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Soldes au Monde : une « Contre-enquête » pour le prix de deux

par Olivier Poche,

Cet étrange doublon n’a pas échappé à l’un de nos correspondants : Le Monde, qui a publié le 22 avril une « Contre-enquête » sur les retraites, l’a recyclée, telle quelle, un mois plus tard. Sans un mot d’explication, du moins à tous les lecteurs. Le fin mot de l’histoire en post-scriptum...

La double-page de « Contre-enquête », à la fois produit d’appel et illustration de ce « journalisme de questionnement » que Le Monde a désormais décidé de pratiquer, est le concept-phare et la grande innovation de la nouvelle formule du Monde. Celle du 22 avril est comme il se doit annoncée à la « Une » du journal :

« Retraites : les pistes pour aligner le secteur public sur le régime privé ». On notera au passage que le « journalisme de questionnement » n’a pas oublié l’art de suggérer les réponses [1]. Pages 10-11, la « Contre-enquête » propose donc un « décodage », une « analyse », une infographie sur « deux idées reçues à nuancer », un « contrepoint », et deux interviews :

Passons sur le contenu précis de cette « Contre-enquête », qui ne nous intéresse guère ici. Un mois plus tard, le 19 mai, les retraites sont à nouveau à la « Une » puisque « le PS entre enfin dans le débat » :

Une nouvelle « Une » qui annonce une nouvelle « Contre-enquête »… Pas si nouvelle que ça, se dit-on en lisant l’appel de « Une » qui en précise le contenu en reprenant, avec quelques changements mineurs, le titre et les sous-titres du 22 avril. Et pas nouvelle du tout, constate-t-on finalement en ouvrant la fameuse double-page, qui dégage un fort parfum de déjà-lu :

Et pour cause : le seul changement notable dans cette nouvelle « Contre-enquête »… c’est la publicité ! Faut-il voir là le symbole de la « plus-value » journalistique de la nouvelle formule du Monde ?

Si l’on se refuse à croire que désormais Le Monde pratique sciemment la « remballe » chère à la grande distribution, comment expliquer ce recyclage ? Erreur technique ? Dysfonctionnement interne ? Plan de rigueur et compression de personnel ? Ou fierté professionnelle et sens aigu de la répétition pédagogique ?

Nous perdant en conjectures, nous avons tenté de mener la contre-enquête. Mais elle a tourné court. Sauf omission de notre part, pas un mot d’explication, encore moins d’excuse, pas d’erratum dans le quotidien jusqu’à présent. Nous avons même appelé Le Monde, qui nous a renvoyés vers son service « communication ». Avec lequel la communication n’a pas pu être établie…

À suivre ?

PS : Tout s’explique (quelques heures après la mise en ligne de cet article)

Le correspondant d’Acrimed a reçu la réponse suivante du "Courrier des lecteurs" du Monde :

"Cher monsieur,

La parution de cette contre-enquête sur les retraites parue le 22 avril est effectivement la même que celle du 19 mai à la différence que celle que vous avez vu le 22 avril ne l’a été que sur internet le journal du 22 avril n’étant pas sorti pour cause de grève. La direction estimant au regard de l’importance du sujet qu’il était crucial de la publier cette fois ci sur l’édition papier pour en avoir une meilleure diffusion auprès des lecteurs.
Merci de l’attention et de votre vigilance que vous accordez à notre journal.
Cordialement
Dominique Buffier"

Soit ! Mais pourquoi ne pas avoir fourni cette explication à tous les lecteurs du Monde ?

 
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Notes

[1En pages intérieures, la question est plus ouverte : « Faut-il aligner public et privé ? ».

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