Accueil > Critiques > (...) > La face cachée du Monde et ses suites

Un « quotidien de référence » ?

« La face cachée du Monde » (9). Questions sans réponses : aux bons soins du médiateur

par Henri Maler,

Dans sa chronique parue sous le titre « Paroles de lecteurs », Robert Solé, médiateur, propose un échantillon, à ses yeux « significatif », à défaut d’être « représentatif », du courrier qu’il a reçu, avant de donner son avis :

« Les lecteurs du Monde sont les premiers concernés par cette tempête. Ils avaient le droit d’en être informés de la manière la plus claire, la plus précise et la plus complète possible. Cela n’a pas été le cas. Si le journal leur a longuement exposé son analyse du livre, puis ses réponses à des accusations, il en est resté là. Lui qui sait si bien mettre en scène un événement (extraits de textes, revue de presse, points de vue contradictoires, reportages, analyses...), il s’est quasiment contenté d’une information officielle et de communiqués à décrypter. »

Ainsi, selon Robert Solé, Le Monde aurait « longuement exposé son analyse du livre, puis ses réponses à des accusations ». Vraiment ? Comment peut-on appeler analyse du livre la dénonciation de « la haine » qui l’habiterait, les amalgames entre toutes les critiques dont Le Monde a fait l’objet depuis 50 ans, les insinuations d’antisémitisme qui ont jalonné cette « riposte » à une prétendu « campagne » ? Ainsi, selon Robert Solé, Le Monde aurait exposé « ses réponses à des accusations ». « Réponses à des accusations », en effet, mais pas à toutes, loin s’en faut. Et des réponses souvent biaisées, quand elles ne sont pas tout simplement « hors sujet ».

Et en dehors de cela, il est vrai, « une information officielle et de communiqués à décrypter ». Toutes les instances du Monde et du Groupe Le Monde, des instances officielles aux syndicats, ont été mobilisées ou se sont mobilisées pour déclarer leur solidarité, à quelques réserves près, avec la direction du journal.

Une information partiale et lacunaire, donc, dont Robert Solé souhaite qu’elle soit complétée :

« Un lecteur qui n’aurait lu que Le Monde ignorerait que le Péan-Cohen est un énorme succès de librairie. Il ne saurait rien de la réplique des auteurs et de l’éditeur, des protestations publiées par les directeurs d’autres journaux, et pas grand-chose des réflexions que cette affaire a provoquées au sein du journal. En ne songeant qu’à sa défense, Le Monde a privé ses lecteurs d’un sujet que nul ne pouvait traiter aussi bien que lui, et il a laissé des rumeurs et des échos se propager sur son compte dans d’autres médias. »

Arrivé à ce point, le lecteur de la « Chronique du médiateur », s’interroge : s’agit-il désormais d’informer plus complètement et de répondre effectivement à certaines questions soulevées par le livre de Péan et Cohen ?

Que nenni :

« (…) Le Monde va devoir se réapproprier cette affaire, qui est la sienne. Le 31 mars, cinq jours après la réunion d’un comité d’entreprise extraordinaire demandé par les syndicats, un nouveau comité de rédaction aura lieu. Il s’agira de tirer les premiers enseignements de tout cela. Non pas pour modifier la charte rédactionnelle, que personne ne conteste, mais pour s’interroger sur la manière dont elle est appliquée.  ».

Ainsi, l’ « affaire » redevient strictement interne ; les enseignements à tirer doivent porter exclusivement sur l’application de la charte rédactionnelle. Quant aux réponses publiques, surtout quand elles concernent les jeux de pouvoir auxquels Le Monde s’est livré, … ce sera pour une autre occasion !

Aveu d’impuissance du médiateur : il n’est pas en mesure de répondre aux questions que se posent des lecteurs du Monde qui auraient lu le livre de Péan et Cohen.

Pourtant, n’est-ce pas son rôle ? Et sinon, à quoi sert-il ?

 
Acrimed est une association qui tient à son indépendance. Nous ne recourons ni à la publicité ni aux subventions. Vous pouvez nous soutenir en faisant un don ou en adhérant à l’association.

A la une