Accueil > Critiques > (...) > 2005-2012 : Haro sur la critique des médias

M. Quatremer, de Libération, n’est pas content

par Henri Maler,

Monsieur Quatremer, journaliste à Libération, n’est pas content. Il l’a fait savoir sur son blog

De quoi s’agit-il ? D’une critique un tantinet rageuse d’Acrimed qui prend appui sur un article de Claudine Girod, de l’Observatoire bisontin des médias, publié sur notre site sous le titre « Le Monde et Libération : désinformation active sur la directive Bolkestein (Observatoire bisontin des médias) ».

Cet article reproche à M. Quatremer d’avoir présenté comme une information avérée une affirmation controversée et ne pas avoir fait état de la controverse. M. Quatremer tente de se justifier, mais sans comprendre. Et saisit l’occasion pour tenter de disqualifier toute critique des médias qui n’a pas reçu son aval. Le titre - « Théorie du complot » - dit assez que sa réponse sur une question précise n’est qu’un simple prétexte.

Mais voyons d’abord la discussion qui sert de point de départ à l’acte d’accusation.
{}

I. Les faits et leur interprétation

D’un bout à l’autre de son article, M. Quatremer défend son interprétation de la « directive Services », plus connue sous le nom de « directive Bolkestein » : une interprétation qu’il est évidemment parfaitement dans son droit de soutenir et qui ne manque pas toujours d’intérêt. En revanche, M. Quatremer présente une interprétation controversée comme une information avérée. C’est cette confusion, équivalant à une désinformation, que l’article de Claudine Girod contestait ; une désinformation que M. Quatremer conteste à son tour.

Un professeur en exactitude

« Tout l’objet de son article est de démontrer que le projet n’a pas été fondamentalement modifié. », affirme M. Quatremer. Sous une forme aussi abrupte, cette affirmation est inexacte.

L’article de Claudine Girod pour l’Observatoire bisontin des médias soutient que le principe du pays d’origine « n’est pas retiré, il devient simplement non obligatoire. » A l’appui de cette interprétation l’auteure cite, dans sa propre traduction (comme cela est précisé en note), l’amendement n°293/rev4 de l’article 16, partie 3bis (lien périmé, octobre 2013) que nous rétablissons ici dans sa traduction officielle :

3bis. « Les présentes dispositions n’empêchent pas un État membre dans lequel le prestataire de service se déplace pour fournir son service d’imposer des exigences concernant la prestation de l’activité de service, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique, de protection de l’environnement et de santé publique. Elles n’empêchent pas non plus les États membres d’appliquer, conformément au droit communautaire, leurs règles concernant les conditions d’emploi, notamment celles qui sont établies dans les conventions collectives. »

C’est en s’appuyant sur cet amendement que Claudine Girod met en cause l’article M. Quatremer à deux reprises :

 Une première fois pour une affirmation fausse :

« Jean Quatremer (Libération, le 13 février) indique que "si un plombier est autorisé à exercer en Pologne, il pourra exercer aussi en France... En revanche, il devra se soumettre au droit du pays d’accueil en matière de droit du travail, de protection des consommateurs, de droit de l’environnement, de santé publique...". C’est faux. »

S’agissant du moins de l’amendement mentionné plus haut, c’est effectivement faux, puisqu’il ne comprend aucune disposition obligatoire pour tous les Etats, mais mentionne des « dispositions qui n’empêchent pas » les Etats de faire respecter certaines règles. Les seules inexactitudes commises par Claudine Girod sont d’avoir parlé de « clients » pour évoquer le rôle des Etats et d’avoir (comme le note, un rien méprisant, M. Quatremer)... mal numéroté l’amendement.

 L’article de M. Quatremer est mis en cause une deuxième fois pour avoir présenté, une information discutable, ne serait-ce que parce qu’elle est discutée, comme une vérité incontestable. (A titre d’exemple d’une autre interprétation, voir en « Annexe » les arguments de Raoul-Marc Jennar.)

Claudine Girod souligne ceci :

« Dans son article du 13 janvier, "Bolkestein revient en version allégée" , Jean Quatremer écrit, « il [le compromis] vide de sa substance la directive Bolkestein en évacuant le très contesté "principe du pays d’origine" et affirme la soumission des prestataires de services au droit du pays d’accueil  ». Le lendemain, Libération ouvre ses colonnes aux critiques... mais dans la rubrique REBONDS : nous ne sommes plus dans le domaine de l’information.

Et c’est bien ce qui est en question : la prétendue « évacuation » du « principe du pays d’origine » est l’enjeu d’un débat : ce n’est pas une information.

Plus généralement, l’auteure de l’Observatoire bisontin des médias met en évidence selon quels procédés rhétoriques l’interprétation partiale est présentée comme une vérité indiscutable :

« Par ailleurs, et alors que tant au Monde qu’à Libération, on n’hésite pas à présenter le prétendu retrait du principe du pays d’origine (PPO) comme une information avérée , l’évocation de prises de distance critique sur ces amendements et sur la directive elle-même sera toujours renvoyée à l’opinion d’un locuteur identifié (par son appartenance politique si possible). Aux louanges des pouvoirs politiques, le discours direct « objectif » du journaliste. Aux propos qui modulent, nuancent, précisent ce soi-disant retrait du PPO le discours rapporté, direct ou indirect, dont on souligne la subjectivité engagée  »

M. Quatremer ne conteste pas avoir établi ce partage : sur son blog, comme on va le voir, il le justifie.

Un expert en représentativité


M. Quatremer conteste, l’affirmation de Claudine Girod selon laquelle « un vaste mouvement - citoyen et syndical - s’oppose à l’adoption de la directive Bolkestein ». Il le fait en ces termes :

« Depuis, la Confédération européenne des syndicats (CES) et le Parti des socialistes européens (PSE) ont approuvé le nouveau texte. En France, seuls FO et la CGT (et encore mollement) ont maintenu leur opposition ainsi que le PS français (bien qu’il ait approuvé tous les amendements de compromis), le PC, les Verts (pour des raisons qu’explique Daniel Cohn-Bendit ci-dessous ) et les souverainistes (Villiers et Le Pen). »

... Sans compter Attac, les collectifs du 29 mai et de très nombreux citoyens sans appartenance déclarée. Cela fait, semble-t-il, pas mal de monde !

Claudine Girod reproche-t-elle à M. Quatremer d’avoir passé sous silence l’existence d’une opposition à ce texte, celui-ci décrète que cela n’était pas intéressant, au prétexte qu’ils ne constitueraient qu’une «  infime minorité au sein de l’Europarlement » :

« [...] ceux qui ont approuvé la directive modifiée sont deux fois plus nombreux que ceux qui l’ont désapprouvé : il est plus intéressant de citer ceux qui restent contre que ceux qui sont pour [selon Claudine Giraud revue et déformée par M. Quatremer] . De plus, elle aurait pu aussi nous reprocher de ne pas rapporter l’analyse des plus libéraux ou des souverainistes (ce sont eux qui forment le gros bataillon des opposants). Elle devrait au contraire se réjouir de ce que Le Monde [mais pas Libération, ndlr] cite le socialiste fabiusien Henri Weber -et qui pense manifestement comme elle- alors qu’il ne représente qu’une infime minorité au sein de l’Europarlement. »

Aux yeux de M. Quatremer, les majorités sont donc, par principe, plus « intéressantes » que les minorités. Et cela suffirait à justifier qu’un journaliste soucieux d’informer choisisse de priver les lecteurs de la connaissance des termes d’une controverse qui n’est pas éteinte par un vote, même si ce dernier est conforme à l’opinion de M. Quatremer. Passe encore que des commentaires se glissent dans l’exposé des faits : c’est difficilement évitable. Mais que la présentation des faits soit délibérément mutilée pour en faciliter le commentaire relève d’une étrange conception du journalisme. Erreur de mise en page ? L’article de M. Quatremer était une « tribune libre », sans doute destinée aux pages « Rebonds ».

Professeur en exactitude, M. Quatremer confond vérité des faits et validité des interprétations. Professeur en représentativité, M. Quatremer confond la rationalité des arguments avec l’autorité des majorités. Mais c’est dans le rôle de conseiller ès critique des médias qu’il est parfait.

II. La critique et le complot

A dire vrai, l’objectif prioritaire de M. Quatremer n’est pas d’entretenir une discussion, le cas échéant polémique, sur la « directive », ni même de défendre des pratiques journalistiques plus que contestables : la cible véritable de M. Quatremer est la critique des médias telle que nous la pratiquons.

Tout est presque dit, en guise de hors-d’œuvre, dans le premier paragraphe.

Hors-d’œuvre : la détection de l’idéologie

M. Quatremer : « La critique des médias est un exercice normal et souhaitable. Les journalistes travaillent vite et ils n’ont pas toujours le temps de s’interroger sur l’exercice de leur métier. Le problème est que ce travail critique est loin, très loin, d’être toujours fondé. En particulier lorsqu’il émane de groupes qui confondent critique et procès en déviance idéologique . En effet, trop souvent, ces critiques qui se prétendent « objectives » suintent la haine à l’égard de médias qui ont le tort de ne pas partager des a priori idéologiques ou, au moins, de ne pas les conforter. »

Pour cuisiner ce hors-d’oeuvre, plutôt fade, le maniement de ses rares ingrédients suppose un tour de main assez facile à acquérir :

- D’abord, concéder que la critique est « un exercice normal et souhaitable ». Mais aussitôt pour en restreindre le périmètre au temps dont disposent les journalistes.

- Ensuite, contester les fondements de la critique en lui imputant des a priori idéologiques (dont seraient dépourvus les journalistes) et des « procès en déviance idéologique » (que tous les journalistes s’abstiendraient d’instruire). De tels procès sont évidemment absents des philippiques des éditorialistes, à commencer par ceux de Libération et, parmi eux, un certain Serge July dont M. Quatremer a sans doute entendu parler.

- Corollaire : attribuer à la critique des médias une prétention à l’objectivité qui n’a jamais été la nôtre (cette même prétention qui figure en bonne place dans les illusions qu’un certain journalisme entretient sur lui-même). Nous prétendons, tout au plus, à l’exactitude de nos observations. Pour le reste, c’est affaire d’interprétation, la moins arbitraire possible (ou d’objectivité scientifique qu’il nous arrive parfois de viser quand il est question de sociologie du journalisme par exemple). On eut aimé que M. Quatremer partage avec nous cette modestie.

- Enfin, imputer à la haine toute opposition vigoureuse et, le cas échéant virulente, à des pratiques journalistiques que nous contestons. Cette rhétorique tristement banale (et souvent réactionnaire) se passe d’arguments. M. Quatremer « sait » que toute contestation ne peut avoir pour mobile que des passions basses. Il ne mentionne que la haine, mais l’on peut compléter, comme le font tant d’autres, par le ressentiment et la jalousie (ou l’hystérie quand il s’agit des femmes). Ces passions, à en croire les dépositaires exclusifs de la froide raison, seraient le monopole des pauvres (contre les riches), des dominés (contre les dominants), d’une « certaine Claudine Girod, dont on ne sait au demeurant rien » ... et des journalistes sans grade (contre les gradés du journalisme).

La preuve ? C’est sans haine, mais en pleine possession de leurs facultés intellectuelles, que des éditorialistes de renom (Serge July par exemple) ont dénoncé comme « populistes » et « xénophobes » la quasi-totalité des partisans du « non » lors du référendum de 2005. Ou que Jean-Hébert Armengaud a imputé, sans la moindre preuve, un antisémitisme quasi-viscéral à Hugo Chavez, plutôt que d’analyser, mais enquête à l’appui, la politique qu’il mène (le cas échéant pour la contester).

Et c’est sans haine, sans idéologie, en toute objectivité, que M. Quatremer titre son article « Théorie du complot ».

Le plat de résistance : la détection d’une « théorie du complot »

Succès garanti : la traque à une « théorie du complot », souvent aussi imaginaire que les « complots » eux-mêmes, fait partie de l’arsenal ordinaire qui permet, de tous côtés, d’esquiver les mises en question de causes bien réelles et d’acteurs qui contribuent à leur efficacité. Paranoïa de la « traque » contre paranoïa du « complot » ? Inutile de recourir à un vocabulaire psychiatrique (dont il serait décent d’être économe) pour observer, du bord du ring, ce combat de poids lourds des cours de récréation.

« Théorie du complot » donc. Dans l’article de M. Quatremer, nous n’avons trouvé que deux phrases qui aient quelque rapport avec ce titre.

Voici la première : « Sous le titre «  Le Monde et Libération : désinformation active sur la directive Bolkestein », l’auteure explique que nous avons menti, objets - conscients ou inconscients- que nous sommes du pouvoir politique libéral [...] ».

Non seulement l’auteure n’affirme nulle part que Le Monde et Libération sont des « objets du pouvoir politique libéral » (ce qui ne voudrait absolument rien dire), mais l’aurait-elle suggérée, la différence est précisément dans cette alternative : conscients ou inconscients. « Inconscients », des propagandistes le seraient malgré eux : impossible en ce cas qu’ils participent au moindre « complot ». « Conscients », des propagandistes ne seraient pas nécessairement pour autant des « comploteurs » : un complot suppose non seulement des intentions délibérées et convergentes, mais encore une action délibérément concertée. Nous n’avons jamais eu recours à de telles « explications ».

Deuxième phrase destinée à valider le titre : « Si j’ai bien compris le raisonnement à peine sous-jacent, il y aurait là un complot « libéral » - le mot est devenu une insulte équivalente à ce que fut « fasciste » en son temps- visant à faire croire au peuple que le projet Bolkestein est mort alors que tel n’est pas le cas. »

Passons sur la gaminerie qui consiste à présenter comme une insulte ce qui n’est généralement qu’un simple diagnostic. En quoi soutenir ouvertement qu’il existe une interprétation libérale d’une directive libérale (au sens économique du qualificatif) est-il un « raisonnement à peine sous-jacent » ? Mais surtout en quoi ce raisonnement qui n’est en rien sous-jacent relève-t-il d’une « théorie du complot » ? En rien. Encore une « désinformation active ».

La baliverne destinée à stigmatiser sans le moindre argument a pour unique fonction d’interdire toute critique des médias qui n’aurait pas reçu l’aval des détecteurs de raisonnements sous-jacents qui courent après leur ombre et chassent des fantômes : peut-être les fantômes qui les hantent.

Henri Maler


Annexe

Nous publions ci-dessous un extrait d’un texte de Raoul Marc Jennar (chercheur, URFIG/Fondation Copernic), daté du 27 février 2006 et intitulé : « Bolkestien ; Etat des lieux », non dans le but de trancher un différend (ce n’est pas notre propos dans cet article), mais pour montrer simplement qu’il existe.

« Que reste-t-il du PPO ?

A la base du principe du pays d’origine (PPO), il y a une distinction essentielle : on fait la différence entre le siège d’établissement (ce que nous appelons souvent le siège social) d’un fournisseur de services et son siège d’activité. Sur cette base, l’article 16 de la proposition de la Commission européenne distingue l’Etat où est établi le siège social et l’Etat où le prestataire fournit un service. Et le texte dispose que le prestataire doit être soumis uniquement au droit du pays où il a établi son siège social, quel que soit le pays où il développe des activités. C’est l’Etat du siège social qui contrôle le respect de sa législation dans le pays où l’activité est exercée. Ainsi, une fois identifié le pays qui se présente comme le moins disant fiscal, social, environnemental, il suffirait d’y installer le siège social pour que ce soit le régime de ce pays qui s’impose au personnel du site d’activité. Non seulement, on organise la compétition entre travailleurs soumis à des régimes différents, mais on incite à la délocalisation des sièges sociaux. On comprend la colère de tous ceux qui sont attachés à plus de cent ans de conquêtes sociales contournées par une Union Européenne qui n’harmonise plus, qui organise la concurrence entre Européens et favorise les inégalités.

[...]

En séance plénière, le 16 février, en soutenant un compromis négocié entre le PPE (qui compte en ses rangs les députés européens UMP) et le PSE (les socialistes), une majorité de parlementaires européens ont fait mieux encore : après avoir rebaptisé une nouvelle fois l’article 16 qui désormais s’intitule « liberté de prestation des services », ils ont purement et simplement supprimé toute référence au droit applicable et à l’Etat chargé d’en contrôler le respect. Ce qui permet de proclamer que le principe du pays d’origine a disparu. Formellement, c’est vrai. Juridiquement, c’est faux :

a) les Etats membres de l’Union européenne n’auront plus le droit d’imposer un certain nombre de règles. C’est ce qu’on appelle les « exigences interdites » : le texte adopté à Strasbourg fait interdiction à un Etat de subordonner l’accès à une activité de service à une exigence portant sur la nationalité. Des restrictions ne peuvent être fondées que sur des raisons d’ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé ou de l’environnement (les socialistes qui ont négocié ce compromis avec les conservateurs ont accepté de ne pas ranger la politique sociale et la protection des consommateurs parmi les raisons justifiant des restrictions...). Un Etat ne peut plus exiger du prestataire de service qu’il ait un établissement sur le territoire, qu’il soit inscrit dans un ordre professionnel, qu’il se dote d’une infrastructure (un bureau ou un cabinet), qu’il applique un régime contractuel dans ses rapports avec le destinataire du service, qu’il possède un document d’identité spécifique, qu’il utilise un matériel spécifique (sauf s’il s’agit de la santé et de la sécurité au travail). Un Etat pourra néanmoins imposer sa réglementation relative aux conditions d’emploi, y compris celles qui sont établies dans les conventions collectives.

b) on a déplacé le paragraphe 2 de l’article 16 tel que modifié le 23 novembre 2005 vers l’article 35 où il est indiqué que c’est l’Etat de destination qui contrôle le respect par le prestataire « de sa loi nationale ».

c) l’énoncé du principe a disparu du texte, mais aucune indication n’a été introduite dans le texte qui préciserait que c’est le contraire du PPO qui s’applique, c’est-à-dire le principe du pays de destination (l’application de la loi du pays qui accueille un fournisseur de service d’un autre Etat de l’Union européenne). Bien au contraire : un amendement introduisant ce principe, proposé par la Gauche Unitaire Européenne (GUE) a été repoussé. Ce vote est capital : le rejet du principe du pays de destination fournit sans le moindre doute la manifestation de l’intention réelle du législateur majoritaire : il a voulu que s’applique la loi du pays d’origine.

Cette intention est d’ailleurs confirmée par un amendement apporté à la définition du prestataire de service (art 4, 2) : "toute personne physique ressortissante d’un Etat membre ou personne morale, établie conformément à la législation dudit Etat membre, qui offre ou qui fournit un service." On signifie clairement que le prestataire est défini par la législation du pays d’origine. Le fait qu’on précise que l’Etat où le service est rendu garde le droit d’imposer ses propres règles en matière de droit du travail, de santé, de sécurité, d’environnement et de protection des consommateurs est également une manière d’indiquer qu’il perd ce droit dans les autres domaines.

De toute façon, l’ambition de la Commission européenne n’est guère contrariée : elle voulait inscrire dans le droit communautaire un principe du pays d’origine qui est déjà consacré par la jurisprudence de la Cour de Justice. Mais elle peut très bien se passer de cette inscription dans le texte de la directive sur les services. Ce n’est pas un hasard si le cabinet du Commissaire McCreevy, le successeur de Bolkestein, rassurait et invitait à voter ce compromis inoffensif des parlementaires ultralibéraux réticents à l’égard du compromis PPE-PSE qui craignaient que trop de concessions aient été faites aux socialistes dans la modification de l’article consacré au PPO. On peut mesurer ainsi ce que valent les déclarations annonçant la suppression du principe du pays d’origine et quelle est la crédibilité des acteurs politiques et médiatiques qui propagent de telles informations. »

Raoul-Marc Jennar

 
Acrimed est une association qui tient à son indépendance. Nous ne recourons ni à la publicité ni aux subventions. Vous pouvez nous soutenir en faisant un don ou en adhérant à l’association.

A la une