partisans, sous l’oeil bienvaillant des gendarmes (re-sic), il "démonte" les Mc Do, sous prétexte de combattre la mondialisation. Ce n’est pas la même échelle que les attentats de New York, certes, mais cela procède du même esprit " (Nous soulignons). On trouve ça dans Le Figaro du 14-09, page 20.

La loi de l’amalgame est dure, mais c’est la loi !

 Dans Le Figaro économie (13/09, p. XII), on peut lire cette déclaration, qui témoigne d’un prodigieux effort de lucidité : " En s’attaquant à un tel symbole [Le World Trade Center], les terroristes rejoignent (sic) le discours des anti-mondialistes dont la parole est devenue omniprésente (re-sic) pour dénoncer la tyrannies consumériste. Cet acte rappelle à sa manière que l’oppression dont souffrent certains pays est aussi [sic, encore] de nature économique " (Jean-Christophe Alquier, directeur général de Harrison & Wolf Corporate).

 Alain-Gérard Slama, dans son éditorial du Figaro Magazine : " (...) C’est le communautarisme sectaire, ethnique et identitaire, qui prend aujourd’hui le relais du marxisme-léninisme (...) C’est une synthèse du communisme et du fascisme (...) Depuis les poseurs de bombes antimondialistes qui tuèrent l’an dernier la jeune employée d’unMcDonald’s breton jusqu’aux organisateurs du nouvel Pearl Harbor se dessinent les contours d’une même internationale de la haine". On trouve ça dans Le Figaro Magazine du 15 septembre, p.7.

 Guy Sorman, dans son bloc-notes du Figaro entreprises (Cahier Enquêtes) du 17 septembre (p.3), s’interroge : "Fin de l’antiaméricanisme ?".

Et répond : "Un certain antiaméricanisme, celui qui conduisait à diaboliser les produits américains et à recourir à la violence, paraît difficile à poursuivre. On pense évidemment aux OGM et aux fast-foods. Un Bové détruisant un McDonald’s pouvait prêter à sourire ; dorénavant qui en appellerait une autre serait insoutenable".

A la "une", ce chant d’espoir est présenté ainsi : "Pour l’économiste, l’antiaméricanisme est peut-être mort mardi dernier". (Première publication : 14, 16 et 17-09)

 Enfin : l’oeuf d’où naquit le bœuf. Sur Europe 1, le dimanche 16 septembre 2001, Florence Belkacem, journaliste, interroge Bernard Cassen, président d’Attac-France .

Question :
" Qu’est ce que vous répondez à ceux qui disent : qui vole un oeuf, vole un boeuf. Je traduis : Qui arrache un pied de maïs transgénique est capable un jour, on ne sais pas, de poser une bombe ? " (Première publication : 03-10)

Une analyse complexe et approfondie

The Wall Street Journal Europe, 24 Septembre 2001, Editorial : " " Adieu Seattle ? "

« Remember the antitrade demonstrators ? They were the top item in the news before terrorists attacked the World Trade Center. Now they have receded to the netherworld where we have tucked all the things that seemed important then.

It is too early to tell whether the events of Sept. 11, and the preparations for all-out war against terrorists and those who harbor them have finished with the antiglobalization movement. But at least some perspective will now come into the picture. Now that civilization has come under attack and thousands have lost their lives, those who flout the rules of democracy will be met with less toleration.

This is not an argument for banning demonstrations or expressions of dissent, only an appeal for regaining the strength of our belief in democracy. Indeed, it should primarily — or even exclusively — fall upon civil society to draw the boundaries. The press, academia, and businesses will be less inclined to give the bored youths who participated in the riots a free ride.

In democracy you argue your case as strenuously as your eloquence and the basic strength of your ideas will allow. You hope to convince others of your view so that you can gain power at the voting booth and so order society accordingly. Those who destroyed the World Trade Center in New York and damaged the Pentagon in Washington despise this system, and want to impose theirs by force. The priority now is to beat them, so they do not beat us.

The antiglobalization protesters that trashed Seattle, Prague, Goteborg, Genoa and other cities cannot be equated with the terrorists, since their acts were on a totally different level of seriousness. But in one important sense they had something in common. They shared their intolerance of the accepted norms of democracy.

Antiglobalization was a total loser at the polls. Parties that espoused those views gained only a tiny fraction of votes : Ralph Nader in America won less than 5% support last year ; in Europe, if one throws Greens and Communists together (only an approximation of those who might support the goals the Seattle movement) they rarely get much more than 10% or 12% put together in any of the major democracies. And yet they wanted to impose their anticapitalist views on the rest of us.
If you think we’re being impolite in pointing out the similarities then we should hasten to add that we’re merely the conduit. In the trendy Paris newspaper Liberation yesterday a pro-protest writer had this to say about the crossroads between the movement that was born in Seattle on Nov. 30, 1999 and what happened on Sept. 11 :

"In both cases imperialism was the enemy. Oppression was the target. In both cases also American economic hegemony was targeted. Alas, Sept. 11 has brusquely made us forget Nov. 30. Terrorism has won over civil disobedience. A religious war over a lay revolt. The clash of civilizations has erased the new class struggle. Braudel has won over Marx, who was being born again, more humbly, but has now died a second time."

These words, and others like them, speak for themselves. We would, however, like to quibble with a point made by the Liberation writer : that the antitrade struggle was about civil disobedience. Surely the majority of the demonstrators appeared not to have engaged in the trashing of the cities. But it would be quite forgetful indeed not to recall that anticapitalists who did use violence to attack property, such as the Frenchmen Jose Bove, were embraced without hesitation by the great majority of the demonstrators.
So much was violence in the fabric of the movement that, as Peter Beinart wrote last week in the U.S. magazine the New Republic, postings to a site popular with the antiglobalizers, www.urban75.com, justified the attack in some way or even wondered if the terrorists had come from within their ranks. One of the protest organizers, the Mobilization for Global Justice, even called for demonstrators to seize Washington, D.C. and "reclaim the capital of the United States as a liberated zone."
The evidence is in, then, that these protesters shared some of the ends of the terrorists, even if not all were violent. But now things have changed. Democratic societies will be less tolerant of such violence in the future. We hope the antiglobalization protesters who have in the past used violent means to attack authority and institutions have all heard the message. "

From The Wall Street Journal Europe (Source : PLPL)

" Anti-mondialisme " : L’ennemi est sur la défensive

 Dans le Figaro du 19-09 (p. 11), ce titre : « Pour les membres d’Attac, "rien n’a changé" ». Mais quand on lit l’article, on découvre qu’il s’agit d’une très étrange interprétation d’un propos de Bernard Cassen qui déclare : "On va continuer à se battre par le dialogue, par la construction d’un rapport de forces, par des manifestations. Rien a changé.". Un phrase qui change tout. Reste le titre du Figaro

Le Figaro qui trouve que "le jour même de la réouverture de la Bourse de Wall Street", (...) une "réunion ayant pour thème la création d’une taxe Tobin en Europe pouvait paraître surréaliste". Sacré Figaro ! (Première publication : 18-09-2001)

 En chapô de l’éditorial de Jean Daniel (Nouvel Observateur du 13 septembre), cette prophétie (extraite de l’article de l’oracle) : "Après la catastrophe de mardi, les Européens vont se sentir orphelins. Les débats sur l’antiaméricanisme vont devenir frivoles. Et une grande partie des manifestants contre la mondialisation vont être conduits à regretter les institutions internationales". (Première publication : 18-09)

 Lors de l’émission L’esprit public de France Culture, le 23 septembre 2001, un autre prophète, Jean-Claude Casanova se rallie sans effort à la cause américaine : " Il y a une preuve aussi que l’opinion européenne est très favorable [aux États-Unis], c’est que tout ce qui est antiaméricain dans l’opinion est extrêmement discret. Les gens qui disent " le mondialisme, c’est l’hégémonie américaine ", on ne les entend plus, les gens qui disent " l’Empire américain ", etc. Et tout l’antiaméricanisme latent avec ses différentes formes dans les pays européens, s’est incontestablement dissous. " (Première publication : 03-10- 2001 - avec PLPL)

 Dans Les Echos, 21-22 septembre 2001 : " Depuis les attaques terroristes subies par les Etats-Unis, les mouvements anti-mondialisation sont sur la défensive, confrontés au début de procès qui leur est fait d’avoir nourri un ressentiment contre l’Amérique et d’avoir contribué à la montée de certains extrémismes. "

 Dans Le Point, 28 septembre 2001, p. 77-78 : " Attac sur la défensive ", titre le journal pour un article d’Irène Inshaupé, qui constate, avec un rien de condescendance apitoyée, que " Le millier de militants antimondialisation réunis à l’appel d’Attac Belgique ne supportent aps d’ëtre soupçonnés d’antiaméricanisme et daibolisés de ce fait par leur adversaires ". Et de pousuivre : " Pour Attac, l’engagement militant est aujourd’hui brouillé ". Et de se réjouir d’une déclaration prêtée, hors contexte, à Pierre Tartakovski : " Le risque que nous disparaissions n’est pas nul ".

 Dans le Financial Times, 23 septembre 2001, James Harding s’interroge : " What will happen to anti-globalisation protests ? " " For now, anti-globalisation activism is silenced. The mass demonstrations in Washington next weekend to coincide with the annual meetings of the World Bank and International Monetary Fund were cancelled even before the meetings were called off. After the destruction of the icons of Wall Street, being anti-capitalist looks dangerously like being anti-American. But critics of corporations and corporate-led globalisation will not go away. Their networks have many members and financial backing. The internet, which helped activists organise and inform millions, is at their disposal. And they believe that issues of global capitalism, inequality and participatory democracy are more important than a fortnight ago. "

 Et pour finir, cette merveilleuse question posée par Le Nouvel Observateur à Susan George (sous le titre : " Ajouter des massacres aux massacres, Je refuse ! ") : " Le mouvement anti-mondialisation est-il piégé à l’heure où l’antiaméricanisme est taché de sang ? " Le Nouvel Observateur, 27 septembre 2001. (Première publication : 03-10 - Avec PLPL)

 
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