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Lu, vu, entendu : « Identités éditoriales »

par Un collectif d’Acrimed,

Congratulations, confusions, promotions, vaccinations...

 Congratulations

Dans Le Nouvel Observateur du 10 décembre, Jean Daniel propose un éditorial intitulé « Vivre avec l’Islam ». Et dans le même numéro, on peut lire une chronique de Denis Olivennes qui, sous le titre « Opération identité », nous apprend ceci : « Le débat sur l’identité nationale n’est pas intellectuellement illégitime. Surtout avec la hauteur de vue de Jean Daniel. »

 Confusions

Un abonné écrit à Télérama : « Je suis un abonné de longue date […] et j’apprécie l’engagement de Télérama pour les grandes causes de notre époque. Aussi je suis consterné en découvrant dans le n° 3124, page 13, une publicité dithyrambique pour Israël, qui commence par "Israël, partez plus loin que prévu" et se termine par "Aujourd’hui, l’essentiel est en Israël". »

Publicité pour des voyages, mais aussi pour un État qui ne cesse de s’étendre « plus loin que prévu »... N’est-ce pas aussi « essentiel » ?

La réponse du directeur :

Chère lectrice, cher lecteur,

Vous avez été un certain nombre à réagir à la page de publicité que l’Office du Tourisme d’Israël a publié dans nos pages dans le n° 3124 du 21 novembre et nous sommes bien évidemment sensibles à vos réactions.

Cependant, je voudrais profiter de cette occasion, en tant que directeur de la publication, pour rappeler les règles que nous suivons dans ce domaine. La rédaction du journal est totalement indépendante de la publicité, et à l’inverse la publicité est indépendante de la rédaction. Pour peu qu’un annonceur suive les règles de la bienséance, pour peu qu’il évite tout allusion diffamatoire ou s’abstienne de toute affirmation de nature politique, il n’y a aucune raison de refuser la présence de telle ou telle page de publicité.

Ajoutons enfin que, les deux domaines étant indépendants, la présence de ces pages de publicité n’est en aucun cas un « soutien » de la part de la rédaction en faveur d’une entreprise ou d’une cause.

En espérant vous compter longtemps parmi nos lecteurs, croyez bien, chère lectrice, cher lecteur, en mes sentiments les meilleurs.

Philippe Thureau-Dangin
Président de Télérama

D’après le blog « La feuille de chou », le 8 décembre.


 Promotion

Sur son blog, sous le titre « Les coulisses de la promo », Paul Moreira relate sa tournée des médias, à l’occasion de la parution du livre qu’il a écrit avec Hubert Prolongeau, Travailler à en mourir. « Le livre sort, écrit-il, alors que l’épidémie de suicides à France Télécom secoue le pays. Sans doute est-ce pour cela que l’intérêt suscité chez les journalistes est plus vif que d’habitude. » S’il se félicite de l’accueil qu’il a reçu « chez Bourdin à 8h25. RMC et BFM TV à la fois » et de la part de « Laurence Garcia, qui fait les petits matins du week-end sur France Inter », il complète ainsi :

« La promo, elle avait commencé avant même que j’ai le bouquin entre les mains, il y a presque un mois, dans l’émission de Franz Olivier Gisbert, “Vous aurez le dernier mot”, sur France 2. Les hommes tombaient à France Télécom, les uns derrière les autres.

FOG recevait Darcos, le tout nouveau ministre du travail. En m’invitant, l’assistante m’avait dit par deux fois : “Faut y aller sur le débat !...” Genre : on compte sur vous pour le sport sur le plateau. Sur le plateau, hors caméra, juste avant de commencer, FOG l’avait répété, avec un petit geste de la main, le poing serré, incitatif : “Pour le débat, faut y aller, hein ?!...” Tout ça devant Darcos, de plus en plus inquiet, qui devait se demander s’il n’était pas tombé dans un traquenard.

Il n’y a pas eu de sang sur les murs. Il aurait été un peu étroit de faire reposer les suicides sur un ministre interchangeable qui venait juste de recevoir le maroquin du travail par le jeu des chaises musicales.

Les débats, version FOG ou pas, c’est ainsi : des simulacres de match de boxe. »

Mais avec FOG, l’arbitre est un poids lourd, très lourd.

 Vaccinations

Extrait d’un article de Philippe Foucras, médecin généraliste connu pour ses prises de position critiques vis-à-vis des lobbies pharmaceutiques, à paraître dans le n° 48 de la revue Pratiques :

« […] Une information transparente, à défaut d’être indépendante, de la part d’experts qui expriment leurs incertitudes et leurs questionnements, respectent la loi sur la transparence de l’information médicale en révélant leurs liens avec les firmes et les intérêts marchands ? Il ne faut pas rêver.
Au lieu de cela, des injonctions et des mensonges des leaders d’opinions, vierges outragées lorsqu’on leur demande de respecter la loi en déclarant leurs liens d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique, formalité à laquelle ils se plient pourtant sans barguigner quand il s’agit de la promotion de leur carrière internationalement.
Un exemple ? Celui du professeur Delfraissy, expert grippal de ce mois de novembre 2009 (il faut bien varier un peu les experts), qui se présente comme "indépendant" dans l’hebdomadaire L’Express du 12 novembre 2009, qui s’exprime dans l’émission matinale de France-Inter du 19 novembre sous la direction du journaliste Demorand.

Qui rappelle que le professeur Delfraissy est membre du conseil d’administration de la fondation Roche (lien périmé), qui commercialise le Tamiflu, alias oseltamivir ? Qui informe qu’il est membre du conseil scientifique de la fondation de la firme GSK qui commercialise un des vaccins antigrippe A ? Ni lui, bien sûr, au mépris de la loi et des citoyens. Pas davantage les journalistes, complaisants avec leur déontologie et les dealers d’opinions pharmaceutiques.

Alors, lorsqu’un auditeur demande si l’on peut choisir son vaccin dans les centres de vaccination, et en particulier celui commercialisé par Sanofi, la journaliste Cardin, spécialiste des questions de santé à France-Inter ment en disant que oui, et le Professeur répond que ce vaccin est moins efficace que les autres puisque sans adjuvant. Comment faut il entendre sa réponse à la lumière de son lien illégalement dissimulé avec la firme GSK qui commercialise le vaccin concurrent ? Selon la revue Prescrire, c’est au contraire le vaccin Sanofi qu’il convient de préférer, compte tenu des incertitudes qui planent sur les effets indésirables liés aux adjuvants. Et lorsque l’animateur Demorand pose la question de l’indépendance des experts, parce qu’il faut bien la poser, la question, l’autre invité de cette émission, membre d’un comité d’éthique, répond : « Faites nous confiance, les précautions sont prises », au mépris de la littérature scientifique internationale qui démontre depuis longtemps les influences des firmes sur les experts et leurs conséquences néfastes sur la santé publique. Mais il est vrai que pour les éthiciens français, la question des conflits d’intérêts en médecine n’est un problème « ni sérieux, ni véritable ». [...] »

 Vaccinations (bis)

Le « Baromètre thématique des journaux télévisés » publié par l’INA au mois de décembre 2009 fait le décompte des sujets consacrés à la grippe A dans les JT. Avec des résultats guère surprenants, mais précis : 680 sujets y ont été consacrés depuis son apparition (et un sujet sur deux de la rubrique “santé”), 10 sujets par jour en moyenne entre le 24 avril et le 4 mai 2009, et le pic de cette « communication de crise » atteint le 30 avril avec 41 sujets. Conclusion de l’INA : si l’épidémie fait un nombre relativement faible de victimes, les médias pourraient donner le sentiment « d’avoir créé artificiellement le sentiment d’inquiétude  ».

Une étude qui, curieusement, n’a pas eu beaucoup d’échos dans les médias. Sur France Culture cependant, on en a parlé au journal de 12h30, le 2 décembre. Le présentateur pose cette question légitime : « est-ce qu’on en fait trop ? ». Et c’est Hubert Huertas qui répond alors, en commençant par cette prémisse qui dispense de la suite, et vaut de longs discours : « La question n’est peut-être pas bien posée. La question n’est pas de savoir si on en fait trop ou pas assez, mais de constater, plus simplement, qu’on en fait énormément . »

Sujet suivant ?


 Apathie fait du ski

Dans un « Vite dit » du 7 décembre, @rrêt sur images (@si) s’interroge :

« Écho intrigant sur Twitter : ce week-end, Geoffrey de la Rocca, journaliste de BFM Radio (…), indique qu’il a croisé Jean-Michel Aphatie, éminent intervieweur matinal de RTL à... Val d’Isère, dans un voyage de presse organisé par le Club Med.

Comme l’indique le site de Radio Val d’Isère, Henri Giscard d’Estaing, PDG de l’entreprise de tourisme, vantait samedi dernier à la presse et à des partenaires commerciaux les charmes du "nouvel espace 5 Tridents" (comprendre : très luxueux) du Club Med Val d’Isère. Les journalistes présents étaient invités sur place par le Club Med et ont pu y passer le week-end. Etait-ce également le cas pour Aphatie ? Cela ferait désordre, puisqu’il avait invité Henri Giscard d’Estaing à répondre à ses questions le 12 juin sur RTL. Le patron venait défendre son entreprise, attaquée par Bernard Tapie, qui tentait à l’époque d’entrer dans le capital.

Le service de communication du Club Med confirme l’information. Mais veut dissiper tout "malentendu", en précisant que "s’il était bien présent, M. Aphatie l’était en tant qu’accompagnateur de son épouse", invitée sur place à titre professionnel.

Sollicité par @si pour savoir si une telle participation ne heurte pas ses principes déontologiques, Aphatie n’a pas donné suite. »

Aphatie ne faisant qu’accompagner en toute indépendance son indépendante épouse, tout va pour le mieux dans le meilleur des domaines skiables.

 « Par delà la gauche et la droite », la politique du pire ?

Lu dans Télérama, n° 3125 (02/12/2009), ce portrait croisé de Brice Couturier et Julie Clarini, intitulé « La politique du mieux ». L’extrait ci-dessous était titré « Par delà la gauche et la droite, ils élèvent le débat » :

« Ces deux-là, enfermez-les dans une pièce et, dans les secondes qui suivront, il sortira des étincelles. Combattre, ils savent faire, pourvu que cela reste sur le plan des idées. C’est David Kessler qui a pensé à les réunir en 2006, après s’être dit que Julie Clarini était trop à gauche et Brice Couturier trop à droite pour animer seul(e) une émission de débat […].
Il faut croire que le concept n’était pas si tordu : trois ans plus tard, Du grain à moudre est devenu le rendez-vous où sont exposées équitablement les opinions les plus contraires à propos d’une question d’actualité économique, sociétale, politique, philosophique...
Les éclats de voix, il y en eut beaucoup au début entre eux. « Hélas, soupire Brice Couturier, j’ai peur qu’avec le temps nos points de vue ne se soient rapprochés. » En fait, explique Julie Clarini, « on s’engueule politiquement, on sapprécie humainement et on s’entend professionnellement ». Lui, ancien maoïste, et qui fut dans les années 80 « attaché du groupe socialiste au Sénat pour les affaires étrangères », tient à préciser qu’à France Culture « la droite commence avec le PS  »... « et l’extrême gauche, pour Brice, à la gauche du PS », achève sa coéquipière. Au fond, ce qui les sépare résulte plutôt de questions évidentes (masculin/féminin ou génération 68/génération post-mitterrandienne...) que de questions idéologiques. […] « Au fond, aujourd’hui, on s’amuse plus qu’on ne se dispute, explique Julie Clarini. Bien sûr, les tensions persistent, mais elles portent essentiellement sur les personnalités qu’on envisage d’inviter. [...] »

Encadré par un animateur « trop à droite » et une animatrice « trop à gauche » que ne séparent plus guère des « questions idéologiques », le débat, selon la conclusion (de Télérama) qui s’impose, « a de beaux jours devant lui sur France Culture. ». Mais il a aussi de beaux jours derrière lui : en 2006, déjà, nous avions apprécié l’équitable « autopsie de l’extrême gauche par des animateurs cultivés ». En 2006, avant donc que leurs « points de vue ne se soient rapprochés »…

 « Envoyé spécial », émission de propagande ?

La Ligue Odebi dénonce sur son blog un reportage bidonné d’« Envoyé spécial » (France 2) sur la loi Hadopi, diffusé le 19 novembre dernier, accusant l’émission d’avoir fait de la « propagande ». L’organisation estime que l’« enquête » est partiale, accumulant les poncifs (la France pays de « pirates », les « jeunes » stigmatisés, etc.) et oubliant de les questionner en citant les nombreuses études tendant à prouver que ce ne sont là que préjugés, démentis par les faits. Plus grave, la Ligue accuse l’émission d’avoir sciemment censuré les opposants à la loi :« Sans parler du fait que la Quadrature du Net et la Ligue ODEBI avaient été sollicités et avaient répondu de manière constructive. Malheureusement il se trouve que ces deux passages ont été "coupés au montage" quatre heures avant la diffusion de l’émission . La Ligue ODEBI démontrait en particulier qu’un des piliers de la loi - le fait qu’on puisse identifier un internaute grâce à son adresse IP - était stupide et tomberait au premier procès. La Ligue ODEBI avait en effet réussi devant les cameras d’Envoyé Spécial à usurper des adresses IP en 30 minutes. Ce simple passage aurait suffit à n’importe quel juge pour classer les affaires à venir mais FRANCE 2 n’a pas cru bon de faire ce cadeau à ses téléspectateurs. »

 La tête de l’emploi de « jeune primo-délinquant »

La Feuille de Chou s’amuse sur son blog d’un article paru dans Les Dernières Nouvelles d’Alsace, et lance un jeu-concours :

« "L’auteur du car-jacking samedi soir à Illzach n’aura pas couru plus de 24 heures. Interpellé par les gendarmes le lendemain, il comparaissait hier devant le tribunal.
Il n’a pas la tête de l’emploi : c’est un jeune primo-délinquant."

.....

Grand jeu-concours lancé par la Feuille de Chou

Envoyez des photos ou des dessins de jeunes qui ont la tête de l’emploi

Le gagnant recevra un flux rss2 à F2C.

Et un peu plus loin, on lit :

"Mais comme le lui rappelle très justement le procureur : "On est pas à la télévision et vous risquez 7 ans de prison pour ce que vous appelez une bêtise."

Résumé
Sachant que l’auteur du « car-jacking » a été condamné à 36 mois de prison, dont 18 avec un sursis et une mise à l’épreuve, plus 5000€ de dommages et intérêts à la victime, quelle sera la peine pour l’auteur de l’article qui prétend reconnaître les primo-délinquants à leur gueule, et massacre les règles de la négation ? »

 La tête de l’emploi (bis)

Une première proposition, aperçue en « une » de Yahoo.fr le 4 novembre :




 Mougeotte boycotte Canal + dans Le Figaro

Vexé par un sketch des « Guignols » le mettant en scène, Etienne Mougeotte, directeur des rédactions du Figaro, a interdit à ce journal de parler de Canal + jusqu’à nouvel ordre. C’est Libération qui relate l’épisode :

« Etienne Mougeotte, directeur des rédactions du Figaro, a de la fumée qui lui sort des naseaux : "C’est inacceptable !" confie-t-il à Libération.
L’objet de sa fureur ? Comme le raconte Challenges, un sketch des Guignols du 9 décembre : on y voit un Mougeotte de latex brandir le (faux) Figaro du lendemain, avec en une : "Musulmans, Noël approche, pensez à rentrer chez vous". Une référence à la vraie une du Figaro  : "Sarkozy rappelle aux musulmans leurs droits et leurs devoirs" sur fond de minarets.
"C’est la chose la plus abominable qui soit
, fulmine Mougeotte, on m’accuse de racisme, c’est une attaque ignoble !" Il a saisi le CSA, qui lui a fixé un rendez-vous. Alors Mougeotte a sorti l’artillerie lourde : "Nous ne parlerons plus de Canal +, nous ne ferons plus d’articles sur leurs programmes, on ne va pas faire de la pub à Canal + qui laisse penser que je suis raciste, c’est une ignominie !"
On notera au passage qu’il considère les articles du Figaro comme de la pub. »

Vu par son propriétaire comme un instrument de propagande au service de ses intérêts particuliers [1], Le Figaro doit désormais se mettre également au service de son directeur des rédactions.

 
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