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EN BREF

Rachat du Parisien : Bernard Arnault s’offre un nouveau support publicitaire

par Acrimed,

Depuis 2010 et le rachat du Monde par le trio Bergé-Niel-Pigasse, les milliardaires français semblent avoir trouvé dans le secteur de la presse d’information un nouveau Monopoly grandeur nature. Après que Libération, L’Express [1] et L’Obs [2] ont changé de mains ces derniers mois, ce serait maintenant au tour du Parisien-Aujourd’hui en France.

Le groupe LVMH, contrôlé par Bernard Arnault, déjà détenteur des Échos, s’apprêterait en effet à acquérir le quotidien, propriété du groupe (et de la famille) Amaury [3]. Dit autrement, c’est la 150è fortune française qui, semblant avoir besoin de « cash » pour poursuivre son développement dans l’industrie du sport, cède à la 2è fortune du pays un pan, devenu accessoire, de son patrimoine. Un type de transaction entre milliardaires devenu si courant qu’il n’est plus traité que dans les rubriques éco/entreprise des principaux médias, et qu’il ne suscite, chez des journalistes comme mithridatisés, plus guère d’étonnement. Un simple épisode de la vie des affaires, qui se résume à une transaction financière et à une inflexion de stratégie industrielle, et qui ne pose donc aucune question en termes d’indépendance de la rédaction et de l’information….

En revanche, ce qui laisse perplexe l’ensemble des observateurs de ces grandes manœuvres, c’est le pourquoi de cette transaction… Pourquoi un spécialiste du luxe, détenteur d’un titre de la presse économique destinée aux cadres dirigeants, irait-il investir dans un quotidien populaire ? À celles et ceux qui s’interrogeraient, le journaliste du Monde qui relate l’information tente de les rassurer avec une analyse… pas très rassurante : l’acquisition « n’a pas pour seul objectif de satisfaire l’appétit ou la quête d’influence » de Bernard Arnault…

Mais alors pourquoi cette transaction ? La pub, pardi ! En effet, l’opération permettrait de décupler l’espace publicitaire disponible dans les titres LVMH pour faire la promotion des produits des 60 marques… LVMH. Et pour celles et ceux qui s’inquièteraient du faible pouvoir d’achat des lecteurs du Parisien, le PDG des Échos, interviewé dans Le Monde pour commenter l’opération qu’il supervise, se veut optimiste : « Le lectorat du Parisien/Aujourd’hui en France est très large et touche notamment les cadres et les PME de province, qui lisent également Les Échos ». Ouf ! Nous voilà rassurés, sabrez le champagne, l’opération s’annonce juteuse !

À la manière des lessiviers qui produisirent dans les années 1950 les premiers « soap operas » pour s’offrir du « temps de cerveau » de téléspectateur disponible afin de vendre leurs lessives, Bernard Arnault va donc produire de l’information généraliste pour mieux vendre ses sacs en croco et sa camelote inabordable. Le comble de la marchandisation de l’information en somme…

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Notes

[1Rachetés par le milliardaire des télécoms Patrick Drahi.

[2Racheté par l’inévitable trio (de milliardaires) Bergé-Niel-Pigasse.

[3Lequel possède aussi L’Équipe ainsi qu’ASO, la société organisatrice du Tour de France et du rallye Dakar, entre autres évènements sportifs forcément couverts par… L’Équipe – on n’est jamais mieux servis que par soi-même.

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