Du côté des journalistes, des éditocrates et de leurs œuvres
- La Provence perd son procès en diffamation contre Mediapart – C’est un revers pour la direction du quotidien régional. Dans un article, Edwy Plenel, président de Mediapart, rappelle les faits : « Franz-Olivier Giesbert, et son PDG, Jean-Christophe Serfati, poursuivaient Mediapart pour diffamation et injure publiques à raison d’un article de Laurent Mauduit, paru le 21 novembre 2019, sur les relations du quotidien marseillais, propriété de Bernard Tapie, avec la candidate LR à la mairie avant les municipales de 2020. » Et conclut : « Selon le tribunal, notre article est conforme au principe de liberté d’expression : son sujet relève de l’intérêt général, à savoir la question de l’indépendance des élus locaux, repose sur une base factuelle sérieuse, est rédigé avec prudence et sans animosité personnelle. » L’éditocrate Franz-Olivier Giesbert [2], à l’origine de cette plainte, aurait depuis été poussé vers la sortie du journal...
- France Télévisions condamnée aux prud’hommes pour ses pratiques – 680 contrats à durée déterminée : c’est ce qu’a enchaîné l’ancien « chroniqueur mondain » de l’émission « Télématin » Henry-Jean Servat entre 2006 et 2019. D’après Le Parisien, « la justice vient donc de les requalifier en CDI, ce qui lui garantit d’importantes indemnités, notamment pour "licenciement sans cause réelle et sérieuse". Montant du chèque que le service public est condamné à lui verser : plus de 134 000 euros. "Après cette décision, nous espérons que France Télévisions mettra fin à ces pratiques", commente son avocat Me Jonathan Bellaiche. Contactée, la direction du groupe audiovisuel n’a pas souhaité faire de commentaire. » Une vieille habitude [3]...
- Départs en pagaille dans les médias Bolloré – Suite à sa prise en main par le groupe du milliardaire Vincent Bolloré, les journalistes vedettes Thomas Sotto et Patrick Cohen ont annoncé leur départ de la radio Europe 1 [4]. Tout n’est pas perdu pour ces deux figures bien connues des lecteurs d’Acrimed [5] puisque le premier a trouvé refuge à France Inter, tandis que le second est parti sur France Culture. Au sein du groupe Canal+, également propriété de Vincent Bolloré, c’est le chroniqueur football Pierre Ménès qui a annoncé son départ suite à des accusations d’agression sexuelle [6]. D’après Le Monde, Pierre Ménès aurait trouvé un accord financier « confidentiel » mais probablement juteux avec Canal+. Enfin c’est la présentatrice Hapsatou Sy qui a annoncé fuir définitivement Canal+, qu’elle accuse de soutenir le chroniqueur d’extrême droite Éric Zemmour (avec qui elle est en procès pour injure raciste) et d’être « devenue une caisse de résonance des thèses extrêmes ».
- Affaire Pegasus : des journalistes français espionnés – Le 18 juillet, la plateforme Forbidden Stories révèle qu’un logiciel nommé Pegasus est utilisé par plusieurs États pour espionner des personnalités politiques et des journalistes. Reporters sans frontières (RSF) a rapidement porté plainte contre X auprès du procureur de Paris pour piratage, collecte frauduleuse de données personnelles et violation du secret des correspondances, et a annoncé vouloir saisir l’Organisation des nations unies (ONU). D’après Le Monde, au moins 17 journalistes de sept pays différents ont rejoint cette plainte. « En France, des plaintes ont notamment été déposées par Mediapart et Le Canard enchaîné, alors que l’enquête du consortium a révélé que les journalistes Edwy Plenel et Lénaïg Bredoux, de Mediapart, ainsi que l’ancienne enquêtrice du Canard enchaîné Dominique Simonnot, avaient été espionnés par le client marocain de Pegasus, comme l’ont confirmé des analyses techniques de leurs téléphones. »
Du côté des entreprises médiatiques et de leurs propriétaires
- Droits voisins : Google écope d’une amende de 500 millions d’euros – Google poursuit son combat contre les droits voisins (la rémunération de la presse pour l’utilisation de ses articles sur le moteur de recherche). Pour l’instant, ce combat est perdant : la firme vient d’être condamnée, en France, à 500 millions d’euros d’amende par l’Autorité de la concurrence. La raison de cette condamnation : « ne pas avoir négocié de bonne foi avec les éditeurs de presse sur l’application des droits voisins » relate Le Monde. Cette amende n’est pas la seule sanction puisque l’Autorité de la concurrence ordonne à Google de présenter une nouvelle offre aux journaux sous peine « de se voir infliger des astreintes pouvant atteindre 900 000 euros par jour de retard ». En 2018, le Parlement européen a adopté le principe des droits voisins. L’objectif : obliger les grandes plateformes numériques comme Google à rémunérer la presse pour les articles de journaux que ces plateformes utilisent. Par la suite, en 2019, l’Assemblée nationale en France votait la transcription de la directive sur les droits voisins. Depuis, s’ensuit une longue bataille judiciaire entre Google et les journaux français.
- Changement de gouvernance pour Arrêt sur images – Daniel Schneidermann quitte la direction d’Arrêt sur images. Il « confiera définitivement la propriété et la responsabilité du site qu’il a créé en 2007, Arrêt sur images, à son équipe » le 1er octobre explique Le Monde. S’il quitte la direction, Daniel Schneidermann continuera de rédiger des articles pour Arrêt sur images.
- Pascal Praud mis en garde par le CSA – Deux émissions du présentateur de CNews Pascal Praud, consacrées à la tribune de militaires d’extrême droite parue dans Valeurs actuelles en avril dernier, sont dans le collimateur du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). La raison : un manque flagrant de diversité dans les points de vue exprimés, tous favorables à la tribune des militaires factieux. Le Monde détaille la liste des invités : « Le présentateur-phare de CNews, Pascal Praud, avait consacré son édito à cette tribune, à l’origine d’une vive polémique dans la classe politique, avant de donner la parole à son instigateur, l’ancien officier Jean-Pierre Fabre-Bernadac. Entouré en plateau de l’ancien cadre du Rassemblement national (RN) Jean Messiha, du publicitaire Jacques Séguéla, de la fondatrice et directrice de la rédaction du magazine Causeur, Élisabeth Lévy, et du secrétaire national adjoint du Syndicat indépendant des commissaires de police, Matthieu Valet, Pascal Praud avait également fait réagir l’eurodéputé RN Gilbert Collard. » Pour le CSA, « compte tenu du caractère controversé des propos tenus par l’auteur de la tribune débattue, le conseil a estimé que l’absence de diversité des points de vue exprimés par les participants en plateau contrevenait aux obligations de CNews en matière de pluralisme d’opinions ». La chaîne a donc été, une nouvelle fois [7], avertie...
Du côté des publications sur les médias
Note : cette rubrique ne constitue pas une sélection, mais recense les ouvrages parus dans le mois sur la question des médias, qu’il s’agisse de bonnes ou de moins bonnes lectures.
- Damian-Gaillard (Béatrice), Montañola (Sandy) et Saitta (Eugénie), Genre et journalisme. Des salles de rédaction aux discours médiatiques, De Boeck, août 2021, 256 p., 26,90 euros.
- Goutte (Guillaume), Correcteurs et correctrices. Entre prestige et précarité, Libertalia, août 2021, 80 p., 8 euros.
- Meyer (Charlotte), La protection internationale des journalistes en mission professionnelle périlleuse. Enquête sur un défi impossible, L’Harmattan, juillet 2021, 184 p., 18,50 euros.
- Motoi (Ina), Guide de visionnement critique des médias. Par la réflexion individuelle et en groupe, Presses universitaires du Québec, août 2021, 21 euros.
- Murrow (Edgard), La seule propagande qui vaille se nomme vérité. Discours sur la responsabilité et le devenir des médias, Qui mal y pense, juillet 2021, 8,50 euros.
- Ngono (Simon), Médias audiovisuels et tolérance administrative au Cameroun. Enjeux communicationnels et logiques d’acteurs, L’Harmattan, juillet 2021, 202 p., 20,50 euros.
Jérémie Fabre, et Benjamin Lagues, grâce au travail d’observation collective des adhérentes et adhérents d’Acrimed