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Des propositions de la « gauche antilibérale » sur les médias

Dans « Ce que nous voulons », document-programme du « Collectif d’initiative national pour un rassemblement antilibéral de gauche et des candidatures communes » que l’on peut lire sur le site « Alternative à gauche 2007 » (devenu depuis « Alternative unitaire 2007 ») [1], figurent des propositions sur les médias et le droit à l’information. Nous les publions ici pour information accompagnées de quelques remarques et questions.

Quelques propositions du document-programme
... en cours de discussion

[Les points de débat ou nécessitant précisions sont entre crochets]

« Médias et droit à l’information

Le droit à l’information doit être assuré.


70.
Une loi anti-concentration sera votée dès le début de la mandature. [préciser]

71. Le service public de l’information sera refondé et démocratisé en s’appuyant sur un pôle public disposant de réseaux, de moyens de production et de diffusion, et sur des médias à vocation non lucrative pouvant assurer des missions de services publics. Un plan spécifique de résorption de la précarité sera mis en œuvre dès la première année de la législature.

71 bis.
Le décret dit Tasca imposant à toutes les chaînes de télévision, y compris celles du service public de faire appel à la production privée sera abrogé.

71 ter.
Les citoyens seront associés à la gestion des organismes publics du champ des médias et de l’information

72.
Le débat contradictoire et la présentation pluraliste de l’information doivent être assurés par des obligations plus précises faites aux médias.

[73. La composition du CSA sera modifiée.]

74.
Le produit de la redevance sera augmenté et son montant modulé en fonction des revenus. Pour favoriser la création et libérer le service public du diktat de l’audimat, nous supprimerons la publicité dans l’audiovisuel public. Ses ressources, issues également de la taxation de la publicité, financeront aussi le secteur non lucratif.

74 bis.
L’émergence des médias audiovisuels ne sauraient occulter l’importance des médias écrits, presse et édition. Un fonds de soutien spécifique garantira leur indépendance et leur survie. »

Il ne nous appartient pas de prescrire à des formations ou à des rassemblements politiques quels qu’ils soient les propositions qu’ils devraient adopter. Mais nous ne remplirions pas notre rôle si nous ne leur soumettions pas quelques remarques et quelques questions.

Quelques remarques

Ces propositions se présentent comme ouvertes et inachevées. Sur de nombreux points, elles restent floues.

 Une loi anti concentration ? Soit. Mais sur quels critères, avec quelles garanties ? Avec quels prolongements au niveau européen ?

 Un service public s’appuyant sur un pôle public et sur des médias sans but lucratif ? Fort bien. C’est une proposition que certains d’entre nous soutiennent de longue date. Mais en précisant que ces médias sans but lucratif devraient être associatifs ou coopératifs et que le développement de ceux-ci devrait être garanti sous des formes appropriées que le « document » ne mentionne pas. Pourquoi ne pas mentionner comme tels les médias du tiers secteur (ni privé, ni public) ? Et surtout : quelle portée peut avoir cette refondation du service public si la question de l’audiovisuel privé n’est pas abordée ? Pourquoi ne pas aborder, au moins, la perspective d’une déprivatisation de TF1 ?

 Des citoyens associés à la gestion des organismes publics ? D’accord. Mais nous devons réfléchir aux formes de cette association pour qu’elle ne reste pas qu’un vœu pieux.

 Le débat contradictoire et la présentation pluraliste assurés par des obligations plus précises faites aux médias ? Pourquoi pas. Mais si la nature de ces obligations n’est pas précisée, elles risquent fort d’être sans effet et/ou d’être soupçonnables d’attenter au droit d’informer des journalistes.

 Financer le secteur non lucratif grâce aux ressources de la redevance ? Mais qu’est ce que l’on entend ici par secteur non lucratif ? Un secteur qui serait simplement à peine rentable ? Le tiers secteur des médias ? Et pourquoi financer ce dernier par la redevance, quand ce tiers secteur propose lui-même d’autres sources de financement ?

 Un fonds pour garantir l’indépendance et la survie des médias écrits ? Mais de quels médias écrits parle-t-on ? Tous ? Pourquoi ne pas distinguer plus clairement les entreprises de presse constituées en simples sociétés commerciales et les entreprises qui seraient dotées d’un statut d’entreprises à but non lucratif, comme le projet en a été plusieurs fois présenté par Hubert Beuve-Méry (en 1966), la Fédération française des sociétés de journalistes (en 1972) et Claude Julien (en 1984, alors directeur du Monde diplomatique) [2]. Et comment est constitué ce fond ? Quel rapport entretient-il avec le système d’aides, directes et indirectes à la presse, qui devrait être refondé ?

Comme on le voit, les questions ne manquent pas. Si l’on peut se féliciter que la question des médias et de l’information figure dans « Ce que nous voulons », manifestement le débat ne fait que commencer. Des amendements semblent d’ailleurs prévus.

Après des années de dérobades sur la question des médias, ces propositions constituent un pas en avant. Elles en appellent d’autres qui pourraient s’inspirer, par exemple, de celles dont débat Acrimed ou de la déclaration finale de la première session des États généraux pour le pluralisme Mais on ne peut que souhaiter, surtout, qu’elles soient accompagnées d’un engagement à tout mettre en œuvre, quelle que soit l’issue de la campagne et des élections, pour placer ces questions à la place qui leur revient dans les mobilisations du mouvement antilibéral et altermondialiste Si un autre monde est possible, d’autres médias le sont aussi. Pour qu’un autre monde soit possible, d’autres médias sont nécessaires. Et d’autres rapports aux médias tant qu’ils restent ce qu’ils sont. Ce dernier point aussi a valeur de test.

 
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Notes

[1Document publié également le 6 novembre 2006 dans L’Humanité.

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