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RFI : lettre ouverte aux ministères de tutelle (Intersyndicale)

Alain de Pouzilhac, PDG de l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF), désavoué, a été contraint de démissionner le 12 juillet 2012. Aurélie Filippetti, à plusieurs reprises, a confirmé la promesse du gouvernement d’enterre le projet de fusion entre RFI et France 24, et de préserver l’identité de RFI. Et pourtant ces sont des décisions contraires aux engagements de campagne et à la volonté de la majorité des salariés de RFI qui sont prises. Nous publions ci-dessous une lettre ouverte de l’(intersyndicale de RFI qui s’en inquiète (Acrimed)


LETTRE OUVERTE AUX MINISTERES DE TUTELLE

Madame, Messieurs,

Lors de l’entretien que nous avons eu jeudi dernier avec vous qui représentiez le ministère de la Culture et celui des Affaires étrangères, vous nous avez fait comprendre que le déménagement de RFI à Issy-les-Moulineaux ainsi que la fusion juridique de RFI et France 24 au sein de l’AEF devaient être maintenus.

Voici quelle est aujourd’hui la réalité sur le terrain pour les salariés de RFI qui ont déjà déménagé à Issy-les-Moulineaux :
- De futurs studios de radio “verrières”, qui, situés au milieu des futurs espaces de travail en “open-space”, sont perméables aux sons extérieurs, et ce malgré des travaux d’amélioration effectués ces trois derniers mois.
- Des renforcements précaires visibles au sous-sol parce que l’on coule une dalle de béton à l’emplacement du grand studio. La sécurité des salariés est-elle assurée ?
- Des seaux qui doivent être posés au dernier étage pour recueillir l’eau qui filtre au travers du plafond après la pluie, des encadrements de vitres qui se décollent à cause des infiltrations.
- Plus de 40 salariés en provenance de France 24 ou de sociétés de sous-traitance qui se sont ajoutés aux salariés de RFI sur les trois étages déjà occupés à Issy-les-Moulineaux, alors que le rapport Cluzel, dont vous dites vouloir suivre les préconisations, précise (p. 20) : « Les surfaces qui avaient été réservées à RFI et à MCD doivent bien être occupées par leurs équipes, et non par celles de France 24 ou par une extension des services support ».
- Un chef de service, en provenance de France 24, qui s’adresse aux salariés venant de RFI en disant : « Je vais vous apprendre à travailler ».
- Des salariés sommés de décoller un simple tract d’une armoire, des élus qui se voient interdire l’accès à l’immeuble et bousculer par des vigiles.
- Des salariés RFI déracinés à Issy, en perte de repère et d’identité dans un environnement composé uniquement « d’open-spaces », et gérés sans ménagement ni compassion par une DRH transfuge de France 24. Résultat : des arrêts maladie en forte augmentation.

Alors que, jeudi dernier, vous avez qualifié le multimédia de secteur « prometteur, qui peut ouvrir des perspectives », voici quelle est aujourd’hui la réalité dans le service internet qui s’est vu imposer un chef de service en provenance de France 24 :
- Cinq salariés en arrêt de travail.
- Pour assurer seul des vacations de nuit sur le site de RFI, ce qui suppose la responsabilité éditoriale pour son contenu, on envoie un collègue de France 24 qui n’a même pas été formé aux différents logiciels utilisés par le site de RFI.

Vous avez affirmé que la volonté des trois ministères (Culture, Affaires étrangères et Bercy) était d’inscrire le caractère de « chaîne » dans le cahier des charges, dans le futur contrat d’objectifs et de moyens et dans la future loi audiovisuelle. Selon vous, cela devait s’appliquer à RFI, à France 24 et au multimédia. Pourtant, le lendemain, M. Hanotaux a parlé de « rédactions » distinctes. Que devons-nous comprendre ? Envisagez-vous des chaînes ou des rédactions distinctes ? Et s’il s’agit de chaînes, auront-elles un budget spécifique inscrit dans le contrat d’objectifs et de moyens ? Si le multimédia devient une chaîne à part, que deviendront les pages de RFI en langues étrangères ?

Vous avez évoqué une fusion de la radio Monte-Carlo Doualiya avec le pôle arabophone de France 24. Qu’en est-il réellement ? Pourquoi un traitement différent pour MCD par rapport à RFI ?

Pourquoi, par ailleurs, envisagez-vous que le COM s’étende sur la période 2013-2015 ? M. Cluzel indique dans son rapport (p. 28) que « la direction de France Télévisions envisage de nouvelles installations pour ses rédactions, dans lesquelles pourrait s’insérer le moment venu, soit vers la mi-2015, la rédaction de France 24. » Si c’était le scénario prévu, que deviendrait alors RFI ?

Alors que vous avez déclaré que vous aviez compris « qu’une des sources de difficultés était le casting aux postes clés, aux étages supérieurs mais aussi à des niveaux plus profonds, plus larges dans l’organigramme », M. Hanotaux a, le lendemain, en conférence de rédaction, expliqué qu’il incombait aux responsables hiérarchiques actuels de préparer et présenter les nouvelles propositions d’organisation. C’est inadmissible.

La ministre de la Culture et Communication, Mme Aurélie Filippetti, dans une interview dimanche à France Inter a affirmé son attachement à "la préservation de l’identité profonde de RFI, une radio extrêmement importante qui verra ses missions confirmées et n’aura pas de grille allégée…". Nous venons de recevoir la convocation d’une réunion du comité d’entreprise qui se tiendra le 19 juillet pour la consultation sur la dénommée "grille unique" qui est une grille allégée. Alors qu’est-ce que cela signifie ?

Une question posée lors de l’entretien jeudi dernier est restée complètement sans réponse : la convention collective des personnels PTA de RFI cesse en principe d’être applicable le 8 octobre. Que comptez-vous faire ? Que deviendront les garanties conventionnelles actuelles des personnels de RFI si la fusion avec France 24, qui ne les applique pas, est maintenue ? Envisagez-vous d’avoir pour RFI des journalistes correspondants « auto-entrepreneurs » comme il en existe à France 24, contrairement aux dispositions légales ?

Vous avez affirmé que le gouvernement avait décidé un "véritable changement stratégique". Qui va définir cette stratégie ? Les actuelles équipes mises en place par Alain de Pouzilhac, celles-là même qui ont mis en place la stratégie voulue par Nicolas Sarkozy ? Le Conseil d’administration « a adopté une délibération exprimant le souhait que lui soit proposé un projet d’une nouvelle organisation de l’AEF ». A-t-il confié cette tâche aux équipes actuelles ?

Comment pourrions-nous nous contenter du départ de M.de Pouzilhac si sa stratégie est appliquée ? Vous avez pris une décision contraire à la volonté de la majorité des salariés de RFI, représentés par l’intersyndicale. Vous avez pris une décision contraire aux engagements des responsables politiques actuels pendant la campagne électorale qui avaient signé une pétition contre la fusion de RFI et France 24. Vous ne pourrez pas ignorer la situation concrète que vivent les salariés de RFI et esquiver les questions que nous vous posons et que les personnels se posent.

Nous demandons que le moratoire soit prolongé afin que les directeurs d’Alain de Pouzilhac ne puissent continuer à mettre en œuvre la stratégie qui a causé sa démission.

En réitérant notre demande de vous rencontrer à nouveau, de manière urgente, nous vous prions de croire à notre considération.

Pour l’intersyndicale FO, SNJ, SNJ-CGT, SNRT-CGT et SUD de RFI

Les délégués syndicaux

 
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