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Sur l’Observatoire des médias, une leçon de stalinisme du Point

Haro sur l’Observatoire français des médias, en proie à des " dissensions internes ", selon Le Point. Un journal de référence en matière de débat pluraliste....

" En hausse, en baisse ", " Top, flop ", etc. La plupart des newsmagazines (hebdomadaires généralistes) parisiens comportent des " brèves " accordant félicitations ou blâmes à des acteurs de l’actualité, mais selon des critères qui ne sont jamais explicités. Si bien que ces quelques phrases elliptiques informent surtout sur la ligne éditoriale du journal...

La page " Médias " de l’hebdomadaire Le Point (12/12/03) fait de l’Observatoire français des médias le titulaire de son encadré " Flop "  [1]. Une seule phrase suffit à " motiver " la sentence :

" Ce comité de journalistes créé fin septembre dans la mouvance altermondialiste pour lutter contre la marchandisation de l’information est déjà en proie aux dissensions internes... "

Concernant la présentation de l’Observatoire, Le Point réussit l’exploit de concentrer en une seule phrase un nombre exceptionnel d’erreurs factuelles. Encore les ravages d’une enquête approfondie. Mais là n’est pas notre propos.

Concentrons-nous sur le motif du verdict : pour Le Point, si l’Observatoire fait un " flop ", c’est parce qu’il est " en proie aux dissensions internes ".

Rien dans Le Point n’étayant cette affirmation, le lecteur est invité à la prendre pour argent comptant. Peut-on exciper que l’hebdomadaire du milliardaire chiraquien François Pinault s’est inspiré d’une récente " enquête " par téléphone et par courriel de Daniel Psenny dans Le Monde (9/12/03) - dont Pinault est actionnaire ? [2] (lire Les tripatouillages du Monde (1) et (2))

Donc, " flop ", l’Observatoire français des médias serait " en proie aux dissensions internes ". Il faut supposer que pour Le Point, l’absence d’unanimisme et la confrontation des points de vue représentent un péché indépassable.

Chasse aux sorcières ?

Il est vrai qu’en juin 2001, en pleine polémique sur le " passé trotskiste " de Lionel Jospin, un avertissement (non signé) du Point (22 juin 2001) garantissait solennellement à ses lecteurs que

" La rédaction du Point est l’une des rares, à Paris, peut-être la seule, à ne pas compter d’anciens trotskistes dans ses rangs. "

On ne sait si, pour ce péremptoire exercice de " transparence ", la direction du Point avait passé chaque journaliste au sérum de vérité, voire à la gégène, ou si elle avait eu recours à quelque officine de renseignement... Mais cette affirmation aux relents policiers donnait tout son suc aux professions de foi " libérales " étalées semaine après semaine dans les colonnes du journal.

Que la direction du Point se prévale d’une gestion stalinienne de sa rédaction peut certes dérouter le lecteur. Mais le même réflexe n’est guère opérant quand il s’agit de rendre compte du fonctionnement d’une structure démocratique comme l’Observatoire français des médias...

 
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Notes

[1Le " Top " est cette semaine-là décerné à la station de Radio France FIP.

[2Dans sa chronique de Libération du 12/12/03, Daniel Schneidermann, ancien du Monde licencié pour délit d’opinion, écrit :
(Dans l’affaire Executive life, où Pinault est impliqué) " Le thème du « racket » américain était apparu dans un éditorial du Monde la semaine précédente. Dans cette bataille d’opinion à haut enjeu pour le contribuable français, il est intéressant de revenir sur les positions du Monde pour une raison particulière : le président du conseil de surveillance du Monde, Alain Minc, est un conseiller éminent de François Pinault. Et la holding Artemis de Pinault est actionnaire indirecte du Monde, à hauteur de 2,46 %. En vertu du Livre de style du Monde, le quotidien devait donc « signaler comme telle » cette qualité d’actionnaire dans les articles consacrés à Executive Life, ce qu’il ne fit pas. Omission qui ne sembla pas empêcher les éditorialistes du quotidien de référence de choisir leur camp : celui de François Pinault. "
(Lire : L’actionnariat du Monde).

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