Accueil > Critiques > (...) > L’invasion de l’Irak [2003 : L’Irak et la guerre américaine]

Lu dans " La Chronique "

" Pris dans les mots de la guerre "

Extraits.

Armes de destruction massive : une prédiction auto-réalisatrice

Les Etats-Unis ont bien fait d’intervenir. Il y avait en effet en Irak des armes de destruction massive. On les a vues à la télévision pendant ces trois semaines : bombes à fragmentation, bombardiers B52, missiles radioguidés etc. Elles ont d’ailleurs fait 121 morts US et des milliers d’autres personnes.

[16.04.03, 13h27]

Stress en Irak

A Tikrit, un soldat américain se dit très stressé, on leur a tiré dessus...
D’ailleurs, depuis quelques jours, il a commencé à se ronger les ongles.

[14.04.03, Journal de 20h sur France 2]

Comment va ta femme ?

Un journaliste s’adresse à un GI armé dans Bagdad, dans laquelle l’armée américaine vient tout juste de pénétrer :

- Alors, envie de rentrer à la maison ?

[Correspondant à Bagdad, journal de France2, 9.04.03, 13h20]

Désordre final

Bagdad est conquise par l’armée américaine. Maintenant, aux différents journaux télévisés, les présentateurs sourient (Journal de France 2, présenté par Daniel Bilalian, 9.04.03, 13h). Soulagés, contents.

Séquences sur les pillages à Bagdad, la misère en Irak. Le présentateur reprend le cours du journal. Un numéro de téléphone apparaît. "Vous pouvez faire des dons..." (Journal de France 2, présenté par Daniel Bilalian, 9.04.03, 13h30). Donc, après, l’embargo international pendant 10 ans pour affamer et contraindre le pays, après l’attaque américaine qui suspend tout programme d’aide et détruit le pays, c’est aux citoyens français de contribuer ?

Hotel Palestine, Bagdad. Y logent des journalistes internationaux. Un journaliste est mort, suite à un tir de char. Les journalistes organisent une veillée funèbre. On voit l’image : 10 journalistes, de nuit, tiennent à la main une bougie, 5 une caméra, filment les autres. (FR3 sur TV5, 9.04.03, 0h25)

Les médias français reprochent implicitement aux Américains de vouloir gérer seuls l’"après Saddam", et de livrer les marchés aux entreprises américaines ou des pays amis. Les Français ne veulent pas de la guerre, mais ils veulent bien des marchés qui résultent de la guerre... Dès lors, on est prêt à reprocher au Président les positions que nous avions approuvées hier...

"Après Saddam". Quel drôle d’emploi du prénom.
L’après George ? L’après Tony ?

Des mots pour la guerre : sporadiques - poches de résistance - fedayin - bavure(s) - fraterniser - état d’esprit - bombes intelligentes - civils - sécuriser...
Pincettes.

Il suffit de vingt mots pour parler de la guerre.
On pourrait dresser la liste des mots absent : sang - sanguinolent - odeur - putréfaction - "ça pue" (comme le dit un général chroniqueur, sur le seul plateau d’"Arrêt sur images") - horreur - terreur - peur -

Faire un post-it "armes de destruction massive", sinon on va oublier.

"Le précédent régime était mauvais, le suivant le sera aussi. Nous, les pauvres, nous sommes toujours perdants." (Un vieux bédouin, journal de France 2, présenté par Daniel Bilalian, 9.04.03, 13h15).

[12.04.03]

Broutilles

"Le combat pour la ville de Bassorah est maintenant terminé ; "plus ou moins terminé", précise-t-on de source britannique. La ville est maintenant entièrement sécurisée, même si la population est privée d’eau et la ville en proie au pillage."

[Euronews, le 8 avril 2003, 19h30]

Coup dur pour les Alliés

"Encore une "bavure" commise par les forces anglo-américaines : les GIs ont tiré aujourd’hui sur un autocar transportant des civils faisant 14 morts parmi lesquels des femmes et des enfants ; un nouveau coup dur pour les troupes alliées qui tentent de fraterniser avec la population irakienne."

[David Pujadas, Journal de 20h, France 2, titre du journal, le 1er avril 2003 (sic)]

Don repris

"Donner la liberté au monde par la force est une étrange entreprise pleine de chances mauvaises. En la donnant, on la retire."

[Jean Jaurès, L’Armée nouvelle, éd. L’Humanité, Paris, 1910, chap. 4]

Young GI

Le petit garçon a la pêche. Il l’exprime :

- Je me sens en forme ! Je suis prêt à casser 20 000 000 de maisons...

- Oh, c’est pas très utile, tu sais. Les Américains le font très bien.

Il rit.

[Dialogue avec François, 6 ans et demi, Paris XXe, 30.03.03, 13h20]

Cool, Raoul...

Après quatre jours de bombardements, et juste avant l’attaque terrestre, le présentateur du journal télévisé s’adresse, curieux, au correspondant de la rédaction à Bagdad :

- Alors, dans quel état d’esprit se trouve la population ?

[France 2, 25.03.03, 13h22]

Une bonne idée pour le 1er avril : tuez un Irakien !

Les dépêches, sur le site de Libération, 30 mars 2003,
(l’ordre d’apparition est respecté).

"Aux USA, internet déborde de (bonnes) idées pour le
1er avril
30 mars 11:23

Un colonel irakien aurait été tué au sud de Bassorah
30 mars 11:19"

[sur le site de Libération, 30.03.03]

Les Irakiens sont rusés et malhonnêtes...

"- Nouvelle donne pour les soldats américains, il doivent prendre garde à l’arrière des convois, car ils sont attaqués par des individus dangereux et armés, entrainés à la guerilla..."

"feddayin" habillés en civil.

[Un correspondant de guerre, France 2, 25.03.03, 13h17]

Le choix des mots

"Hier, lors du point de presse de l’état-major de la coalition US-UK, j’ai entendu dire que les bombes à l’uranium 238 étaient sécuritaires. On est ensuite passé à la question suivante."

[Mail sur la liste "sic", 27.03.03, 17h30]

Un geste humain

Une image, une des premières : des prisonniers Irakiens dans le désert, assis à même le sol. Un soldat Almérician voit l’un des prisonniers bouger. Il l’insulte. Soudaint il comprend, car on lui explique, ce que l’autre veut faire, et là, le soldat Américain se calme.

- Il veut faire sa prière. ("He wanna pray !")

Là, il comprend. Cette chose là est universelle, et on la respecte. Curieux.
L’Américain, sans doute, trouve cela honorable. Il s’identifie.
Je me demande pourquoi tout d’un coup on trouve un point d’accord.

[Semaine du 24.03.03, Euronews, "Iraq War", notamment]

Inversons les choses...

"Tract, par Michael Löwy

LE PEUPLE AMÉRICAIN MÉRITE D’ÊTRE LIBÉRÉ DE LA TYRANNIE.
Ultimatum du surréalisme international
Télégramme à George W. Bush, président des Etats-Unis d’Amérique.

Monsieur,

Considérant que :

1) Votre pouvoir est illégal et tyrannique, puisque vous n’avez pas été élu démocratiquement par la majorité du peuple américain.

2) Vous possédez des armes de destruction massive (nucléaires, chimiques et biologiques) que vous refusez de détruire.

3) Vous n’acceptez pas de désarmer ni d’être contrôlé par des inspecteurs des Nations Unies.

4) Vous bombardez et envahissez d’autres pays au nom de la "guerre préventive" et vous êtes donc une menace pour les peuples du monde entier.

Nous, surréalistes de différents pays, réunis solennellement en assemblée générale, vous accordons quarante-huit heures pour abandonner le pouvoir et quitter les Etats-Unis.

Vous êtes encerclé par nos forces et vous n’avez aucune chance.

Rendez-vous et nous vous garantissons la vie sauve et un asile politique en Afghanistan.

Michael Löwy, directeur de recherche au CNRS, est membre du groupe de Paris du Mouvement surréaliste.

Le surréalisme international

Pcc : Michael Löwy "

["Tract, par Michael Löwy", Le Monde, 25-27.03.03, http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3232--314226-,00.html]

Exotic War

Couverture de l’Express : un soldat en train de combattre. Derrière, un palmier.
Tout en une image.

[Couverture de l’Express, sorti le 28.03.03]

Mots et images de la guerre

19.03.03, les premiers commentaires. On revoit les plans noirs avec un clair au milieu, les longs plans sur les hélicoptères et le matériel, des bâtiments "stratégiques" en béton gris. Des rues désertes. Rien, encore. Et sur/de ce rien, on parle longuement. Les journalistes ont l’air content de parler, s’activent, on dirait presque que la guerre leur plaît.

France Info ce matin, les Américains ont "sécurisé" une zone du Sud. La zone n’était-elle pas sûre avant qu’ils n’arrivent ? Le journaliste fait ici chemin avec les soldats, il parle comme eux.

Il y a un mot que je n’ai pas entendu sur France Info : "invasion". Assez curieusement, on en parle pas (ou je ne l’ai pas lu) d’"invasion américaine en Irak". Pourtant, il s’agit de quoi ?

Entendu l’histoire d’un hélicoptère, modèle anglais, "pourtant sûr", qui a eu un accident (selon les Irakiens, c’est une cible détruite). Va-t-on rentrer dans l’histoire technique du matériel militaire maintenant ? Pourquoi ne la fait-on pas hors du temps de guerre, si c’est intéressant ?

La réduction au technique est évidente. On ne revient pas sur les raisons de l’opération. Le discours se fait sur la technique. Le discours est une opération technique. La logique de la digression, de "l’encadré", du blanc à combler, du pseudo-pédagogique conduit subrepticement à une légitimation tacite du processus par une parole qui ne traite que du comment "ça se passe". La technique est admirable. Elle est force et légitimité.

Ce matin, dans la cuisine, en écoutant France Info, j’ai expliqué à ma mère ce que c’était que le pétrole. On a ouvert l’encyclopédie. Pour elle, c’était un gaz. On aurait pu regarder aussi l’article "Irak".

A la Une de La Vie Financière : "Bourse : les scénarios à court et à moyen terme". Je suis resté paralysé devant une affiche hier. Oui, en effet. Le soldats progressent. Ils sont beaux. Vont-ils gagner le gros lot ?

J’ouvre l’Express, numéro spécial "Irak, La guerre qui va changer le monde" (20-26.03.03 ; 3 euros). Le titre courant du dossier est "La guerre d’Irak". Pas la guerre USA-Irak. Pourquoi ?

Page 84-85 de l’Express, une illustration en pleine double page ("L’arsenal déployé contre l’Irak"), comme dans les ouvrages documentaires pour la jeunesse, ou... les magazines de mode branchés avec objets mis en situation. De nombreux matériels de guerre (chars, avions, missiles, hélicoptères sont représentés. Les lettrages, légendes incorporées dans l’image, indiquent ce dont il s’agit. Mini-fiches techniques. Certaines armes apparaissent en colonne, superposées, sur fond jaune. Le tout à l’air d’un catalogue. J’avais envie d’écrire à l’Express pour commander.

Le GBU 28 m’a l’air très bien. "Son "pénétrateur" en uranium appauvri peut percer 6 mètres de béton armé ou 30 mètres de terre." Ca plairait beaucoup à mon fils. La description des caractéristiques et des pouvoirs" de chaque arme fait penser aux cartes Pokémon ou Yugi-Yo (chaque monstre a ses "puissances" et ses modes d’attaque). Mais le GBU 32 JDAM m’a l’air très bien. En plus, il est livré en kit.

La Une de l’Express : un montage d’images qui évoque toute la violence "du film". Très attracteur, presque racoleur. On vend (avec) la guerre.

France Info (22.03, pm) détaille les insultes que les dirigeants irakiens adressent aux Américains ("chiens.. mécréants..."), et semble s’en étonner. On ne devrait pas sortir du bon ton ; même sous les bombes. Il faut savoir raison garder.

Bernard Volker (TF1) parle de l’armée irakienne, très faible, peu de moyens, qui ne peut opposer que peu de résistance. Pourquoi cette guerre alors, contre un pays qui a peu de moyens militaires, et dont on feignait de craindre qu’il en ait beaucoup...

[22.03.03,10h-12h. Si vous souhaitez réagir à ce texte, n’hésitez pas, faites-moi parvenir vos compléments, réactions ou commentaires.]

Solidarité internationale

"- Les Bagdadis [sic] ont confiance dans la précision des missiles américains".

[Parce qu’ils se promènent "sans crainte" dans les rues, Claire Chazal, TF1, 13h10]

Monstres en sommeil

- "On veut nous faire pleurer sur les enfants Irakiens, mais les enfants Irakiens sont les terroristes de demain..."

[Madame Kigley, américaine, mère d’un pompier mort dans l’attentat du 11.09.01, Journal de France 3, 16.03.03, 19h45]

Précision

"- Jean-Pierre, que signifient ces fumées que nous voyons derrière vous ?"

[Claire Chazal au correspondant de TF1 à Bagdad, après/pendant les bombardements aériens, 22.03.03, 13h20]

La vie est un long fleuve

- La vie a repris ce matin à Bagdad de façon à peu près normale.

[Claire Chazal, journal de TF1 à Bagdad, 22.03.03, 13h17, après que l’on ait expliqué que le tiers de la ville était détruit]

(Lire tout l’article de La Chronique.)

 

 

 

 

 

 
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