(9 avril 2002, actualisations : 14 et 16 avril)
Le Monde ayant jusqu’alors considéré que les actions de l’armée israélienne étaient des " représailles " ou des " ripostes " : autrement dit de simples actions d’auto-défense (conformément à ce que le gouvenement Sharon s’efforçait d’accréditer), il ne reste plus à Gilles Paris de nous proposer en guise d’ " analyse ", un commentaire ambigü dont le titre, en revanche, est dénué de toute ambiguïté :
" Ariel Sharon succombe à la tentation de la pure force "
A relire plusieurs fois : Ariel Sharon " succombe " (sans doute après avoir résisté pendant de longues décennies…) à la " tentation " ( sans doute parce qu’il est devenu soudainement un pécheur pris en flagrant délit de gourmandise... ) de la " pure force " : comme si Sharon n’était pas venu au pouvoir avec la ferme intention de détruire tout ce qui pouvait l’être.
Le Monde étant, comme " nous tous ", américain, la politique américaine ne peut être marquée que par des " hésitations ", des " incohérences " ou des " contradictions ".
Ainsi, quand Georges Bush somme Arafat, assiégé dans ses bureaux de Ramalah, de lutter contre le " terrorisme ", avant de demander, en second lieu seulement, que le retrait israélien " commence sans délai ", les journalistes de télévision sur LCI ou sur France 2 entendent que Bush a exigé un retrait sans délai. Et Le Monde sous-titre à la "une" du 7-8 avril : " Washington exige à nouveau un retrait " sans délai " ". Cela au moment même où Colin Powell, faute sans doute d’avoir trouvé un avion à temps, remet de plusieurs jours - le temps de laisser Sharon acccomplir son travail - son voyage en Israël.
Et alors que la position de Bush manifeste une duplicité sans borne, Le Monde la trouve ambiguë : " la position américaine demeure donc équivoque ", écrit Patrick Jarreau dans Le Monde du 7-8 avril 2002 (p. 4).
Mercredi 3 avril, Le Figaro titre à la "une" : " Sharon veut expulser Arafat des Territoires paletiniens ". Exact ! Mais l’article commence ainsi :
" Le premier ministre israélien a proposé hier au président palestinien un "aller simple" hors de la région (...) "
Jeudi 4 avril, Le Monde titre sur une information de première importance : " Record de candidats à l’Elysée ". Et indique sobrement dans un titre secondaire de la "une" : " Yasser Arafat reste à Ramallah ", comme s’il en avait fait le libre choix. Pour faire bonne mesure, la déclaration de Colin Powel affirmant qu’ Arafat " a encore un rôle à jouer " nous vaut se commentaire tout en nuances : " Le chef palestinien a reçu le soutien du secrétaire d’Etat américain ". Enfin, la déclaration cynique de Sharon sur " l’aller simple " qu’il veut imposer à Arafat devient, comme dans Le Figaro, " la proposition d’un ’aller simple’ faite par M.Sharon ".
Le Monde du 29 mars titre p. 2 : " L’attentat de Nertanya tue l’espoir du sommet de Beyrouth ", avalisant ainsi par avance - avant même que le sommet de Beyrouth n’ait été conclu - la version isaélienne, alors que le lendemain, Le Monde informe brièvement qu’ Isaraël trouve le plan de paix " inacceptable ".
La personification à outrance du conflit permet d’en dissimuler les véritables enjeux.
Ainsi, Thierry Oberlé, dans Le Figaro du Jeudi 4 avril nous offre sous le titre : " Arafat et Sharon, vingt ans de haine " un article qui les réduit à un règlement de conptes personnel entre deux hommes.
Mais, quelques jours plus tôt, Le Monde (samedi 30 mars) avait déjà saisi l’essentiel. Le jour même où l’armée israélienne se lance à l’assaut des villes palestiniennes et de leurs habitants, Le Monde titre à la "une" :
" Ariel Sharon se lance à l’assaut de Yasser Arafat ".
Quand on sait que pour Jean-Marie Colombani, Ariel Sharon et une créature d’Arafat qui aurait ainsi " choisi " son adversaire, on saisit la profondeur de l’analyse…
Un analyse subtile qui conforte d’élégants commentaires.
Documentation : Acrimed et PLPL
La suite : D’élégants commentaires