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Le journalisme du " savoir admirer "

par Patrick Lemaire,

Je connais gens de toutes sortes (Gallimard, 2001) [1], sorte de mémoires de Philippe Labro, " romancier, cinéaste, homme de radio, de télévision ", a droit à un quart de page dans Le Monde des livres daté du 25 janvier 2002, signé de la rédactrice en chef, Josyane Savigneau. Extraits, (presque) sans commentaires.

(...) " La soixantaine venue, s’il se retourne sur son parcours, quelque chose y tient une place à part, fondatrice : le journalisme de presse écrite. (...)

Par-dessus tout, il aime admirer, et l’exercice du portrait journalistique est une manière très agréable de dire son admiration, et aussi de confier quelque chose de soi de façon très détournée. (...)

Vingt personnages sont là, sous le regard de Philippe Labro. (...) Tout et tous l’intéressent, François Mitterrrand comme Jean-Paul Goude, Michel Platini comme Jean-Jacques Goldman, Francis Fukuyama comme Jack Nicholson ou Katherine Graham, la patronne du Washington Post, (...) Kennedy ou Romain Gary, (...) Pierre Lazareff ou Jean-Pierre Melville. (...) "

Les " gens " que se flatte de " connaître " Labro ne sont pas de " toutes sortes ", mais bien au contraire, socialement très ciblés...
Kennedy ? " Un mythe que même les révélation sur " le dark side de l’icône " (...) ne parviennent pas à ternir. Et Labro, comme tant d’autres, gardera toujours en lui quelque chose de JFK. "

Labro, un " grand homme " par procuration ? Les historiens ont réglé leur compte au mythe " JFK ", notamment en démontrant le révisionnisme du film du même nom. Mais le " journaliste " Labro est attaché au " mythe ".

Ouf, Josyane Savigneau précise : le grand homme de Philippe Labro, " ce n’est pas Kennedy, mais Hemingway (...). Hemingway l’absolue lucidité. (...)
Hemingway qui autorise Labro, contre tant de contemporains se croyant "arrivés" et s’exerçant au mépris universel, de montrer que savoir admirer est une preuve d’intelligence de la vie. "

Pour Le Monde, les morts " autorisent " les vivants à les enrôler dans des polémiques qu’ils n’ont pas eu à connaître... C’est sans doute aussi cela, le " trotskisme culturel "...

A propos de Pierre Lazareff (ancien patron de France Soir à l’époque où ce quotidien était prospère), Josyane Savigneau retient cette phrase de Labro : " Dans l’univers de la presse - puis dans ce que l’on appelle définitivement la communication -, ce genre d’homme n’a plus refait surface. On est passé à un autre univers, d’autres méthodes, d’autres objectifs, d’autres exigences, capitalistiques en particulier. "

Un message pour la direction du Monde ? " Absolue lucidité ".

 
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Notes

[1Labro aime beaucoup ce vers d’Apollinaire, au point d’en faire le titre de ces mémoires, alors qu’il figurait déjà, trente-quatre ans plus tôt, en exergue de son roman sur la guerre d’Algérie Des feux mal éteints (1967), adapté à l’écran en 1994 par Serge Moati.

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