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"Le Monde" en Bourse

Le Monde Diplomatique réagit, Jean-Marie Colombani réplique

L’annonce de l’entrée du Monde en Bouse ne pouvait laisser indifférente la rédaction du Monde Diplomatique, représentéee par Ignacio Ramonet. Sa réaction suscite une consternante réplique de Jean-Marie Colombani ...

Le Monde Diplomatique réagit

Dans Le Monde diplomatique de décembre 2001, on peut lire notamment ceci, sous la plume d’Ignacio Ramonet :

" (...) Indépendamment des arguments techniques avancés en faveur de cette entrée en Bourse, il est indiscutable qu’une telle décision modifie la philosophie en vigueur jusqu’à présent. Notre fondateur, Hubert Beuve-Méry, également fondateur du Monde, avait coutume de dire, commentant les rapports dangereux qu’entretiennent la presse et l’argent : « Il ne faut pas que nos moyens de vivre compromettent nos raisons de vivre. »

La logique financière est désormais introduite au coeur de la gestion de l’entreprise, où elle exercera une influence. L’appel aux marchés boursiers impose, nolens volens, l’obligation de résultats financiers souvent peu compatibles avec la mission d’information rigoureuse et critique de la presse de référence.

A juste titre, les syndicats de journalistes ont rappelé l’exemple du Financial Times, qui a décidé de licencier 150 rédacteurs pour la simple raison que ses profits seront inférieurs cette année à ceux - exceptionnels - de l’an dernier.

Nul ne doute de la volonté des responsables du Monde de préserver l’indépendance de l’entreprise, et de nombreux verrous ont été prévus à cet effet. Mais que deviendrait cette indépendance en cas de turbulences boursières, d’effondrement de la valeur de l’action et d’attaques concertées de grands prédateurs ? (...) "

Lire tout l’article du Monde diplomatique : Le Monde, la Bourse et nous ".

Le plaidoyer de Jean-Marie Colombani

En guise de réponse à la mise en garde d’Ignacio Ramonet contre les effets de l’entrée en Bourse du Monde, Jean-Marie Colombani a cru bon de rédiger un plaidoyer, qui paraît dans le numéro de janvier 2002 du Monde Diplomatique.

Lire Le Monde, Le Monde diplomatique et la Bourse.

Un Mini-Murdoch ?

Faisant son propre éloge, non de repreneur, mais de redresseur d’entreprise en difficulté, Jean-Marie Colombani explique que la " rentabilité " de " l’entreprise Monde " doit reposer sur sa croissance et que celle-ci- passe par sa cotation en Bourse. Il faudra y revenir.

Notons simplement que ses qualités de chef d’entreprise avaient déjà valu à Jean-Marie Colombani le titre envié de " mini-Murdoch ", du nom du magnat de la presse dont les entreprises médiatiquement remarquables sont, aujourd’hui encore, florissantes.

Dans un éditorial publié par le Wall Street Journal Europe du 25 juillet 2001, " Le Monde Floats ", on pouvait lire ceci :

« With the appointment of editor Jean-Marie Colombani, the paper waded into the modern world. Color photos were inserted, articles shortened, and computers installed. Circulation climbed to 600,000 in 2001 [1] from less than 400,000 in 1994. And last year was the first time in which Le Monde made a profit - albeit a small one. After his June 2000 reelection to the editor’s post, Mr. Colombani began buying regional papers and mulling an IPO. It seemed like a mini-Murdoch was finally turning Le Monde into a modern newspaper. » [2]

Un compliment, peut-être immérité, mais significatif ...

Un Maxi-Minc ?

Comme est significative la leçon que Jean-Marie Colombani croit bon de donner au Monde Diplomatique :

" Quant au Monde Diplomatique, son équipe de direction sait de quel soutien elle a bénéficié de ma part. Elle sait surtout que, en tant que président de son conseil de surveillance, je me dois de veiller au respect de son indépendance ".

Alain Minc, essayiste plaigiaire, Président du conseil de surveillance du Monde, prétend garantir son indépendance, en préconisant l’entrée du quotidien en Bourse. Comment s’y prend Jean-Marie Colombani, Président du conseil de surveillance du Monde Diplomatique ?

" (...) j’ai fixé une limite : que Le Monde reste actionnaire à 51%. J’ai toujours considéré que la garantie des personnels du Monde valait mieux, en termes d’indépendance, que celle de telle ou telle personne privée ".

Quelle est cette personne privée qui pourrait menacer l’indépendance du Monde Diplomatique ? Quel est ce vrai Murdoch, mini ou maxi, qui rôde dans ses couloirs ? Son nom est " Personne ". Alors pourquoi cette invocation perfide ? Parce que Le Monde Diplomatique, étant incapable, d’assurer lui-même son indépendance aurait besoin de la tutelle des " personnels du Monde " ...

Un Père Sévère ...

Car les journalistes du Monde Diplomatique sont de grands enfants que Jean-Marie Colombani sermonne en ces termes :

" (...) il est un dogme " beuveméryen " que Le Monde Diplomatique doit garder à l’esprit, à l’heure où certains de ses membres s’impliquent dans des activités militantes : il s’agit du nécessaire refus, par les journalistes, de tout engagement partisan. C’est la première garantie d’indépendance que nous devons à nos lecteurs ".

Prenez garde, " Amis du Monde Diplomatique ", vous qui êtes les premiers garants de l’indépendance de votre mensuel, de ne pas confondre " activités militantes " et activités mondistes ou mondaines : seules les premières sont périlleuses ! Quant à l’engagement partisan - dans un parti, pour un parti, pour un parti-pris : qu’importe ! - il doit être refusé fermement : foi de Colombani ...

... Qui diffère en tout de Murdoch, ferme soutien de Thatcher ou Reagan. Jean-Marie Colombani reste Jean-Marie Colombani : jadis engagé aux cotés de Balladur, aujourd’hui impliqué dans le soutien au processus de Matignon sur la Corse ; devenu porte-voix d’un " nous " exhaustivemement " américain " [3] ...

 
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Notes

[1Chiffre totalement faux !

[2Document PLPL.

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