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Le Télégramme ouvre l’appétit des étudiants

Dans un éditorial du Télégramme du 28 novembre 2003 un certain A. Johannès, éditorialiste surinformé et informateur boulimique, démêle pour nous les « contradictions étudiantes » : c’est le titre, et ça vaut le détour pour apprécier l’art de désinformer sous couvert de combattre la désinformation. Extraits :

« En renonçant temporairement à renforcer l’autonomie des universités, le ministre de l’Education soustrait à la colère estudiantine les deux "épouvantails" que sont le Medef et les notables territoriaux. Epouvantails au demeurant discutables. ».

Qu’est-ce qu’un « épouvantail discutable » ? Mystère. Mais rien n’empêche apparemment de les discuter.

- D’abord les « notables territoriaux » : « L’expérience montre (...) que quand les élus territoriaux s’impliquent dans les affaires universitaires, les conditions de vie des étudiants sont plutôt mieux perçues et mieux traitées. » Premier argument, première entourloupe : comme si le problème de l’autonomie des universités se limitait à celui de l’intervention des « élus territoriaux » sur les « conditions de vie des étudiants » et comme si, en tout cas, le problème de l’égalité de traitement des universités selon les régions ne se posait pas.

- Ensuite, « le Medef ». Subitement, celui-ci disparaît au détour du sous-titre qui annonce fièrement : « Les entreprises incontournables ». La suite permet de comprendre pourquoi : « Par ailleurs, et quoi que les jeunes puissent penser du discours officiel des organisations patronales, il va devenir de plus en plus difficile de réclamer des diplômes ouvrant des débouchés professionnels tout en refusant aux entreprises la possibilité de faire connaître leurs besoins en qualifications. » Deuxième argument, deuxième entourloupe : comme s’il s’agissait d’empêcher les entreprises de faire connaître leurs besoins, alors qu’il s’agit d’empêcher de modeler l’enseignement sur les dits besoins.

Deux arguments, deux désinformations. Ce qui n’empêche pas notre bon désinformateur de brandir sa trouvaille du jour : « Il faut (...) s’interroger sur "l’inforexie" des futurs cadres de ce pays. ». Ce qui nous vaut cette précision en note : « Inforexie : manque d’appétence pour l’actualité, refus de s’informer ».

Car, voyez vous, les « futurs cadres de ce pays » (parmi lesquels il faut sans doute compter de futurs éditorialistes ...) ne se sont pas renseignés sur les diplômes européens « auprès de leurs homologues qui vivent déjà ce système », ni, il faut le préciser, auprès des éditorialistes surinformés.

Malheureusement donc, les étudiants n’ont pas puisé à la seule source légitime, et voici ce qui s’est passé : « Cette apathie a laissé le monopole de l’explication à des organisations qui n’avaient rien dit quand la gauche avait lancé le projet et qui ameutent les campus contre le libéralisme , entre un Forum social européen surmédiatisé et de prochaines élections aux conseils d’universités. Comme si les prédicateurs altermondialistes avaient fourni des thèmes de campagne électorale pour permettre à des relais syndicaux passablement effilochés de se refaire une santé. »

En deux phrases, tout est dit : il suffit de souligner pour commenter. Et d’évoquer l’arrivée des fonds privés pour asséner sans avoir à s’en expliquer. C’est la fin de l’éditorial :

« Les fonds privés arrivent - Que l’actuel gouvernement ait commis à l’égard des lycéens et des étudiants des maladresses qui le contraignent aujourd’hui à observer une grande prudence est une donnée fragile. Car Bruxelles prépare discrètement une injection massive de fonds privés dans l’enseignement supérieur avec des conséquences plus vastes et plus durables que les approches circonspectes des gouvernements français. Tout simplement parce que l’Europe régresse, par insuffisance de moyens financiers dévolus aux étudiants : le pourcentage de diplômés de l’enseignement supérieur par rapport à la population active est de 37 % aux Etats-Unis, de 36 % au Japon et de 23 % seulement en Europe. Or la principale différence entre les Etats-Unis et le Japon d’une part et l’Europe d’autre part réside, précisément, dans l’importance relative de l’investissement privé : 2,2 % aux Etats-Unis ; 1,2 % au Japon et 0,4 % seulement en Europe où la matière grise rétrécit. »

Donc ?

Vive l’investissement privé et ...bon appétit !

P.S. : Merci au correspondant qui nous a transmis ce chef d’oeuvre de gastronomie éditoriale.

 
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