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Lu, vu, entendu : Une nouvelle série pour lutter contre l’amnésie

Une nouvelle série proposée par Acrimed. Objectif : relever, brièvement, non pas ce qui concerne les entreprises médiatiques et leur économie (voir "L’actualité des médias"), mais les informations et les pratiques journalistes, les métiers du journalisme et les conditions leur exercice.

Nous ne pouvons pas tout lire, tout voir, tout entendre. Cette "série" accueillera donc vos observations. Merci de nous écrire à acrimed@wanadoo.fr

Ici le n°1 : une première ébauche de ce que nous voudrions faire pour lutter contre l’amnésie, ce mal endémique du monde des médias, en conservant - pieusement...- quelques fragments recueillis sur la planète Médias.

 Petit ménage entre amis. Le beurre et l’argent du beurre. Information des Echos (21 septembre) : le journaliste Jean-Marc Sylvestre (TF1, LCI, France Inter) a été nommé par le ministre de l’Agriculture Hervé Gaymard « président de la commission d’orientation du future projet de loi de la modernisation agricole ». Il rejoint son confrère et collègue Robert Namias, directeur de la rédaction de TF1, nommé par Raffarin à la tête du conseil national de la sécurité routière. Il devra rendre ses travaux avant Noël.

 Dogme. Le dossier annuel « Tous entrepreneurs ! 40 propositions pour ça bouge » du Figaro Entreprises (13 septembre), propose son un vade-mecum à l’attention d’on ne sait trop qui et avec l’intention d’on ne sait trop quoi.
- Proposition 1 : « Une série télé sur les entrepreneurs qui valoriserait le patron comme on le fait avec les policiers, les juges et les urgentistes  ». Produite par TF1 ?
- Moins drôle : « Former les enseignants » à créer des petits soldats du libéralisme. Cette proposition 6 est précédée de la 5, placée en éclaireur : « Des chefs d’entreprises dans les collèges »...

 Haro sur la CGT. Avant l’intervention de Sarkozy (22 septembre), la direction de Nestlé avait décidé de vendre Perrier contre l’avis de la CGT (ultra-majoritaire) refusant le plan social proposé. C’est un « sabordage syndical », s’est égosillé Patrick Lamm dans son éditorial des Echos du 16 septembre, signant ainsi la "Une" du quotidien économique. Titre ? « Perrier : la CGT prise au piège par son intransigeance ». On notera que La Tribune était moins accusatrice. Mais peu importe, ces journaux savent à qui ils s’adressent (un cadre sur 10).

Or, c’est aussi le cas (des millions d’auditeurs et de lecteurs) de Jean-Marc Sylvestre, reprenant, dans sa chronique matinale de France Inter, le ton et le propos de Patrick Lamm des Echos ; ou bien du Parisien, qui, dans un article « Perrier menacé d’être vendu par Nestlé » , s’est plu à mettre en exergue : « la CGT montrée du doigt »...

 Villepin placé sur orbite. Le Parisien (13 septembre) a invité le ministre dans ses locaux pour le confronter à un panel de français « impressionnés » pour en trier une double-page de promotion. Présentation du ministre : « Peu connu (malgré son combat à l’ONU) et perçu comme plutôt aristo, Villepin a été regardé à son arrivée avec prudence, voire méfiance. Or, à la sortie, tous ses interlocuteurs se sont dits impressionnés, voire bluffés. Car l’auteur (lyrique et intello) du « Requin et la Mouette » - son dernier essai - n’a rien esquivé, a visiblement éprouvé une sorte de jubilation à ce face-à-face et, en plus, il a réussi l’exploit de ressembler à tout, sauf à un politique « classique ». Il n’a peut-être pas fini de surprendre. L’homme, murmure-t-on, pourrait le jour venu succéder à Jean-Pierre Raffarin à Matignon. ». Qui a dit que certains journalistes sont incapables de flagornerie ? [1]

 L’Europe des éditorialistes. Pour ou contre la Constitution européenne ? Ça se discute. Mais quand presque tous nos éditorialistes sermonnent les tenants du "Non", cela ressemble fort à une campagne. Deux échantillons de la machine à Oui.

Dans la compétition que se livrent les patriciens de la plume, il fallait bien qu’Alexandre Adler, manitou de la pensée infuse, tout en participant au concert de sifflets et railleries qui ont accueillis le « oui, bien sûr » au « non » de Fabius, fasse entendre sa prodigieuse (forcément...) différence. Alors, dans son billet généreusement payé par Le Figaro du 15 septembre, le voilà qui se détache et décide

- de donner une leçon à ses confrères qui, bassement, n’avaient vu dans la prise de position de Fabius qu’une manœuvre : « En réalité, il dépasse de beaucoup la simple tactique d’un candidat présidentiel qui avait besoin de bousculer, avant qu’il ne soit trop tard, les équilibres internes de son parti. » ;

- d’assurer, modestement, sa propre publicité : « En l’occurrence, les ambitions contrariées d’un socialiste en réalité très réformiste vont permettre l’émergence d’un phénomène qui n’est pas limité à la France et que je propose d’appeler ici (j’en ai d’ailleurs déjà parlé abondamment dans mon dernier livre, L’Odysée américaine) “le parti géopolitique”. » Suit une explication de son « concept » assez longue pour annoncer que Fabius est membre du parti fondé par Adler : « Comment interpréter le geste de Fabius en France ? Le parti du “non“ à l’Europe, auquel il vient de conférer la respectabilité de son parcours et les succès pragmatiques de son passé de Premier ministre et de ministre des Finances, est en fait un parti géopolitique en gestation. ».

- d’épurer le parti adlérien. C’est Alexandre qui le dit : pour être cohérent, le parti doit être « épuré » (sic) de ses « figures les plus pittoresques », qu’Alexandre Adler prend soin de désigner avec précision : « depuis les sectateurs d’Attac jusqu’aux exécrateurs de l’immigration musulmane qui votent, eux, pour Le Pen, en passant par de nombreux écologistes, chasseurs, identitaires et postmodernes de tout poil ».

Toujours sur l’aile droite, Claude Imbert, qui aime à se regarder mépriser du haut de sa plume, distille quant à lui sa mauvaise humeur dans Le Point du 16 septembre. Titre ? « Le coup de Fabius ». Fragments : « C’est pitié » ; « Entre nous son égarement ne date pas d’aujourd’hui » ; « Ce zèle conquérant, cynique, cette démagogie magistrale  » etc... La chute : « Le tort n’est que pour la France ».

Ces deux échantillons ne suffisent pas à rendre compte de la richesse éditoriale sur le sujet : nous veillons et nous y reviendrons ...

 
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