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Critique des médias sur le web (novembre – décembre 2013)

par Franz Peultier,

N° 28 de notre sélection bimestrielle d’articles de critique des médias parus sur le Web et disponibles gratuitement. Présentation des articles publiés en septembre et octobre 2013.



Cette sélection parlera des journalistes : les journalistes en lutte, stipendiés, inégalement aidés, qui doivent écrire pour Google, feraient parfois mieux d’arrêter… quitte à être remplacés par des sous-traitants ? N’allons pas jusque-là.

Journalistes en lutte…

 Au « Parisien », le courant passe mal entre la direction et la SDJ (Libération.fr, 11/12) – « Mercredi dernier, la Société des journalistes (SDJ) du Parisien/Aujourd’hui en France envoie un communiqué à toute la rédaction pour alerter sur un publireportage déguisé. Fin novembre, dans le cadre de sa série « Histoire de marque », le journal a en effet publié un « cahier tout à la gloire d’EDF » qui n’était « pas clairement identifié comme un publireportage », déplore la SDJ. Comble : cette publicité déguisée, réalisée par l’agence de contenus Relaxnews, et dont la manchette était « EDF, l’énergie d’un géant », avait même les honneurs d’un appel de une. »

 Précarité à Radio France : peut mieux faire, mais comment ? (Télérama.fr, 09/01) - « Les deux premières années, ça se passe super bien, explique Valeria Emanuele, élue SNJ à Radio France. Les gens sont plutôt contents de varier les lieux, les jobs (présentation, reportage), les horaires, etc. La troisième année, ils trouvent ça lourd. Et la quatrième, c’est la catastrophe. » Quitter les siens à chaque contrat loin de chez soi, dormir à l’hôtel, récupérer les reportages sur lesquels les titulaires ne se précipitent pas (tôt le matin, tard le soir, ou le week-end)... Pour une cinquantaine d’euros par jour dans les premiers temps, et entre 80 et 100 euros avec l’expérience (hors prime de précarité et tickets restaurant). »

 S’il arrivait au Figaro, à Canal+… la même chose qu’à Rue89 (Reve89.com, 10/12) – « Et si dans la nuit votre site subissait une refonte de têtière ? Le “changement du haut de la page”, imposé par Le Nouvel Obs, relègue le logo de la Rue en dessous de celui de la maison-mère, en tout riquiqui avec la mention “partenaire”. Dur, dur. On s’est amusés à mettre aux normes les têtières d’autres sites d’info. L’ajustement est un peu aléatoire, mais grosso merdo, cela donne ça. »

… inégalement aidés…

 « Closer » écrase « Le Monde diplomatique » (monde-diplomatique.fr, 19/12) – « La publication par le ministère de la culture et de la communication du tableau des deux cents titres de presse les plus aidés en 2012 permet d’apprécier la sollicitude des pouvoirs publics envers Le Monde diplomatique. Notre journal se classe au 178e rang. C’est-à-dire très loin derrière des publications aussi cossues et adorées des annonceurs que Le Nouvel Observateur (8e), L’Express (9e), Télé 7 jours (10e), Paris Match (12e) et Valeurs Actuelles (66e). »

 Erratum (Bakchich.info, 08/01) – « Avis important : à la suite d’une sotte erreur de saisie, cette version incomplète de l’éditorial de Christophe Barbier a été publiée ce matin dans le numéro 3262 de l’hebdomadaire L’Express. »

… stipendiés…

 Saumon / France 2 : c’était un voyage de presse (Sébastien Rochat, arretsurimages.net, 23/12) – « On savait que le "lobby du saumon" voulait riposter contre ce documentaire d’Envoyé Spécial, trop bien relayé sur le net, et qui tombait au plus mal, à quelques semaines des fêtes. Et bien, on en a confirmation : le sujet du 20 heures de France 2 faisait bien partie de cette contre-attaque. »

… qui doivent écrire pour Google…

 Abdelhakim Dekhar : quand les médias sont acteurs et sujet du feuilleton (Lemonde.fr, 23/11) – « Faut-il parler de “tireur fou” ? L’expression est apparue largement dans les médias dès lundi. Elle reflète l’idée qu’on ne connaît pas les motivations du tireur, qui n’a rien dit d’intelligible. Aussi, le fait de choisir un mot commun répond – consciemment ou pas – aux exigences du référencement par Google : que va taper un internaute qui cherche à s’informer sur l’affaire ? Mieux vaut avoir mis dans son article les bons termes, se disent les journalistes, ce qui peut générer un effet moutonnier. »

… qui feraient parfois mieux d’arrêter d’écrire…

 The Fall of « Newsweek » – Les mille et une erreurs d’un article de « french-bashing » - (Les décodeurs du Monde.fr, 06/01) – « L’analyse que fait la journaliste Janine di Giovanni sur les échecs et les excès de la politique menée par François Hollande n’est pas illégitime ni d’une grande originalité ; elle est partagée par beaucoup à droite de l’échiquier politique français. En revanche, Mme di Giovanni – qui fonde sa légitimité sur le fait de vivre à Paris depuis une dizaine d’années – commet un nombre incroyable d’erreurs factuelles qui ôtent une bonne part de la crédibilité de ce réquisitoire. »

 Apprenons Le (Vrai) Journalisme À La Pauvre Nullarde Yankee (« Venue De Londres ») (Bakchich.info, 07/01) – « Dans ce déchaînement, certaines publications se montrent particulièrement virulentes : c’est le cas, par exemple, du Figaro, qui assène que ‘‘la journaliste de Newsweek alterne’’, dans l’article en forme de ‘‘caricature à la Marie-Chantal’’ où elle prétend que ‘‘l’arrivée au pouvoir du Parti socialiste est en train de ruiner le pays à coup de taxation, et de départ à l’étranger de nombreux talents’’, les ‘‘clichés’’ et les ‘‘fausses affirmations’’. »

… quitte à laisser d’autres écrire leurs articles ?

 On a tenté de délocaliser Streetpress à l’île Maurice (Streetpress.info, 18 /12) – « Au téléphone on nous assure qu’il n’y a « aucun problème » pour faire du contenu journalistique. D’ailleurs leurs rédacteurs sont au niveau : de bac à bac+3. Et pour StreetPress, « pas besoin d’un bac +3, un niveau 2 devrait suffire », affirme notre interlocutrice. Plus modestes que leur confrères hexagonaux, les journalistes mauriciens « ne signent pas les papiers. Vous pouvez nous donner un pseudonyme. » Ah, comme c’est pratique ! On pourrait peut-être garder les signatures de nos actuels journalistes… »

Pour finir : du racisme…

 Charlie Hebdo, pas raciste ? Si vous le dites... (Olivier Cyran, Article11.info, 05/12) – « À Charlie Hebdo, il a toujours été de bon ton de railler les « gros cons » qui aiment le foot et regardent TF1. Pente glissante. La conviction d’être d’une essence supérieure, habilitée à regarder de très haut le commun des mortels, constitue le plus sûr moyen de saboter ses propres défenses intellectuelles et de les laisser bailler au moindre courant d’air. Les vôtres, pourtant arrimées à une bonne éducation, à des revenus confortables et à l’entre-soi gratifiant de la « bande à Charlie », ont dégringolé à une vitesse ahurissante. »

 Critique de l’anti-politiquement correct (lmsi.net, 06/11) – « Une grande partie des textes et des discours qui brandissent le spectre du politiquement correct, s’attachent à désigner une réalité qui est en fait une construction largement fantasmagorique. Ils ont même toutes les caractéristiques de la projection schizophrène. C’est généralement sur un tout autre registre que reposent les discours des personnes elles-mêmes habituellement visées par l’accusation de politiquement correct (en gros des progressistes, ou juste des personnes non-racistes, non-homophobes ou non-sexistes). »

 Femmes non-blanches en politique : stop aux fantasmes exotiques ! (Rokhaya Diallo sur le site du Huffington Post, 17/11) – « Après des décennies, -que dis-je, des siècles !- de monochromie, l’apparition récente sur la scène politique française de nombreux visages féminins de "type" asiatiques, maghrébins ou noirs, a déstabilisé, semble-t-il, les commentateurs médiatiques plus accoutumés aux alignements de costumes gris d’où émergent, invariablement ou presque, des crânes bien roses et plus ou moins dégarnis. Surpris par cet exotisme si soudain, les médias n’ont pas toujours su trouver les mots pour dépeindre les femmes non-blanches. »

… et d’autres choses

 Renverser les plateaux télé (Cahiers du football, 18/11) – « Les plateaux-télé pensent manifestement que la victoire leur est un dû : si on ne leur offre pas, on a alors, à leurs yeux, une dette. Sous prétexte que nos joueurs jouent dans des clubs prestigieux, notre équipe n’a pas le droit de perdre contre une autre qui la devance au classement FIFA. Ah, que ces créanciers cyniques l’aimaient, cette même équipe de France, lorsqu’elle égalisait en Espagne il y a quelques mois… »

 Qui écrit vraiment les horoscopes (et pourquoi c’est n’importe quoi) (20minutes.fr, 25/11) – « En réalité, l’une des techniques pour rédiger un horoscope est de faire appel à un logiciel qui générera automatiquement des phrases, éventuellement retouchées ensuite au sein des rédactions. C’est ainsi qu’une petite recherche Google permet de faire apparaitre exactement les mêmes prédictions, mais parfois pour des signes astrologiques distincts, ou à des dates différentes. »

 Les jeux vidéo, joujoux idéologiques (Le Monde.fr, 20/12) - « Il en va différemment des jeux de tir ou d’action destinés à des joueurs assidus, qui se pratiquent sur PC ou sur console. Fortement scénarisés, ces jeux AAA se pratiquent, comme GTA, dans un contexte historique, social ou politique bien marqué. Et la tonalité dominante de la plupart d’entre eux est limpide : américaine, virile et militarisée. »

 
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