Le Monde " s’est comporté comme un prédateur (...) Comme s’il voulait détourner à son profit exclusif un titre et ses biens pour se "refaire", à la manière d’un joueur qui a perdu sa mise et ne peut s’acquitter de sa dette ".
Ce jugement sans appel est signé de trois anciens responsables de Télérama, dans un texte rendu public lundi 27 octobre 2003, auquel fait écho une dépêche AFP le soir même.
Deux anciens directeurs de la rédaction de Télérama, Francis Mayor (pendant 26 ans), Pierre Bérard (1991-1997) et un ancien journaliste à l’hebdomadaire (de 1980 à 2003), Jean Belot, estiment que " l’éviction soudaine " du président du directoire de Télérama, Marc Lecarpentier [1] " remplacé par un envoyé spécial du Monde, traduit clairement l’envie de marquer sans tarder un territoire, d’affirmer d’emblée un pouvoir et de mettre vite la main sur un journal dont la prospérité contraste singulièrement avec l’impécuniosité des nouveaux propriétaires ".
Relevant que Télérama doit son succès " non pas à des recettes de marketing ou à une stratégie de communication mais à l’expression de convictions et au respect de valeurs ", ces anciens "piliers" de l’hebdo culturel rappellent que celui-ci " n’avait pas d’autres maîtres que ceux qui le dirigeaient, pas d’autre dogme que la fidélité têtue à ses engagements ".
" On pouvait attendre du Monde, qui fut jadis un partenaire privilégié du groupe PVC [2] -au nom de luttes communes menées pour la défense des droits de l’homme et de la démocratie ou pour le soutien aux pays en voie de développement- un comportement conforme à la réputation qui fut longtemps la sienne ".
" On pouvait ainsi présumer que, dans un premier temps, le nouveau propriétaire, compte tenu de la bonne santé globale de Télérama, lui laisserait vivre sa vie ", écrivent-ils.
Interrogé par l’AFP, " Le Monde n’a pas souhaité faire de commentaires ", précise l’agence de presse.